Chapitre 4 : Nouvelle poignée.

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Une fois notre « embrassade » achevée, le doc’ m’invite à sortir au plus vite avant que Mme Asserbaie n’annonce l’heure du repas, après m’être rhabillée. Oui, oui : rhabillée. Oh, ne cherchez pas plus loin. Je m’exécute donc, le quittant sans lui accorder le moindre regard, comme à chaque fois que ce genre d’évènement se produit entre nous. Pourquoi donc ? Tout simplement car les douceurs au début, au milieu et à la fin ne sont destinées et pratiquées que par ceux qui s’aiment. Ainsi vaut il mieux ne pas faire preuve d’actes si décalés par rapport à notre « relation », si l’on peut la qualifier ainsi. Je ferme donc la porte de son bureau, ressentant malgré tout ses yeux me fixer tristement jusqu’à ce que je quitte son champs de vision.

Soudainement, une voix stridente résonne dans le bâtiment tout entier. Les portes des chambres alignées les unes en face des autres dans le couloir s’ouvrent alors dans la plus majestueuse des synchronisations. En sortent ainsi de nombreuses créatures en tout genre : des enfants, des vieillards et des entités qu’il est impossible de catégoriser, chacune ayant sa propre façon de se déplacer. Certaines sautillent gaiement, d’autres traînent du pied ou rampent tandis que quelques unes se laissent pousser et guider par la foule jusqu’au réfectoire. Je rejoins alors la marche, me fondant dans cette masse cadavérique mouvante qui se déplace au rythme des gémissements de douleur des uns et des fous rires déjantés des autres.

Nous arrivons ainsi lentement dans la salle à manger. Quelques cinglés s’attablent au hasard ensemble sans qu’ils n’aient besoin de dialoguer car cela n’en vaut pas la peine : ils n’en n’ont plus les capacités physiques. D’autres hésitent. Vaut il mieux savourer sa bouillie seul ou accompagné ? La vie sociale de ceux-là est déjà toute tracée : ils ont fait leur choix et se retrouvent désormais en tête à tête avec leur plateau au bout d’une grande table. Quant à moi, je peux me permettre de m’installer où je le désire, personne ne se permettra jamais l’insolence d’avouer que ma présence dérange. Cependant, je reste quelqu’un qui apprécie et considère à leur juste valeur les bonnes vieilles traditions et vais donc rejoindre un groupe qu’il m’est agréable de côtoyer et avec lequel je reste la plupart du temps : il s’agit d’une bande d’enfants qui m’affectionnent comme si j’étais leur ainée. 

Avant que je n’arrive vers eux, le leader de la petite tribu m’aperçoit et me fait des grands signes, m’invitant à venir savourer le repas à leurs côtés. Un sourire se dessine sur mon visage tandis que je m’assois au près du plus jeune : Édym. Il s’agit également du plus perturbé et du plus imprévisible. Toujours à fixer le vide, à réciter des poèmes inconnus, il passe son temps auprès des autres pour ne pas foncer dans des murs auxquels il ne prête pas attention. Il lui arrive fréquemment de pleurer, c’est le seul moment où il cesse sa récitation continuelle d’ailleurs mais aussi où il a le plus de chances de perdre totalement le contrôle de ses actes qui constituent le plus souvent un véritable désastre sanguinaire. En réalité, il paraîtrait que sa mère adoptive était son institutrice. Il l’aimait beaucoup mais détestait probablement les poésies qu’elle lui faisait rabâcher… Sans doutes au point qu’il ne la supporte plus et lui porte un coup fatal. Dorénavant, il demeure persuadé qu’elle est en colère mais qu’elle reviendra forcément pour le chercher s’il a bien appris ses leçons. Ainsi, le pauvre petit reste stoïque face à un plat qu’il ne mangera pas, de peur de devoir s’arrêter pour pouvoir mâcher. Tenarbé m’a avoué qu’il devait lui injecter des vitamines tous les jours pour éviter qu’il ne fasse un malaise.

« Dis Mercure ? Pourquoi t’es pas venue nous raconter une histoire hier ? Et pourquoi on a juste trouvé un garçon bizarre qui pleurait tout seul dans ta chambre ? me questionne le petit chef. »

Ce petit là est le plus vieux du clan, bien qu’il n’ait que 8 ans. Malgré son jeune âge, c’est un fou conscient qui est très bavard et curieux de surcroît. Il me voue une admiration digne de celle qu’un enfant peut porter à son superhéros favori. Toujours à aider ses camarades plus ou moins turbulents, il fait cependant au moins trois crises par jour. Ainsi, Mlle Raba étant chargée des patients de moins de dix ans, le voit très souvent, à un point tel que le pauvre la considère comme une mère exemplaire. S’il savait…

LESCHTING ASYLUM.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant