Chapitre 6 : Message

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Chapitre 6

Alizée sentit soudain que quelque chose la brûlait à travers le tissu soyeux de son pyjama et attrapa sa rose d'obsidienne, qu'elle arracha des tréfonds de sa poche pour la tenir au creux de sa main.

À la lueur tremblottante d'une torche, elle lisait un gros volume dans le dortoir des filles. N'arrivant pas à dormir, elle n'avait pu s'empêcher d'aller faire un tour par la bibliothèque déserte pour y chiper quelques livres et manuels divers et variés. Autour d'elle, elle n'entendait que les respirations régulières de ses camarades ; Kathy était roulée en boule sous les couvertures, Annie emmitouflée dans un tas de peluches soyeuses, et Gwendolyn lui tournant le dos dans son lit.

À deux heures du matin, pourquoi Karl l'aurait-il appelée ?

Levant sa torche, elle lut le message gravé dans la pierre. Un seul mot.

Étincelle ?

Elle s'empressa de coller la rose contre ses lèvres.

Oui ! Felix Felicis ? Tout va bien ?

Il y eut un long moment de silence durant lequel aucune réponse ne fusa, puis :

Euuuh... Ahem. Mais oui. Tout va bien. Et toi ?

L'avantage avec la rose, c'était qu'elle enregistrait toute la phrase, dont les hésitations, et c'est Euuuh l'intriguait au plus haut point.

OK, sincèrement. Que ce passe-t-il ?

Mais rien...

Tu m'interpelles au beau milieu de la nuit et tu hésites quand je te demande si ça va. Sérieusement, Karl. Que s'est-il passé ? Tu vas bien ?

Moi, oui. C'est toi.

Moi ?

Elle ne comprit pas immédiatement. Elle allait très bien, mis à part sa dispute avec Gwendolyn et la tristesse d'Annie et Albe. Bon, d'accord, elle n'allait pas si bien que ça, mais ce n'était pas dramatique. Une seule solution lui vint, qu'elle s'empressa de murmurer contre la roche ;

C'est Royle ?

Oui et non. Écoute, je préfère tout t'expliquer de vive voix, mais ne vas pas chez toi pour les vacances. Surtout pas. Tu peux venir chez moi si tu veux. Et méfie-toi de tout le monde.

Pourquoi ?

Il y a des traîtres partout.

Ça, elle le savait. Elle l'avait découvert à ses dépends, certes, pas dans la véritable guerre des sorciers, mais tout simplement avec la traîtrise de Gwendolyn, qu'elle croyait être son amie et qui complotait à présent dans son dos avec Ruth, sa pire ennemie. Enfin... à ce stade, elle ne savait plus trop. À part Royle, bien sûr, qui détestait-elle le plus ? Ruth ou Gwendolyn ? Cette dernière avait été son amie, mais cela ne rendait-il pas le choc plus violent encore ?

Je sais, se contenta-t-elle de chuchoter.

- Je le sais aussi.

Elle se retourna brutalement, surprise, sur le qui-vive, se retrouvant nez-à-nez avec celle qu'elle avait le moins envie de voir au monde. Les cheveux ébouriffés, en pyjama et sans lunettes, Gwendolyn parvenait malgré tout à garder l'air digne. Alizée tira sa baguette (qu'elle ne quittait plus depuis les révélations d'Alithéa sur les dangers qu'elle courait, deux semaines plus tôt) de sa poche.

- Tiens, c'est marrant, glissa-t-elle. Je pensais justement à toi.

- Tu me considères comme une traîtresse ? fit agressivement la jeune fille.

Au Gré des Vents / 3- l'AlbeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant