XXIV

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Le trajet se faisait dans un grand silence religieux. Personne ne daignait prononçer le plus petit mot, même Bamba qui était d’humeur sage et taquine se gardait de parler. Ils se limitaient à se jeter des coups d’œil  et à fixer rigoureusement Aziz qui était en train de dormir le visage très froissé par les pleurs et le tumulte de tout à l’heure. Bamba qui avait le volant se gara dans le parking de l’hôtel et fit signe aux passagers qu’ils étaient arrivés, Moustapha qui somnolait déjà se releva et hésita à réveiller son grand frère. Il le fallait tout de même car là c’était en ville pas en campagne, les curieux allaient trouver incongru de transporter  un homme qui dort déjà. Ils croiraient surement qu’il était mort ou s’imagineront quelque chose encore pire de ce genre.
  Après multiples appréhensions,  il lui tâta la cuisse et  finit par le taper un peu fort pour le sortir de sa léthargie. Il se réveilla l’air  dépaysé et entreprit de dévisager le visage de chacun et s’arrêta net sur celui de son petit frère, il le fixa longuement et lui toucha tempérament le visage.
-Moustapha, C’est toi ?
Il acquiesça et fut sauté par son frère  qui le serra fougueusement contre lui comme si sa vie en dépendait. Moustapha l’étreignit encore plus fort avec les larmes qui coulaient à flot.
-T’es venu pour me sauver ? wAllah frère tu avais raison, Tabara et Omar m’ont piégé. Tu n’imagines pas ce qu’ils m’ont fait, ils m’ont séquestré dans cette maison avec une vieille femme qui ne ménageait aucun effort pour me faire souffrir. Rentrons, nous allons tous raconter à papa et à maman.
-Aziz des années se sont écoulées tu n’es plus un ado regarde toi. Il te faut du temps afin d’éclairer ta lanterne sur toutes les zones d’ombre de ta tête ; nous sommes plus au Sénégal mais à Dubaï.
Il sortit de la voiture l’air perdu et marcha à vifs pas vers la sortie du parking et regarda autour de lui en voyant les grands édifices et les passants de races différentes.
-Moustapha où est papa et maman ? Je veux les voir tout de suite.

-Aziz, maman est morte. Dit-il lâchement

Il regarda son frère la bouche béante comme s’il venait de l’offenser gravement.  Il s’approcha encore plus près de lui le regard fugitif suppliant à Moustapha de répéter ce qu’il venait de lui dire sans sortir un seul mot. Il ne répondît pas et prit sa main en le conduisant en haut dans leur chambre. Il y consentit sans rechigner, ils arrivèrent et s’assirent près du lit sans se quitter des yeux.  Moustapha serait apte à aliéner toute sa fortune pour ne pas à vivre ce moment aussi pesant, mais il savait que c’était incontournable depuis que le mage lui avoua que c’était à lui de le mettre  à jour  personne d’autre. Sur tout le chemin de retour, il pensait à cela mais au moins il gardait espoir qu’il aurait le temps de se préparer et que ça allait se faire par petites gouttes. C’était juste un faux espoir, il ne pouvait pas s’échapper à ce « supplice ».

-Aziz, pourrons-nous attendre jusqu’ ‘à demain ?, dit-il la voix hésitante
Ce dernier ne répondît pas et ne bougea pas d’un iota son regard qui noircit de plus en plus. On se douterait même s’il vivait encore tellement sa respiration ne s’entendait guère, on aurait dit qu’il tentait de bloquer toutes ses émotions. Moustapha s’approcha de lui pour prendre ses mains mais  fut repoussé par son aîné que l’empoigna violemment par le col de sa chemise à travers ses mains checreuses et l’ordonna de tout lui dire sous un ton péremptoire.   Moustapha obtempéra à la seconde qui suit et lui narra tout dans les moindres détails.   Il s’écroula complètement  au sol l’air abattu en se frappant la tête puis l’entoura entre ses deux mains en criant comme un nouveau-né qui venait de tomber des bras de l’infirmière. Bamba et Kène accoururent tous effrayés, Moustapha se courba en essayant de maitriser ses émotions. Bamba tenta de calmer Aziz par la force  qui commençait à reprendre ses esprits.
-Aziz, il ne faut pas réagir ainsi je t’en prie. Tu ne vois pas à quel point tu accables ton petit frère ; Cela fait mal trop mal même je n’en disconviens point j’essaie de me mettre à ta place mais je sais que tu vis encore pire comparé à ce que je suis en train d’imaginer mais ressaisis toi.  Ta famille a été éclatée par des loups, il n’est aucunement de ta faute ni celle de ton père. Ta mère a juste quitté cette terre mais elle est vivante elle est omniprésente partout où tu es j’en suis sûr même que tu es bien entrain de la sentir car elle est bien là où elle est. Je ne la connais pas mais j’ai entendu sa bienséance, qu’Allah lui fasse encore plus de miséricorde. C’est dur mais la seule chose que tu peux faire pour la rendre fière de toi est de ne pas te morfondre, ressaisis toi mon frère et retournez dans votre pays. Il vous reste votre père ; Recollez les morceaux et reformez votre famille.

Elle Croyait Que La Roue Ne Tournait Pas ♡♤Où les histoires vivent. Découvrez maintenant