La porte ouverte, mon ombre fluette s’étend de tout son large dans cette pièce plongée jusque-là dans l’obscurité la plus totale. Au fond de celle-ci, je constate la présence d’une petite chose d’où émanent probablement des sanglots… Raaaah. N’y-a-t’il donc rien pour éclairer ce fichu bureau ? Je débute alors mon enquête, me collant au mur et cherchant du bout des doigts ce qui pourrait constituer un interrupteur. Exécutant donc ma danse approximative, je me surprends à me satisfaire de la pénombre qui me permet ainsi de ne pas être ridiculisée par la honteuse position dans laquelle je suis. Finalement, par un hasard tant attendu, mon index atteint et appuie sur ce qui semble être un bouton… Et la lumière fut !
« Mecure… Mercure, tu es là ! Aide-moi, je t’en prie… »
La forme de la petite chose se concrétise enfin par l’apparition de la lumière. Parnem, évidemment. Il est allongé dans un coin de la pièce sur ce qui, de loin comme de près, ne paraît être qu’un engin de torture. Des sangles de cuir nouées retiennent en otage ses chevilles et ses poignets, tandis que le pauvre petit est essoufflé suite à de probables ébats pour se libérer. Des larmes ensevelissant ses joues rougies, il me lance un regard noyé de désespoir, le faisant paraître tel un animal sauvage et craintif. Ses yeux m’adressent bien au-delà d’un simple appel de détresse et il semble avoir vécu bien plus qu’un moment de solitude ordinaire. Toute cette peur en lui m’effraie.
« Calme-toi Parnem… Respire calmement !... Que s’est-il passé au juste ? »
Dès lors, tandis que je le défais de ses liens, le petit se perd dans ses songes. Désormais dénué d’émotion, il débute une observation inlassable du plafond. S’échappe alors doucement de ses lèvres gercées un petit bruit. Vous savez, celui qu’exécutent les enfants pour exprimer le fait qu’ils ne savent pas. Je n’insiste donc pas, achevant ainsi sa libération. Parnem se redresse alors lentement et, tandis qu’il fixe froidement le vide, j’essuie d’un revers de la main les quelques larmes qui ornent son visage.Soudainement, Parnem se lève sans rien dire et m’étreint, reprenant alors ses sanglots en hoquetant. Toujours aussi silencieux, hein ? Je le serre donc à mon tour.
« Là, là… Je suis là. »
En caressant calmement le dessus de sa petite tête brune, je commence à examiner le décor qui nous entoure. Au centre de la pièce, un nouveau bureau, étonnamment bien organisé de surcroît. Omet serait-il donc maniaque ? Sur celui-ci, des petites fioles aux contenus exotiques et toutes sortes de seringues de toutes sortes d’envergures. D’ailleurs, l’une d’elles semble avoir servi il y a peu… Quelques gouttes d’un liquide rouge s’en échappent.Je remarque alors une armoire consternante disposée dans un coin, près d’une porte sur laquelle est accroché un écriteau « Personnel uniquement ». Tout comme cette dernière, les vitrines du meuble sont fermées par un imposant cadenas. Je relâche donc Parnem puis saisis sa main en me dirigeant vers cette armoire qui m’intrigue tant. Sans prêter attention à son contenu, je remarque tout d’abord la présence de nombreuses petites plaquettes sur lesquelles sont inscrits des prénoms. Parnem en pointe soudainement une du doigt.
« Mercure… Ton nom y est aussi. »
En effet. « Mercure Valentiers », quelle appellation étrange. Une vieille photographie jaunâtre accompagne la pancarte : celle d’une fille au teint blafard, dont les yeux gris sont si clairs qu’ils apparaissent blancs à cause du flash de l’appareil. Seule sa chevelure colorée d’un bleu excentrique ravive ses traits pitoyables et douloureux de psychopathe. Rien qu’à en voir sa tête, on comprend immédiatement la raison de sa présence en de tels lieux. Ah… C’est si… Si punitif de revoir son visage après tant de temps. J’avoue avoir évité le moindre contact avec ma réflexion depuis déjà de nombreuses années. Je ne me rappelais même plus avoir jamais eu les cheveux d’une telle couleur auparavant, c’est dire. Il leur reste certes quelques reflets mais ils noircissent de jour en jour, quoi qu’il en soit. Je me demande bien si mon air a changé. Ai-je toujours cette expression de gamine dégénérée ou ai-je mûri ? Mieux vaux ne pas le savoir, les fous n’ont pas besoin de reflet de toute façon.
Le petit tire alors ma manche, comme pour attirer mon regard sur un point précis pour le moins inquiétant, à en ressentir les tremblements tumultueux de son corps encore engourdi. Mes yeux se dirigent alors vers ce que contient ce meuble qui nous intrigue. Ce sont des flacons, tous très petits, étincelants, soigneusement assignés à chaque plaquette et… emplis d’un liquide rouge poisseux. Omet est donc maniaque et fou. Ma foi, c’est intéressant pour un docteur en asile.
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LESCHTING ASYLUM.
Mystery / Thriller"Un fou, ce n'est pas qu'un être monochrome à notre instar. Préférons plutôt voir en lui des nuances et des couleurs afin de mieux établir notre jugement à son sujet." - H. Soulodes, "Des fous et des Hommes". Il existe un lieu bien étrange où demeu...