"L'amour est d'autant plus probable qu'il paraît impossible." Jules Sandeau

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Cela faisait plus de deux semaines que la belle Olympe était alitée. Ronan, Katherine et Emile étaient désemparés devant l'état de la jeune femme. Ils étaient impuissants face aux nombreuses blessures qui jonchaient son maigre corps. De nombreuses coupures en voie de guérison parsemaient son visage pâle dues au choc de l'explosion. Elle s'était abîmée une cheville et quelques côtes en se faisant piétinée par la foule.

L'Etat comateux dans lequel elle se trouvait inquiétait les médecins. Il n'y avait rien à faire. Elle devait simplement trouver la force et l'envie de se réveiller. Pourquoi se réveillerait-elle pensait le vieil Emile, le mariage qu'il avait arrangé avec Peyrolles pouvait être l'une des raisons qui la poussait à rester endormie. L'idée de perdre son unique enfant était inconcevable pour lui.

Même Peyrolles s'était rendu au chevet de la jeune fille lorsqu'il avait appris son mal-être. Ronan eût été obligé de sortir de la maison pour ne pas qu'il le reconnaisse. Il avait eu le sentiment d'abandonner la jeune femme aux griffes d'un dangereux prédateur. Ces heures qu'il avait passé loin d'Olympe n'avaient été que torture pour lui. En effet, il veillait sur elle nuit et jour, lui racontant des anecdotes, lui appliquant des onguents et des baumes sur ses coupures et sa cheville. Katherine s'occupait de faire les pansements pour ses côtes, par pudeur et par égard. En ces moments-là, Ronan n'avait qu'une envie, retourner dans la chambre et prendre la magnifique noble entre ses bras. Elle était tout pour lui. Peu lui importait les disputes et les mots durs qu'elle avait employé à son égard. Il lui avait pardonné dès qu'il l'avait aperçu dans cette auberge. Il était fou amoureux d'elle et la voir dans cet état lui broyait le cœur. Il n'avait plus la force de continuer sa révolution. Cette dernière avait failli tuer son amour. Comment pouvait-il continuer dans de telles circonstances ?

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Elle sentait sa présence, elle voulait ouvrir les yeux pour revoir son visage et le serrer fort contre elle. Olympe savait qu'il était resté à ses côtés tout ce temps qu'elle avait dormi. Elle pouvait humer son odeur et entendre sa voix lui dicter des anecdotes. Elle pouvait sentir ses mains rugueuses se balader sur son visage lorsqu'il soignait ses blessures. Elle pouvait savourer la douceur de ses lèvres contre les siennes quand elle les devinait seuls dans la chambre.

Doucement, elle décida d'ouvrir ses lourdes paupières. Elle crut qu'on lui brûlait les yeux lorsque la lumière du jour rencontra sa rétine. C'était une torture. Puis, un énorme sifflement lui martelait le crâne et les oreilles. Elle n'entendait pas ce que les ombres qui tournaient autour d'elle lui murmuraient. Lentement, sa vue s'éclaircissait et tout lui revint en mémoire, l'émeute de la bastille, Ronan, le boulet de canon, la fraîcheur du sol boueux, les parisiens la piétinant, ses os qui se brisaient sous leurs pas, la douleur, Emile et Ronan la suppliant de ne pas s'endormir, puis, le néant. La douleur s'était arrêtée. La panique avait cessé, tout était calme, paisible tel un rêve.

Quand sa vision et son ouïe revinrent à la normale, Olympe remarqua que les ombres étaient humaines. Il s'agissait en fait de Ronan, Emile et Katherine qui la contemplaient comme une bête de foire. La joie de voir leur protégée en vie pouvait se lire sur leur visage. Elle était avec eux, elle allait bien. L'avenir promettait d'être moins brumeux qu'il n'y paraissait.

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Plus les jours passaient, plus Ronan était aux petits soins pour la jeune femme. Ils voulaient passer ensemble le plus de temps possible avant que l'heure d'Olympe ne sonne. En effet, d'un jour à l'autre Lazare pouvait débarquer et crier au monde entier qu'elle était sienne. Cette peur de l'avenir rongeait Olympe, si bien qu'elle avait pris une décision. L'homme qu'elle aimait était à ses côtés, toujours là à prendre soin d'elle, à courir aux devant de ses désirs. Elle savait que ce n'était qu'une question de temps. Elle pouvait changer son destin, Ronan pouvait devenir sien. Quand le jeune domestique pénétra dans la chambre, c'était une Olympe pleine de vie avec un sourire collé sur le visage qu'il trouva.

Le caveau d'une roseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant