Quand j'suis arrivé chez toi, après l'enterrement, c'est ta mère qui m'a accueilli. Elle avait les yeux fatigués et rougis. Ça m'brisait le cœur.
Elle m'a proposé à boire, j'ai gentiment refusé ; j'ai plus goût à rien. Je ressens plus la faim, la soif, le seul truc qui a un contact avec mon être intérieur c'est les cigarettes. Et ça m'suffit.
Ensuite, elle m'a donné une boîte. Elle était lourde, recouverte de velours noir. Mon nom était inscrit, gravé dessus. Mon cœur s'est mis à battre plus vite, j'me suis empressé d'l'ouvrir, comme si j'espérais quelque part que c'était une preuve que t'étais encore là. Mais c'était des cassettes. Des dizaines de cassettes, et je savais c'que c'était : Nos vidéos, nos enregistrements. Toutes nos conneries d'gamins. Tout les souvenirs que j'avais avec toi.
Alors j'l'ai remercié et j'suis reparti, j'ai attendu longtemps avant d'oser rouvrir cette boîte. J'ai eu l'temps d'aller te voir au cimetière, puis j'suis retourné sur Paris.
J'suis rentré dans mon appart', j'ai posé la boîte sur la table et j'ai attendu. C'est qu'en pleine nuit, que j'ai décidé d'les visionner. J'arrivais pas à dormir, j'pensais à toi, encore une fois.
Alors j'ai ouvert la boîte et j'ai ressorti mon vieux lecteur de cassettes, quitte à déranger les voisins ; j'voulais entendre ta voix. Fallait que j'revois ton visage, une dernière fois.
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J'souris quand ton visage apparaît sur le mur, projeté : ton rire arrive jusqu'à mes oreilles, et ton sourire illumine mes yeux.
J'suis dans le noir complet, et je te regarde, je te revois me répéter d'arrêter de te filmer. J'm'en souviens parfaitement de celle-là. On avait 15 ans, on avait acheter cette caméra avec nos argents d'poches des trois derniers mois combinés. On se filmait partout, on avait même donné un nom à c'truc là : Ken + Scarlett. Ça m'manque.
J'ai passé ma nuit à faire ça, j'ai revisionné une à une chaque vidéo, et j'ai réécouter un à un chaque enregistrement. Je t'ai revu rire, sourire, dormir, pleurer. J'nous ai revu ensemble, dans nos meilleurs et nos pires moments.
J'ai revécu chaque instant, chaque fou rire, chaque larme, chaque chute, chaque promesse. Et la dernière promesse que j'tai faite.
« Ken ? » La caméra se tourne vers toi.
« Ouais ? »
« Tupeuxmefaireunepromesse ? » Tu fais un sourire.
« Dit »
« Prometsmoiquetum'abandonnerapas, etquetunem'oublierajamais. Promis ? » Tu me tend son petit doigt. Je rentre dans le cadre.
« Promis. »
Et mon petit doigt attrape le tien, un sourire se plante sur mon visage d'enfant. La vidéo s'arrête là.
J'ai pas tenu la première. Mais j'te promets de tenir la dernière.
