6 [ Escape

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Six - After Everything 2

Ma décision fut rapide. Mes parents m'inscrivirent à un programme d'échange pour que je puisse partir de ce pays infernal. Enfin du moins ils pensaient que c'était là raison pour laquelle. De plus une part de ça était vrai, je ne voulais pas rester dans cette maison, dans ce collège où j'avais vécu tant de chose, rencontré tant de gens. J'avais réellement essayé d'y retourner, sincèrement, je m'étais levée, j'avais pris le bus, et je pensais que je pourrais faire comme si rien ne s'était passé. Une fois devant le bâtiment, toutes mes résolutions s'étaient envolées. J'étais restée debout devant mon lycée, les bras le long de mon corps à le fixer. Je venais de rater trente-cinq minutes de mon cours. Tous les endroit me ramenèrent des souvenirs que je ne voulais pas voir là maintenant. Je pensais qu'en me rappelant je sourirais à ces bons moments, mais ça ne faisait qu'appuyer sur le trou béant au milieu de mes intestins. Il se creusait de plus en plus à chacun de mes pas, me rendant folle. Une fois assise à ma place, je n'étais plus qu'un fantôme. Mes amis étaient heureuses de me voir, la plupart se levèrent même pour m'encercler de leurs bras, criant à qui voulait bien l'entendre que je leur avais manqué. Le plus dur fut quand les seules paroles que j'entendais devenir "mes condoléances" "je suis navré"  "désolé pour toi, il t'aimait". Toute la classe y était passé. Je gardais le regard dans la vague ne voulant pas perdre pieds plus que déjà.

A la récréation je n'avais plus aucune certitude sur cette journée. J'aurais aimé passer une journée monotone, où rien ne serait arrivé de spéciale, où je me serais juste ennuyé. Mais là, enfermée dans les toilettes, mon poing frappant le mur en carrelage de la paroi, je n'arrivais plus à rien, et j'avais bien peur que ça reste ainsi jusqu'à la fin de mes jours. Quand enfin les larmes coulèrent, ce qui n'était pas arrivé depuis bientôt 2 semaines, je me sentis presque soulagée. Je n'arrivais peut-être plus à respirer, ni à bouger mes doigts bleus, endoloris par les coups, mais je me sentais bien. Du moins aussi bien que me le permettait les circonstances. C'était d'habitude Riggs qui me calmait pour m'empêcher de tabasser des murs, il me prenait dans mes bras et me soulevait du sol pour que je ne puisse pas m'enfuir. Et une fois calmée, quand je n'avais plus la force de me débattre, il me reposait et je me laissais tomber contre son corps. La cuvette des toilettes était mon seul allié dans l'histoire. Et je me devais de me battre. Pour moi autant que pour lui. Je ne voulais pas de cette vie sans lui, mais il ne la voulait pas plus pour moi, et aucun de nous deux ni pouvait rien. Je ne vais pas dire que je n'ai pas pensé au suicide. Les nuits où les voix étaient plus forte, où mon cœur explosait une énième fois, je me demandais si ce n'est pas la solution la plus simple. Plus de douleur, et je le retrouverais. Mais je me demandai ce qu'il penserait si il me voyait arrivé. C'est la douleur que je ressentais dans ma main qui me faisait du bien. Elle me détournait de  la violente douleur qui somnolait en moi.

J'avais passé la fin de journée et la journée suivante comme ça. M'éclipsant à chaque occasion. Et j'essayais d'être celle que j'étais, je tentais de sourire, de garder la tête haute, de faire des blagues et de balancer des horreurs comme la fille pourrie-gâtée que j'étais. Mais personne ne me voyait comme tel. J'étais la fille amoureuse qui avait perdue la raison pour laquelle elle se battait, j'étais celle qui n'était pas foutu de garder une relation. Quand je revu Samuel, l'ami le plus proche de Riggs, comme un frère pour moi, je savais que je n'avais pas besoin de parler. Il avait surement été aussi détruit que moi, mais savait mieux gérer ses émotions. Je m'étais alors dirigée vers lui, d'abord en marchant, puis l'envie pressante de le sentir près de moi, en courant. Je l'encercla de mes bras et il fit de même. On s'écarta de sa bande d'amis, sans se décoller l'un de l'autre. Il ressentait ce que je ressentais, tout s'était toujours passé ainsi. Il me murmura un "désolé" presque inaudible, et ce n'était pas la même chose que celui des gens de ma classe. Ce désolé était sincère, presque émouvant. On s'était échangé quelques messages banals, des textos où on se rassurait mutuellement, où je prenais de ses nouvelles. Il savait que je partais, il ne savait juste pas qu'elles étaient mes réelles motivations.

J'avais tout trouvé sur River, j'avais choisi le lycée où il étudiait, la ville où il habitait, je m'étais renseignée sur ses endroits préférés, ses fréquentations, je savais absolument tout. La chance m'avait sourie en m'envoyant dans la famille d'accueil d'un de ses meilleurs amis. J'étais prête. Je voulais partir, tout laisser derrière moi, je n'attendais que ça.

Not another love storyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant