Chapitre 3 - Etre sain, de corps et d'esprit

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Le 3 Novembre de cette année.

Finalement, j'ai pas fini ma pizza, hier. J'ai essuyé mes doigts graisseux et je suis allé écrire un peu. J'ai mis une heure.

Tu sais que tu es un bon moyen de tuer le temps ? Je dois avouer que je n'arrivais pas à poser mes mots. C'est vachement dur de déverser ses pensées sur du papier, surtout quand on sait pas comment raconter, ni comment s'y prendre. J'ai jamais été doué en littérature. Ni même en orthographe. Tu me pardonneras s'il y a des fautes ? Au final, t'en sais rien. Si c'est juste pour m'écrire pardon, je l'écrirais, et je dirais que c'est toi, mais ça me filera pas bonne conscience pour autant.

A l'école je n'étais pas une buse, j'étais juste un véritable clown. Je faisais rire les autres, je brillais, j'étais le feu de la classe par mes conneries : le genre d'élèves qu'un professeur ne peut pas oublier, même s'il le veut. J'ai fait des tas de choses que je ne citerais pas, j'ai trop honte. En tous cas, les études, je les ai foirées. Après, j'ai enchaîné le parcours du mec paumé : petits boulots, pôle emploi, re-petits boulots. Pourtant, j'avais la pêche. Une vraie teigne ! Je m'accrochais, je souriais, franchement, j'étais heureux. J'allais dans tous les sens, tous les bars, avec tous mes potes.

Ce qui me gêne, vois-tu, cher journal souffre-misère, c'est ce petit imparfait dans mon présent. J'étais. Donc je ne suis plus. Je ne suis plus heureux, je ne suis plus souriant. Avec la forme négative du présent : j'ai lu ça en replongeant dans mes Bescherelle, pendant la soirée. Ma vie a coulé, un jour. Je sais plus quand. Mes amis ont voulu me remonter. J'ai refusé. J'ai été con, aussi. Au passé composé.

Là, j'essaye de capter où est-ce que j'ai raté le train. Et quand. Ces derniers jours, et pour la première fois depuis des semaines, je me suis mis à penser à moi. Ca ne change pas vraiment de d'habitude en fait, mais cette fois je ne veux plus fuir ce que je suis actuellement. Je veux penser à moi. Sérieusement. J'ai éteint la télé, j'ai ouvert la fenêtre et –waouh, ça me parait presque irréaliste de dire ça maintenant que c'est fait- j'ai rangé mon appart. Il est propre, maintenant. Il snife bon l'ordre et le vaporisateur d'intérieur au citron.

Je suis pas une fée du logis, mais je suis content. Il ressemble à quelque chose, mon chez moi, maintenant. Le désordre de ma tête par contre, c'est pas encore ça : j'ai fouillé mes archives de vie, j'ai dépoussiéré mes albums photos, j'ai appelé mes parents –répondeur- j'ai ressorti mes vieux cahiers de classe, et j'ai tout accroché sur un tableau en liège que j'avais un jour bricolé. J'ai ensuite calé ce bordel dans le salon, sur le mur, et j'ai fais des liens entre tout avec des ficelles.

Ça m'a remotivé pour quelques heures.

Puis, vers huit heures, j'ai arrêté, au bord de la crise de nerfs. Je vois pas. Je trouve rien. Mon ventre grognait, alors je me suis décidé à manger.

Le frigo était toujours vide.

Dans un élan de courage, j'ai attrapé des fringues lavées, et je suis descendu dans la rue pour trottiner jusqu'au Bar-kebab d'en face.

Enfin, fallait pas espérer que je me mette à manger sainement tout de suite. On verra, si je tombe un jour sur un autre reportage comme celui de la fille du journal. Un reportage miracle qui me fasse cuisiner et, c'est peu dire, manger sain.


Kingdom Hearts - Tu Colores mon ÂmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant