Chapitre 20 : L'accident

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Je cours, les pins défilent, je cours, les ronces me griffent,  je trébuche, je me relève. Je pleure, mes joues sont trempées, j'ai mal au crâne, les jambes en compote et je ne vois rien.
Je déteste les sentiments, je déteste l'amour, la séduction, les relations, les gens, la vie, le monde. J'aurais mieux fait de sauter ce jour là.
Je suis perdue maintenant. Mes jambes cèdent et je m'écroule. Il fait froid mais la colère me brûle, ils sont tous pareils.
Je ferme les yeux et me concentre sur les bruits de la forêt. Les chants des oiseaux nocturnes, le vent qui s'engouffre dans les feuilles, ma respiration saccadée, les branches qui craquent, des animaux au loin, mon prénom.
Jake apparaît une deuxième fois en hurlant mon prénom. Lorsqu'il me voit, à genoux, le visage inondé, une expression de douleur se lit sur son visage et il s'immobilise.

-Tu ne veux pas que je m'approche.

Je secoue la tête négativement, je n'ai pas la force, ni l'envie de m'énerver encore une fois.

-Je peux t'expliquer pourquoi j'ai donné ce numéro à Cassie ?

Rien que son nom me vrille les tympans. Je secoue la tête négativement encore une fois.

-Je lui ai donné parce que. .

-Non!

Je me relève le plus vite possible et me remets à courir.
Je dévale une pente sans faire attention aux branches, sans voir ce qu'il y a devant. Je veux juste fuir les bruits de pas qui se rapprochent trop rapidement. Je saute pour dépasser un tronc couché qui me barre la route. Lorsque j'atteris, le choc me remonte dans les jambes qui flanchent sous mon poids. Un cri de surprise m'échappe et je me relève encore une fois quand je sens une main sur mon bras. Il m'a rattrapé. Je me retourne, tire sur mon bras, le pousse, le frappe pour qu'il me laisse m'enfuir. Une vague de force me submerge et je tire une dernière fois. Sa prise cède sur mon poignet fin et il perd tout contact avec moi. Je remets mes muscles en action et m'élance le plus loin possible. Mes pieds qui, normalement s'ancrent dans le sol mou pour me propulser, se retrouvent soudain sans support et je sens mon corps basculer en avant, sous l'effet de la gravité. Je sens le souffle de la chute m'aspirer et je ferme les yeux, prête à encaisser les coups.

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-Anaya? Anaya,tu m'entends? Ouvre les yeux. Anaya?

J'ouvre doucement les paupières, ma vision est floue, tourbillonnante. J'entends mon nom comme si on m'appelait alors que j'étais dans une boîte  de conserve. Ça résonne.
Je bas une fois, deux fois des paupières et recouvre une vision à peu près nette. Je suis allongée et mon dos repose sur le genou de Jake qui me surplomb, inquiet. Je me redresse et remarque la pente que je viens de dévaler. Je ne vois même pas le haut dans toute cette obscurité.

Je reporte mon attention sur Jake qui n'a toujours rien dit. J'ai les jambes toutes amochées,  rien de grave, des égratignures mais rouge vif dont le moindre mouvement, le moindre frottement me fait souffrir.

Quelques légères entailles sur les cuisses et sûrement des bleus sur les bras protégés par mon pull.
Je touche mon visage et sens un liquide poisseux sous mes doigts. J'ai du m'ouvrir le crâne ou me blesser au visage... génial.
Je soupire un grand coup, ramenant Jake à la réalité.

-Ne bouge pas, je vais te porter jusqu'à la voiture. Et laisse toi faire...  S'il te plaît.

Je ne dis rien et le laisse passer ses bras sous mes genoux et dans mon dos. Je glisse un bras sur sa nuque pour mieux me tenir et il nous ramène vers le parking. La traversée des bois se fait dans le silence. J'entends juste sa respiration, à peine accélérée par l'effort physique qu'il accomplit en me portant.
Je finis par pousser ma tête contre son épaule et me laisser bercer par les battements de son coeur.

The birth of a loveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant