1- Quand les esprits se rencontrent

1.7K 93 8
                                    

Ca s'était passé une nuit comme toutes les autres. Le doux éclat de la lune reflétait ses rayons argentés sur la terre endormie, teintant chaque entité d'une étrange lueur violacée. Tout était calme, le bruissement du vent à peine audible dans les feuillages. Un nuage égaré passait parfois devant l'astre lumineux, plongeant momentanément le paysage dans une obscurité malsaine, ou chaque ombre se tordait en un être effrayant. 

C'est par cette nuit que le grand seigneur démon END se décida à sortir de son entre.

Il avait passé trop de temps à l'intérieur du manoir des démons, avait trop longtemps supporté les geignements insupportables et les odeurs pestilentielles de ses subordonnés. Étaient-ils vraiment de la même espèce que lui, ces petites boules puantes et insignifiantes ? Il faudrait qu'il parle à son frère de ce problème olfactif au plus vite ; ça ne pouvait plus durer.

Soupirant, les mains dans les poches de son épais manteau rouge sombre, il donna un coup de pied rageur dans les graviers en les dispersant devant lui. Le crissement de ses bottes sur le sol caillouteux fut le seul son audible dans cet endroit calme et paisible pour un moment, jusqu'à ce qu'il quitte le sentier, agacé également par ce tapage auditif. Il marmonna d'incompréhensibles pensées pendant de longs instants, incapable de laisser éclater sa rage sans troubler la quiétude de la forêt.

Sans le remarquer, ses pas le menèrent à la frontière du monde des démons.

Ce n'était pas une frontière à proprement parler. Il n'y avait ni mur, ni clôture pour déterminer si nos pas foulaient là le sol des démons ou des humains. Mais cette séparation était bien inutile tant les deux territoires se démarquaient l'un de l'autre.

La nuit, rien ne pouvaient les différencier, mais une fois le jour venu, la différence était immanquable. Quand le jour se levait, alors que le monde des humains s'égayait joyeusement à la lueur du soleil, la terre des démons restait plongée dans une obscurité étouffante.

Cette différence avait causé bien des conflits entre les deux peuples. Elle était à l'origine de la jalousie tenace des démons envers les humains. Leurs coeurs déjà sombres s'aigrissaient d'autant plus dans cette noirceur constante que leur procurait leur monde.

END ne s'était jamais vraiment soucié du soleil. Il le trouvait beau, oui, comme n'importe quel être adulait la lumière, mais jamais il ne lui était venu à l'esprit de dérober l'astre pour pouvoir seul en profiter. Il n'était pas comme ces démons répugnants au quotient intellectuel inexistant. Il était leur prince, END, il se devait d'être au dessus de ces bassesses et de contrôler ses instincts primaires.

Plongé dans ses réflexions, le prince démon sursauta presque lorsque le son d'un tambourin lui fit dresser l'oreille.

C'était un battement faible et régulier, semblable à un battement de coeur accompagné de clochettes.

Piqué par la curiosité, END dévia de son cap et s'approcha du son.

Une senteur printanière parvint jusqu'à lui, une odeur qui lui était inconnue et qui ne lui apportait qu'une curiosité plus insatiable à chaque instant. D'où provenait ce son ?  Accélérant la cadence, ne se fiant qu'à son ouïe surdéveloppée, le démon slaloma entre les arbres avec agilité. Il était devenu comme un chasseur, à la recherche de sa proie. Un mouvement ? Un son ? Elle était perdue. Le prédateur la trouverait en un instant. Soudain le vent souffla plus fort, comme un avertissement. La frontière lui apparut.

Et elle aussi.

Le démon s'arrêta net dans sa course, comme cloué au sol par une magie mystérieuse. Son souffle ralentit, ses pupilles se dilatèrent. Il faisait nuit au royaume des humains, mais une lumière y brillait comme en plein jour.

La Danse des Étoiles Où les histoires vivent. Découvrez maintenant