Mon père nous déposa devant le campus. Mon lycée ainsi que l'Université de mon frère était cote à cote, seules leurs grandeurs et les grosses lettres qui ornaient chaque entrée des établissements nous permettaient de les différencier. Je suivais ma mère à travers les couloirs à la recherche de la salle des enseignants. Elle avait fait en sort de me convaincre de prévenir mon professeur principal de ma particularité.
Elle m'observa discrètement puis m'encouragea à travers son sourire. Pendant des années, les périodes scolaires étaient un supplice pour moi, elle le savait. Ils avaient fait leur maximum pour qu'on déménage dans un lieu calme où personne ne me connaîtrait et où je me sentirai mieux. Ils ne supportaient plus mes pleures à la sortie des cours, ces injustices qu'on faisait preuve à mon égard, en espérant que cette dernière année de lycée se passera bien.
Nous entrâmes dans une salle où plusieurs adultes se préparaient à recevoir leurs nouvelles classes. Nous nous approchions d'une jeune femme d'une vingtaine d'années, j'aperçus les lèvres de ma mère bouger. La secrétaire fouilla dans les papiers empilés devant elle puis lui montra un homme d'une trentaine d'années que je présumais mon professeur principal. Lorsque nous nous dirigions vers lui, ma mère se présenta et expliqua la situation en me désignant. Je fis un faux sourire sans pour autant savoir la raison.
Je n'aimais pas être dans ces circonstances-là, je ne pouvais pas prendre la parole et relater avec mes propres mots. Je souhaitais être indépendante même si cela n'était pas facile.
Il me regarda bien en face ; il avait dû être informé par ma mère que j'apprenais la lecture labiale.
- Nous allons rejoindre tes camarades dans la classe, d'accord ?
J'acquiesçai en signe de réponse ensuite il me demanda :
- Voudrais-tu que je te présente pour les prévenir que tu es sourde ?
Je secouai la tête puis me ravisai, ce n'était pas de cette manière là que j'allais me faire accepter, de plus, je ne désirais pas qu'on me prenne pour une idiote si l'un d'eux m'adresse la parole. Il serra la main de ma mère et la remercia.
Je précédais mon professeur dans les couloirs remplis d'élèves. Un mal-être se forma au creux de mon ventre, le stresse se faufila en moi tel un prédateur que je dus frotter mes mains moites sur mon pantalon. Lorsque nous arrivâmes devant la salle, il me fit signe d'entrer. Je pris mon courage à deux mains et ignorai la souffrance qui tournoyait dans mon cœur.
Il pénétra à son tour et me présenta à mes camarades. Je louchais sur mes chaussures pour ne pas m'effondrer sous les regards étranges. Mon ventre se tordit en deux lorsque je relevais la tête, ces yeux qui me fixaient tel un animal dans sa cage. Sous la pression, j'oubliai comment respirer. Que faisais-je ici ?
Il me désigna une chaise au fond de la classe, à côté d'une fenêtre. Je m'efforçai d'avancer jusqu'à ce que je sente lebois de mon siège sous la main et je m'assis doucement. Quelques-unsse tournèrent dans ma direction. Mes mains s'agitaient plus nerveusement sous la table, je ne me sentais pas à ma place parmi tout ce monde qui m'entourait comme si j'étais une intruse.
Lors de la pause, un groupe d'élèves vint à ma rencontre. Un garçon aux cheveux bruns se lança en premier :
- Tu es vraiment sourde ?
Mon instinct me soufflait de ne pas leur faire confiance pourtant, ce n'était pas la première fois qu'on me posait ce genre de question. Je répondis par l'affirmative, peut-être que la curiosité les avait piqués. Ceux qui étaient dans mon champ de vision tournèrent leurs visages comme un seul homme vers une personne précise. Je suivis leurs regards, une fille avait dû prendre la parole. Elle me fixa longuement avant de s'exclamer :
- Elle est vraiment sourde !
Tout se brisa en moi, mes attentes se consumèrent parla brise. Mon avenir ici ne serait qu'un cauchemar parmi d'autres, j'allais devoir encore me battre pour ne pas tomber dans l'agonie à cause de ces injuries. Je déchirai une feuille de mon bloc-notes puis écrivis ce que je ne pouvais prononcer avec ma propre voix. Je le lui passai, elle le lut devant son public :
- Je ne peux pas entendre, ni parler mais je peux lire sur les lèvres.
Elle me détailla de nouveau avant de pouffer de rire, les autres se joignirent à elle. La douleur me bloqua la respiration, mes larmes commencèrent à apparaître aux coins de mes yeux. Je pensais qu'ils voulaient sympathiser, je me trompais complètement. Pourtant, ces personnes représentaient le futur pour notre société ; ce n'était que des idiots et des dégénérés. Je lui arrachai le papier et bougeai rageusement mon stylo sur ce dernier. Je le lui tendis.
- Riez autant que vous voulez, sachez que cela vous amènerait rien de bon dans votre vie avec un comportement aussi exemplaire que le votre. Rien n'est drôle pourtant votre sourire est là. Je ne sais pas si avec mes oreilles ce dernier aurait sonné d'une autre manière mais avec mes yeux, ce n'est que de la moquerie qui sort des votre.
Tout était écrit sur ce bout de papier, ce que je ressentais et ce que je voyais. J'aurais souhaité leur raconter ma vie avant d'être sourde, elle était tout aussi intéressante que la leur. Mais, je ne partagerais pas ce lourd secret avec eux, avec des personnes qui ne me comprendraient pas.
Si simplement ils pouvaient subir l'une de mes journées, rien qu'une, où ils ne s'aideraient que de leurs yeux et supporteraient ces minutes interminables de méchanceté. Leurs comportements ne seraient plus le même après cela, ni leurs visions du quotidien.
Je désirais à tout prix rentrer chez moi, lâcher ces larmes qui formait une boule au creux de ma gorge. Je ne pouvais pas pleurer devant eux, s'ils me voyaient dans cet état-là cela leur procura certainement de la joie.
Bonjour tout le monde !
Merci beaucoup pour les votes en si peu de temps ! Je ne pensais pas que cette histoire plairait autant ! Merci beaucoup !
Désolé pour cette partie courte mais j'essayerais de me rattraper avec le prochain chapitre. Surtout, n'hésitez pas à me dire vos ressentis et ce que je peux améliorer !
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Le Monde Silencieux ( En Réécriture )
Fiksi RemajaCette histoire sera mis à jour en fin 2018 suite à la réécriture. Allison termine sa dernière année de lycée dans un nouvel établissement où elle se sent mise de côté. En effet, sa particularité la différencie de ses camarades depuis son accid...