Salem

Souvenirs

Salem

Face à mon ancêtre, ma poitrine me brûla et sembla tambouriner.
Dorothy m'observait, yeux dans les yeux, la tête inclinée, son regard de vipère me perçant le visage.
J'entendis Aiden inspirer mais je ne bougeai pas.

"Du calme, descendante. Tu n'as aucune chance de t'en sortir, cette fois. Ne stresse pas pour ça."

Je fronçai les sourcils et scrutai Aiden.
Celui-ci fit de grands yeux et tourna la tête vers moi, la mine accaparée.

"Salem, je suis désolé... Je ne savais pas..."

Je faillis lui demander ce qu'il avait fait, mais je le vis s'effondrer devant moi, et juste après, je m'évanouis à mon tour.

Aiden

Une cave sombre. Des cordes fines et coupantes attachant mes poignets. Un ruban aux odeurs horripilantes obstruant ma bouche. Des chaînes à mes pieds. Mon dos courbé sur le sol. Mon énergie vide.
J'étais comme un chien maltraité.
J'avais peur.
Car je sentais Salem couchée a côté de moi, et je n'entendais que ma respiration. J'avais essayé de faire du bruit, mais elle était silencieuse comme un mort.
Je me torturais à réfléchir, a me demander pourquoi Dorothy ne nous avait pas achevé.
Et puis...
Le sang coulait sur mes poignets comme il a coulé avant Salem.

Ne plonge pas. Tout ça c'est du passe. Salem a besoin de toi. Si tu plonges elle meurt.

Cette sensation...

Non. Elle a besoin de toi. Ne plonge pas. N'y repense pas. Pour elle.

Je ne peux pas...

C'est passé. Conserve en vie la seule chose pour laquelle tu as une raison de vivre. Ne repense pas à tout ça.

Mon cœur... Je revois ma mère hurler. La souffrance physique revient.

Non. Stop. Arrête d'y penser.

Mon père au téléphone, appeler les secours. De l'écarlate partout.

C'est fini. Cesse de te torturer en y réfléchissant. Cesse d'y penser.

Et ma grande sœur... Le dernier regard qu'elle m'a jeté. La secousse de l'ambulance.

Ça suffit. Salem sera ta guérison. Seulement si tu agis.

Mes yeux s'embuèrent. Je me mis a gigoter pour passer mes mains ligotées devant moi en pliant les jambes.
Dans l'obscurité la plus totale, je me débattus corps et âme dans le démêlage. Un liquide poisseux et tiède jaillissait de mes mains pendant que je me forçais a oublier la douleur.
Puis, le lien craqua.

Lex

J'attendais le message d'alerte de Salem pour lui envoyer en texto la pile de conseils que je voulais lui donner. C'était son premier "rendez-vous" depuis longtemps, apparemment.
Je lisais un livre, assise dans mon canapé, attendant que mon téléphone vibre, affichant le message de Salem.

Elle était vraiment très gentille. Grace a mes centaines d'années, je savais percer la personnalité de n'importe qui en lui jetant un simple coup d'œil. Et je peux vous dire que Salem était très intelligente et très attentionnée, mais elle voyait le monde comme un piège. Elle voyait les gens comme des constants dangers. Et puis... Elle avait été témoin d'un homicide sanglant.
Cela faisait trois heures que je la connaissais mais j'avais gagné sa confiance et elle la mienne. C'était rare que deux sorcières ne se sautent pas à la gorge. Mais je l'aimais bien.
Elle avait gagné la confiance que je n'accordais qu'aux plus proches de moi. En l'occurrence, la personne la plus proche de moi était l'enfant que je portais... Mais bon.

Elle m'avait promis de m'envoyer un message me résumant la situation avant huit heures.
Et il était 9h40.

Aiden

"Salem ? Salem !"

Je m'étais accroupi à côté de son corps inerte, tentant de prendre son pouls, mais le mien battait si fort que je ne sentais rien. Je ne voyais rien non plus. L'obscurité rongeait ma vue.
Ma voix tremblante et cassée implorait Salem de revenir.
Rien.
Pas de souffle, pas de pouls.
J'avais peur.

Une odeur d'essence se répandit dans la pièce et je la reconnus : c'était ma cave.
On était toujours chez moi.
Et Dorothy n'était pas là.

Je me levai et me dirigeai,  avec difficulté a cause des chaînes que j'avais aux pieds,vers un mur, vers celui ou j'étais censé trouver l'interrupteur. Lorsque la pièce fut éclairée j'otai les chaînes qui m'empêchaient de correctement me déplacer. Je pris Salem dans mes bras et montai les escaliers de la cave, en priant intérieurement.