Et si je te disais que non.
Non, ça ne va pas.
Ça ébranlerait ton petit monde utopique mais est-ce que ça te ferait vraiment quelque chose?
Serais-tu réellement capable de me venir en aide alors que moi-même je ne saurais comment tu pourrais m'être utile?
Veux-tu connaître la vérité ou tu n'agis qu'avec politesse lorsque tu me parles?
Je pourrais continuer à gonfler notre relation d'illusions, faire comme si j'étais la personne que je devrais être et te répondre: "oui et toi?" Lorsque tu me demandes comment je vais... Je pourrais. Mais je n'en ai plus envie. J'ai envie de pleurer toutes les larmes de mon corps et de parler sans arrêt jusqu'à ce que je n'ai plus aucun secret pour toi.
J'ai envie que la simplicité ne soit plus la solution facile et que l'automatisme de nos paroles disparaisse enfin. J'ai besoin de ne plus me sentir seule alors que je suis entourée de tous ses gens. J'ai besoin de renouveau, de quelque chose de mieux que ma vie actuelle.
Je me sens prisonnière de mon propre corps, prise au piège dans une réalité qui ne me convient pas.
N'as-tu pas l'impression d'être qu'un petit engrenage dans un mécanisme énorme sur lequel tu n'as aucun contrôle?
Souvent, je sens le temps qui passe tout autour de moi, je vois le monde bouger et s'amuser et je me sens figurante dans ce film interminable qu'est la vie. Je me demande parfois si la fin ne serait pas meilleure, ou du moins, moins ennuyante que cette longue répétition de scènes routinières... Si seulement j'avais la confirmation d'être l'actrice principale du prochain film mais je demeure qu'une simple figurante, et l'épuisement me gagne. J'en ai marre parfois. J'en retire plus aucun plaisir et ça m'effraie. Ça m'effraie de ne plus être sur le même plan que les autres, de ne plus ressentir d'attachement. De ne plus rire autant. Ça m'effraie de compter les jours qui me sépareront enfin de ce monde lourd de quotidien. Je compte. À mesure que le temps passe. Je compte combien de jours, d'années me séparent encore d'un minimum de liberté, de nouvelles expériences et connaissances ... Du moment où j'entrerai enfin dans la féerie de la vie. Et le film continue. Alors que je suis là dans un coin à compter le temps qui passe, un Tic-Tac à la fois, les fous rires éclatent et le mécanisme énorme reprend son court. Le hic avec tout ça, c'est que le mécanisme fonctionne toujours, au même rythme, avec la même facilité malgré que mon engrenage est ralentie et qu'elle tende à s'arrêter. Il continue et je me rend compte que jamais plus, je ne pourrai le réintégrer. La vérité est que j'ai fait une erreur. J'ai fait l'erreur de croire que nier la vérité était la solution pour réintégrer le film, pour être plus que figurante mais ça n'a pas fonctionner. Je me sens encore couler. Tout au fond. Tandis que l'eau s'attaque à chacune des parcelles de mon corps, je regrette de ne pas avoir été assez confiante pour te dire non. Pour afficher mes émotions. Pour agir quand j'en ai eu assez.
Mais je te rassure, le film joue encore, le mécanisme tourne encore et ma tête, elle, songe encore à toutes ses choses sur ma liste que je n'ai pas encore accomplie, toutes ses choses qui me gardent en vie.
