Chapitre Huit.

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Posté le 14/07/2017.

"Donc, je m'appelle Thomas et j'ai seize ans. Sinon ... ravi de te rencontrer ?"

Je rigole face à sa gêne, on dirait qu'il n'est pas vraiment doué avec les présentations. D'ailleurs, il choisit la fuite.

"Lisa, seize ans aussi et enchanté de même !

-Maman, je monte, je vais réviser un peu.

-Je t'appelle quand le diner sera prêt.

-Merci."

Il monte les escaliers et quelques minutes après, je fais pareil. Je rentre dans la chambre vide et ouvre mes cartons. C'est étrange. En regardant mes affaires je ne ressens rien. Pas de nostalgie, de joie, de tristesse, rien. Le néant. J'étais pressée de quitter la maison mais au final, je ne sais pas quoi penser. Je crois que j'ai du mal à réaliser que je n'irai plus jamais chez moi. Je laisse mes cartons en plan et soupire. À ce moment-ci, quelqu'un toque et ouvre la porte. Je me retourne et découvre Thomas qui me sourit maladroitement.

"Hey. C'était pour te dire que si avait besoin d'aide ou de quoique se soit, je suis là ! Je sais que ça peut paraître bizarre de changer de famille, mais on est là et ce n'est pas pour rien.

-Merci, vraiment.

-Il n'y a pas de quoi, c'est normal."

Il sort de la pièce en refermant la porte et je suppose qu'il retourne réviser. Je m'allonge sur le lit et je regarde le ciel à travers le velux. Je pourrais peut-être aller sur le toit si j'ai une échelle ? Je demanderais. Lorsque Sandrine dit que le dîner est prêt, je vais m'asseoir dans le salon comme elle l'a demandé. Fabien apporte le plat : des pâtes à la bolognaise.

"Bon, comme s'est passé votre journée ?" demande-t-il.

Je plonge ma cuillère dans les pâtes et m'intéresse fortement à leur aspect. Qui aurai crû que des pâtes puissent être si belles ?

"Ça va, c'est un peu la course parce que le bac c'est dans quatre semaine mais sinon ça va. Dit Thomas.

-Ah tu es en première ? demandais-je d'une voix toute timide.

-Oui, pas toi ?

-Non, je suis en seconde.

-Profite, l'année prochaine ça va changer... me répond-il, d'un air lointain.

-Je sais enfin, je m'en doute plutôt !"

Je prends quelques bouchées du plat et Sandrine reprend la conversation.

"Et toi, Lisa, ta journée ?"

Ma tentative de changer la conversation n'a pas marché. Dommage ...

"J'ai connu mieux on va dire ? Ouais c'est ça, j'ai connu mieux.

-Qu'est-ce qu'il s'est passé ? demande poliment Thomas.

-On va dire que le lycée -comme le collège- est un endroit vicieux où on cherche à avoir pleins de potins sur tout le monde et qu'à force, cela repend pleins de rumeurs.

-Je connais oui, n'y pense pas. Tu sais qui tu es et je sûr que tes amis aussi, c'est ce qu'il faut retenir."

J'ai comme l'impression qu'il a déjà vécu ça. Ce n'est pas trop difficile en même temps. On a tous des secrets que nous ne voulons pas révéler. Seulement, certains pensent des choses et en parlent alors que ce n'est absolument pas cela. Il faut dire que nous ne sommes pas très intelligents en groupe, malheureusement. À la fin du repas, je débarrasse et j'apprends que demain nous allons en ville pour prendre ce dont j'ai besoin.

Une fois sur mon lit, lavée et en pyjama -gentiment prêté-, je programme mon réveil pour neuf heures histoire d'être prête pour dix. Je ne baisse pas le store et je regarde à travers la fenêtre. Mon regard se perd et à vrai dire, je ne sais pas ce que le regarde. J'ai mon journal ouvert sur moi mais en réalité, je ne sais pas quoi écrire.

Bon. Ma vie s'est légèrement compliquée je dirais ? Maman est en cure de désintox' et moi dans une famille d'accueil. Ils sont vraiment gentils. Une famille de rêve en somme. Ce n'est que mon premier jour ici donc je ne peux pas juger mais au fond de moi, je sais qu'eux ne me feront pas de mal. Ce qui m'attriste, c'est de savoir que je n'aurai jamais ma place ici. Nous ne venons pas du même monde : je viens d'un milieu plutôt pauvre et eux, d'un milieu plutôt aisé. Je pense que je verrai bien comment nos relations évolueront. Après tout, seul le temps pourra m'éclairer là-dessus.

Je prends mon téléphone et cherche un contact récent pour lui poser une question.

[À Mike, 21h57 :
Bonsoir, il me semblait que vous aviez besoin de mon journal mais nous n'en avons pas reparler depuis. Est-ce toujours le cas ?]

C'est vrai en plus, il m'avait dit qu'il le prendrait.

Je me remets à fixer le ciel mais au final, je regarde le vide. Je n'entends plus rien et je sombre dans la noirceur du sommeil.

Le lendemain, je me réveille en sursaut en entendant la sonnerie de mon téléphone. Il faut vraiment que je change de musique, elle est trop brutale pour un réveil. Remarque, c'est ça ou je ne me lève pas. La lumière du soleil m'aveugle et je mets un temps avant de me rappeler où je suis. Chez ma nouvelle famille. Je descends les escaliers les yeux à moitié fermés et j'arrive dans la cuisine.

"Bonjour...

-Et ben, toi, tu n'es pas du matin ! rigole Fabien.

-Hum...

-Bien dormi ?

-Oui, merci et vous ?

-Franchement, Lisa, tu peux me tutoyer. Et oui merci, j'ai bien dormi."

Comment fait-il pour être au taquet dès le matin ? Thomas arrive à son tour et son état est pire que le mien.

"Vous faites la paire vous deux !" s'exclame Sandrine en arrivant, déjà lavée, habillée et coiffée.

Je me prends un verre de jus d'orange histoire de m'apporter des vitamines et du pain.

"Tu ne prends que cela ? Tu sais il y a des céréales et du lait et même du café et des biscottes et...

-Sandrine, merci mais, ça ira. Je n'ai pas trop fait le matin de toute manière.

-D'accord."

Là-dessus elle sort de la cuisine pour préparer les affaires. Thomas à la tête dans son bol de lait et il gémit quand sa mère lui demande d'être prêt dans vingt minutes. Après mon court petit déjeuner, je pars m'habiller et une fois prête, je rejoins tout le monde dans le salon. Mon téléphone et je le consulte une fois installée dans la voiture.

[De Mike, 10h03 :
Bonjour ! Finalement non, nous n'avons pas eu besoin de ton journal. Tant mieux dans un sens. J'espère que cela se passe bien avec ta famille, bonne journée.]

"On commence par quoi ? Les meubles parce que ça prend de la place et après les vêtements et autre ? demande Fabien.

-Ça me parait être une bonne idée. En route !"

Fugue, Fudge Et Famille D'accueil.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant