Chapitre 8

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          Je détestai être dévisagée. Être regardée, épiée, étudiée, me mettait généralement mal à l'aise, sûrement une déformation due à mon mode de vie d'ours des cavernes. Ceci dit, ce soir, être scruter des pieds à la tête par une inconnue en petite tenue me tapait plus sur le haricot qu'autre chose. Je n'étais pas gênée, ni même incommodée par le regard incisif qui était posé sur moi, j'étais beaucoup trop remontée pour ça.

Installée dans la salle de repos des employés de la station-service, je ruminai ma colère, bras croisés, sourcils froncés. Je trépignai d'impatience sur ma chaise, pressée d'en savoir plus sur la présence de tous ces loups à Fredericksburg. J'avais la sensation d'en savoir moins que les personnes réunies autour de moi, des choses avaient été faites dans mon dos, et l'ignorance me faisait horreur. Je ne comprenais pas les raisons qui avaient pu pousser Nick à quitter son territoire, à emporter Loki avec lui, à me coller Sam aux fesses. Nick ne quittait ses terres que pour ces déplacements professionnels, ou en cas de crise de majeur, un Alpha ne laissait jamais les siens sans motif valable. Mais que faisait-il ici ? Les affaires de chasseurs ne le concernait pas. Était-ce son inquiétude quotidienne pour moi qui l'avait poussé à me suivre ?

Je bouillonnai de l'intérieur, avide d'obtenir de réelles réponses à mes questions, d'autant plus que j'étais en la présence d'une femme inconnue au bataillon, qui ne cessait de me lorgner d'un œil mauvais. Personne ne nous avait présentées, aucun des hommes présents ne s'y était risqué, mais si j'en croyais les regards furtifs qu'elle adressait de temps en temps à mon âme-sœur, Nick, lui, ne lui était pas inconnu. Une part de moi, régie par mes hormones et mes instincts territoriales, n'approuvait pas du tout la façon qu'elle avait de lui sourire. Je n'étais pas possessive pour deux sous, mais la manière dont elle se dévorait la lèvre inférieure en le regardant était suffisamment explicite et significative de ses envies profondes. Elle voulait le bouffer tout cru, et si elle persistait dans cette voie, je craignais de ne pas être capable de garder mon calme. Ma vie au sein d'une meute de loups possessifs avait l'air d'avoir déteint sur moi, j'avais presque envie de montrer les dents et de grogner pour marquer ma propriété.

— Alors, l'un de vous va-t-il se décider à parler ? Ou va-t-il falloir que je fasse les questions et les réponses ? M'impatientai-je.

— Pourquoi les humains sont-ils toujours si pressés ? S'interrogea le bêta de la Meute du Soleil en penchant la tête sur le côté.

Établi en face de moi, l'immense viking à la carrure de bûcheron répondant au nom de Loki James me détaillait avec quasiment autant d'attention que la fille aux cheveux écarlates. Le petit sourire moqueur qu'il arborait aux coins des lèvres m'en disait long sur la satisfaction qu'il prenait à me taquiner, je fus ravie de lui renvoyer l'ascenseur en lui balançant un léger coup de pied sous la table.

— Ouch !

— La question n'est pas de savoir pourquoi ils sont si pressés, répliqua la fameuse Nora, elle est de savoir pourquoi ils sont si arrogants ? Peut-être est-ce une caractéristique des chasseurs ?

— Ça, c'est de famille chérie, et encore, tu devrais voir mon grand-père, une vraie tête à claques !

Constatant que sa pique n'avait pas eu l'effet escompté, la louve grogna. Les remarques acerbes sur les chasseurs, j'en récoltais à la pelle à neige depuis que j'avais commencé le métier. Je ne m'en formalisai pas, il en fallait plus pour me blesser.

— Nous nous intéressons à ce qui se passe ici depuis plusieurs semaines, déclara finalement l'écossais adossé contre la porte de service.

Je soutins le regard perçant que me lançait la change-peau pendant un instant encore avant de me tourner vers le roux, je croisai les bras sur ma poitrine.

Alpha : Le chant MortelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant