Chapitre 5 {V}

530 50 10
                                    


Un frisson vient faire trembler mon corps, il parcourt mon échine et hérisse mes poils. Je sens sa présence. Sa main contre ma joue. Je sens son doigt cueillir ma tristesse liquide. Je sais que je ne devrais pas le laisser faire ça. Mais putain qu'est ce que j'ai besoin de lui. Son odeur envahi mes narines, un parfum enivrant de cuir et de café brûlé. J'avais besoin qu'il me serre dans ses bras et qu'il m'embrasse, je voulais me nicher au creux de son cou pour m'imprégner de son essence et oublier toutes les atrocités.

Je ravale mes larmes et lève les yeux. Je n'ai pas envie qu'il me voit dans cet état. Les lettres que j'avais effacé sont revenues. Il les a tracées de nouveau à la craie. La même écriture, un peu tremblante, que j'avais déjà vue tant de fois. Elle venait recouvrir la traînée blanchâtre que j'avais laissé un peu avant, prise de colère. Pourquoi est-ce qu'il me faisait ça? Il fallait juste que je l'oublie, que je pense à autre chose. A ma famille. A ma mère. Mais pourquoi ne pouvais-je pas juste penser à moi? A ce que moi je désirais, à ce que je convoitais?

Et en même temps, comment je pouvais l'oublier? Tate était mon premier amour, mon premier amant. J'avais vécu avec lui des choses que l'ont ne vit pas. De la noirceur légère à l'horreur véritable, jamais je ne pourrais mettre des mots sur les sentiments que j'éprouvais pour lui. C'était indescriptible, passant de l'amour inconditionnel à la haine et au dégoût profond. Je ne me serais jamais contentée d'une simple relation banale et vide de toute façon. Tate était spécial. A sa manière certes, mais il était spécial. 

Pourquoi je sentais sa présence aussi fortement? Comment pouvait-il me toucher si je lui avais dit de partir au juste? Pourquoi est-ce que sentais son parfum, son souffle, et ses caresses? 

Je me suis rapprochée du tableau noir, pour effleurer du bout des doigts la craie poussiéreuse. Ma main est calme, et survole les lettres comme pour les écrire à nouveau. Mon corps tremble et je suis obligée de m'appuyer au bureau pour continuer de fixer ces mots.

I love you. I need you. 

Maman ne me pardonnera pas. Je sais que mon père ne le fera pas non plus. Mais doivent-ils vraiment être au courant? Ont-ils besoin de le savoir? Non. Je peux le garder pour moi. Comme avant. Les secrets avaient beau me bouffer ils étaient nécessaires. J'avais besoin de ce secret pour endurer l'éternité. Toute seule c'était trop dur.

Mes yeux se ferment fort et, à nouveau, une larme roule et vient se nicher dans mon cou. Je me tourne doucement et rouvrant les yeux et je le vois. Il est là, devant moi, immobile et muet. 

I'll never say it - ViolateOù les histoires vivent. Découvrez maintenant