M. Conan

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Je m'appelle Christian Conan et je suis commissaire de police.

Un soir du mois de décembre, nous avons reçu un coup de file d'un jeune homme ne voulant pas dévoiler son identité. Il affirmait qu'un trafic de drogue avait lieu dans une usine désaffectée non loin du commissariat.
Il insistait pour que nous nous déplacions au plus vite. Il ne répondait à aucune de nos questions visant à vérifier la fiabilité de son appel.

Vous comprenez bien que sur un simple coup de file dénonciateur, anonyme et en plus par une voix fluette de jeune homme, nous ne pouvions pas nous déplacer. Nous en recevons tous les jours des appels comme celui-ci, qui ne mène à rien. Des gamins qui trouve amusant de nous mener sur de fausses pistes. Souvent de simples gages entre amis. A celui qui oserait déranger la police, vous voyez le genre.
D'autant plus que ce soir là nous étions le 24 décembre. C'était le réveillon de Noël, nous étions donc en sous effectif et avions d'autres histoires bien réelles à régler. Des fêtards qui boivent un peu trop et qui reprenne le volant ou bien des cambriolages dans les maisons vidées par leurs occupants allant fêter Noël chez des amis ou de la famille, par exemple.

Bref comme vous l'aurez deviné, nous ne sommes pas allé sur place. Du moins pas tout de suite.

Un peu plus tard dans la soirée, une voiture de police a été volée devant notre propre commissariat. Cela s'est passé très étrangement, à vrai dire. Nous aurions pu ne rien remarquer, mais l'un des deux ravisseurs est entré dans notre établissement pour nous en informer;

"- Moi et mon pote sommes en train de voler une de vos bagnoles !" A-t-il crié bien fort avant de ressortir et de grimper côté passager d'une de nos voiture. Ils ont ensuite attendu au feu tricolore du coin de la rue, que nous nous mettions à leur poursuite.
J'étais dans la voiture qui les suivait.

Une course poursuite dans les rues étroites de notre ville s'est alors engagée. Nous avons allumé nos gyrophares et ne les quittions pas des yeux. C'est alors que nous sommes arrivés près d'une usine délabrée. La voiture que nous poursuivions ne s'est pas arrêtée et nous a fait faire deux tours d'usine avant que nous commencions à apercevoir des gens partir en courant de l'usine.

C'était le chaos, nous ne savions plus où donner de la tête. Continuer à suivre la voiture devenait dangereux avec tous ces piétons qui déboulaient de tous les côtés. D'ailleurs que faisaient-ils tous à courir comme ça ? Étions nous tombés dans un guet-apens ? Allait on nous attaquer ?
Je n'étais pas au volant, mais je comprends que mon jeune collègue conducteur ai été tout aussi désemparé que moi.

Pris de panique, il essayait tant bien que mal de sortir de cet endroit.
Attiré par le bruit d'une arme, il a tourné la tête quelques secondes. Je l'ai tourné aussi. C'était un jeune homme tout vêtu de noir, une arme à la main, qui était semble-t-il tombé par terre. Le coup était parti tout seul. Je pense. Mais il a touché une autre personne qui s'enfuyait de l'usine.

Je m'apprêtais à ordonner l'arrêt de la voiture pour pouvoir porter secours à la victime, mais lorsque je me suis retourné vers la route, la dernière chose que j'ai pu voir c'est la voiture de police volée sur laquelle nous étions en train de foncer.

Après cela je n'ai plus de souvenir jusqu'à mon réveil dans un camion de pompier. Ou bien le samu peut être. Je ne sais pas. Tout ce que je peux dire c'est que nous roulions vite, que j'avais un masque à oxygène recouvrant ma bouche et que plusieurs personnes s'activaient autour de moi. Puis je me suis rendormi pour me réveiller à nouveau dans un lit tout blanc placé dans une chambre toute aussi blanche.

J'ai ensuite appris par la suite que mon collègue était dans le coma, que la personne ayant accidentellement été touchée par une balle de revolver n'avait pas survécu, et que 3 personnes étaient mortes et 4 blessés, à cause de la collision des deux voitures.

Un des deux jeunes hommes à l'origine du vole de voiture a perdu la vue. Il n'a que 19 ans et maintenant une faculté en moins. Il ne pourra plus jamais observer quoi que se soit, s'extasier devant un beau paysage, ou encore se rincer l'oeil devant de jolies demoiselles. L'autre s'en est sorti avec quelques côtes cassées ainsi qu'une fracture du bras droit.

Plusieurs kilos de drogue ainsi qu'une bonne quantité d'argent ont été retrouvé dans l'usine. Nous avons donc repensé au coup de file du jeune homme, un peu plus tôt dans la même soirée.
Nous avons interrogé toutes les personnes que nous avions pu arrêter. Autant vous dire qu'il y en a eu peu, tous s'étant enfui avant l'arrivée des renforts. Seuls les blessés restaient. L'enquête a suivi son cours.

Il s'est avéré que la plupart des personnes de toutes celles retrouvées, mortes ou blessées, sur les lieux, appartenaient à un réseau de trafiquants que nous essayions de détruire depuis un certain moment. Pourquoi cette réunion nocturne nous était inconnue alors que nous les avions presque tous placé sous surveillance ? C'est encore un mystère. Sans doute quelques pourris parmi la police qui auraient collaborés avec ces criminels. Seuls les deux voleurs de voiture nous ayant mené jusqu'ici n'avaient pas de casier judiciaire.

Au jour d'aujourd'hui je ne comprends toujours pas pourquoi ils ont pris le risque de dénoncer tout un réseau avec lequel ils n'avaient apparemment aucun lien. Je les ai cuisiné moi même en espérant les comprendre, mais il n'y a rien eu à faire. Ils ont simplement dit avoir perdu un pari qui les obligeait à participer à une course poursuite avec la police. Ils n'ont jamais dévoilé l'identité des parieurs leur ayant lancé ce gage.

À vrai dire, je ne crois pas trop à cette version. Mais nous n'avons aucunes preuves allant contre, alors bon...
Ces deux jeunes ont été condamnés a quelques mois de travaux généraux, ainsi qu'à une amende dont je ne me souviens plus le montant.

Tous les trafiquants arrêtés ainsi que d'autres dont nous avons put prouver l'appartenance au réseau, ont été condamnés à de la prison.

J'espère pour les jeunes voleurs de voiture qu'aucun des trafiquants enfuis ne sera au courant de leur implication là dedans.

Sinon je ne donne pas cher de leur peau...

JadeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant