Chapitre 27

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J'ai raccompagné Liu là ou il a élu domicile. Une petite cabane à outils située au fond d'un champs. En réalité, en peu de temps, il a réussi à rendre l'endroit presque convivial. Il s'est installé un petit matelas au sol, sur lequel il dort, lorsqu'il en a l'occasion, et se nourrit généralement de baies ou de ses propres provisions qu'il a récolté dans le frigidaire de ses parents. Pour ce qui est du reste, il m'a avoué ne pas réellement se rendre au supermarché ou à l'épicerie de manière très régulière, de peur d'être reconnu. 

- Par les temps qui courent, m'avait il dit, il vaut mieux que je demeure caché. Si quelqu'un me reconnaissait, il contacterait sûrement les services sociaux et on me placerait en foyer. Mais c'est hors de question. 

J'avais hoché la tête. C'est un raisonnement logique. Aussi je lui avais promis d'aller lui faire quelques courses au plus vite. 

Alors que je me dirige vers la maison d'Ingrid, mon portable vibre, et la tête de mon père apparait dessus. Papa... Lui et maman doivent être morts d'inquiétude, et je m'en veux dans un sens de leur infliger tout cela involontairement. Peut être ont ils déjà envisagé la possibilité de ma présence ici, et bientôt, toutes les polices locales seront sur mes traces. Je dois à tout pris éviter ça. 

Alors, le coeur battant, et les doigts tremblotants, j'écris un message, qui j'espère, noiera tous soupçons. 

A: Papa

Je vais bien. Ne vous en faites pas. J'ai besoin de réfléchir, ne vous inquiétez pas pour moi. Je reviens bientôt. 

Kaya. 

Les yeux humides, j'appuie sur envoyer et éteins mon portable. Papa... Maman... Rose... Vous me manquez. Tous. Je reviens bientôt. C'est promis. Et cette fois-ci, je reviendrai avec des réponses.

Je poursuis mon chemin vers la maison des Elton, mais lorsque j'arrive au bout de la rue, je constate à ma plus grande surprise que plusieurs voitures sont garées devant leur domicile. J'ai failli oublier ! C'est bientôt l'anniversaire de Carole ! Si ce n'est aujourd'hui... Je ne peux pas risquer d'entrer dans une maison pleine d'invités... Ce ne serait pas rendre service à Ingrid, ni à moi d'ailleurs. 

Alors, les mains dans les poches, je tourne les talons, m'enfonçant dans l'obscurité de la nuit tombante. Une seule solution, Liu. J'espère qu'il acceptera de m'héberger pour la nuit. Apres tout, je ne devrais pas prendre trop de place, non ?  

Je ne tarde pas à regagner sa maisonnette. La lumière y est tamisée, à ce que je vois depuis la fenêtre. Il doit sans doute agir ainsi pour ne pas se faire repérer. Enfin, bref. 

Je toque à la porte, et peux presque m'imaginer mon ami sursauter à l'intérieur. Comme je m'y attendais, la lumière s'éteint presque instantanément. La scène serait presque comique, dans une autre situation.

- C'est moi, Liu, je chuchote. 

- Kaya ? Réponds t'il dans un murmure. 

Je perçois du bruit depuis l'intérieur, et bientôt, la porte de déverrouille, et apparait sur le seuil un Liu emmitouflé dans une couverture brune, un râteau à la main. Je ne peux m'empêcher de pouffer. 

- Un râteau ? Sérieusement...

Il rougit et repose son arme, m'invitant à entrer. 

- On fait avec les moyens du bord, bougonne t'il en refermant derrière moi, après avoir prit soin de s'assurer que je n'étais pas suivie. 

- Dis moi, qu'est ce que tu fais là ? Je pensais que tu dormais chez Ingrid, ce soir ? 

J'hausse les épaules. 

- C'est l'anniversaire de sa mère, et, comme chaque année, il ont du lui organiser une fête "surprise". 

Il fronce les sourcils.

- Si elle a lieu chaque année, c'est pas trop une fête surprise non ..? 

- Non, c'est bien pour ça que j'aurais voulu apostropher ce mot. Enfin, bref. Voila, si ça te déranges pas que je passe la nuit ici...

- Pas du tout, t'inquiètes pas. En revanche heu... J'ai pas de deuxième matelas. 

- C'est pas grave, je réponds tranquillement. Je vais dormir au sol, ça ne me dérange pas. 

- Mais non, objecte Liu. Hors de question. Prends le matelas, je me contenterais de mettre une couverture par terre. Ca ne me dérange pas, je te dis. 

Je me mord la lèvre. Si il insiste... 

Je m'installe sur le matelas tandis que lui se confectionne une sorte de lit au sol. Il fait pitié, quand même, avec ses quelques couvertures... 

- Liu, j'insiste. On peut dormir tête bêche, c'est bon.

- Kaya, réponds t'il sur le même ton, je te dis que ça va. Dors. 

Je suis impressionnée par sa maturité nouvelle. Bien qu'il ait fondu en larmes tout à l'heure, ce qui est d'ailleurs tout à fait justifié au vu des circonstances, il parait bien plus mûr qu'avant. Ces longs mois seul lui ont forgé une toute nouvelle maturité. Il n'est plus le petit garçon d'autrefois. 

Je me calle dans les oreillers et tente de ne pas faire attention à mon estomac grondant. Je n'ai pratiquement rien avalé de la journée, si ce n'est une pomme, tout à l'heure, trouvée par hasard dans une corbeille de fruit chez les Elton, avant de m'éclipser.

Je ne tarde pas à m'endormir, bercée par la douce lumière du clair de lune, pénétrant dans la pièce par une petite lucarne.

Destiny - Jeff the KillerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant