"Kylion est mort. Tandis que Shaïly est son petit frère ne se remettent pas de ce fait, le garçon aux yeux jaunes décide de quitter le groupe mais c'est sans compter sur son amie qui le retient. Il décide de lui raconter son passé."
- J'ai été retrouvé sur le bord d'une route. Commença-t-il. On m'a dit que j'étais simplement enveloppé dans un drap. Avant, à l'époque où je n'étais qu'un bambin, c'était une autre femme qui tenait l'auberge où nous nous étions rendu. C'est elle qui m'a recueilli. Elle savait qu'elle n'avait pas le droit de le faire car je portais la marque ; malgré tout, elle a franchi l'interdiction. C'est cette femme qui a élevé ma petite enfance. Je n'ai jamais connu son nom, elle n'a jamais connu le mien – puisque je n'en avais pas – et ça allait, ainsi. Je me souviens, encore, de cette tarte qu'elle me préparait lorsque j'avais été sage... J'étais un enfant paranormal, perturbé, violent, sauvage, bestial, mais elle ne m'a pas abandonné. Elle s'est accrochée à moi et j'ai su contenir ma fureur... Je lui avais fait la promesse de la contenir. Mais un jour, ils sont venus, des gendarmes, venant rafler les tatoués qui leur auraient échappé. Elle m'a pris dans ses bras et m'a dit : « Cours, cours loin, et cache-toi ! » mais je ne voulais pas la lâcher alors elle m'a giflé, c'était la première fois qu'elle levait la main sur moi. J'ai alors couru, comme elle l'avait ordonné. J'ai entendu des coups de feu et je me suis retourné. Une balle dans le crâne, elle s'était effondrée.
Il leva la tête vers le ciel, laissant les souvenirs le submerger. La jeune fille, quant-à-elle, fondait déjà en larmes, trempant le sol d'eau salée et ses vêtements de boue noire.
- Je devais avoir sept ans, tout au plus, et je ne me doutais même pas d'avoir autant de force pour courir. Je suis monté dans la réserve d'une vieille usine, dont je connaissais l'existence pour y avoir joué, plus jeune. J'ai grimpé jusqu'au dernier étage de cette réserve. Le toit était mansardé et le bois si usé que les pucerons lui dévoraient les entrailles. J'avais peur, non, j'étais terrifié à l'idée qu'on me trouve ; je ne pouvais penser à rien d'autre, même pas au fait que ma tutrice... venait de mourir sous mes yeux. J'ai fermé la porte, tellement fort que les tremblements de celle-ci ont fait chuter les lattes du plafond. Je me retrouvais enfermé : confiné entre une charpente improvisée et un mur en mansarde. Il y avait des cadavres de rats ci et là... Tout était si noir et si étroit... J-Je ne pourrai jamais oublier cet endroit.
Ses poings se serrèrent et ses paupières appuyèrent contre ses joues. Il prit une grande respiration puis continua son récit :
- Je savais qu'il y avait une fenêtre, derrière moi, seulement, je ne pouvais pas l'atteindre à cause du bois me barrant la route. I-Il y avait cet oiseau... et tout était si étroit ! Cet oiseau chantait sans cesse, du matin au soir ; d'une certaine façon, ça ne me dérangeait pas, c'était moins bruyant que le silence... Pour survivre, je mangeais les œufs de cet oiseau. C'était horrible, parfois, il y avait du sang d'oisillon à l'intérieur, mais comme je mourais de faim, je les mangeais tout de même ; des insectes aussi, je dévorais même des insectes, il y en avait pleins et...
Il souffla, le cœur lourd, sa voix s'éteignait au fond de sa gorge, comme s'il craignait d'être puni pour ce qu'il avait osé raconter.
- Bref, en toute sincérité, c'est la pire époque de ma vie : mes mains étaient recouvertes d'échardes et je ne pouvais boire que grâce à la toiture qui fuyait et... Bon D. ! Je ne sais même pas ce qu'il y avait dans cette eau ! Tout était si étroit... semblait se rapprocher... Un jour, l'oiseau s'est arrêté de chanter et j'ai senti quelque chose de chaud me frôler la jambe : une balle de plomb ; l'oiseau était mort. Alors mon sang n'a fait qu'un tour car les seules personnes possédant des armes étaient des gendarmes ou des militaires. Je tentai, de toutes mes forces, d'exploser le sol sous mes pieds. Alors, sous l'effet d'une peur incontrôlable, pour la première fois, je me transformai. Mes griffes arrachèrent le plancher et une sorte de poussière de craies sortit de celui-ci. Je m'extirpai de cet enfer en y laissant mes poils blanchâtres. Redevenu garçon, je courrai dans les rues pour échapper au danger. J'étais conscient qu'ils m'avaient entendu et qu'ils me suivaient. À un tournant, des doigts s'accrochèrent à moi et j'eus cru à ma fin, lorsque je me retournai, et aperçus deux femmes en corset et décolleté, sans bas. Elles me firent signe de me taire et me cachèrent dans une ruelle, le temps que les gendarmes décampent.
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Le Dogme
Paranormal« "Le Dogme" avait le pouvoir, il était tout puissant. » Shaïly a seize ans lorsqu'elle enfreint "Le Dogme", le livre sacré conférant toutes ses maximes à son village. À partir de là, toute sa vie bascule. Reniée, contrainte à l'exile, elle va se d...