Chapitre 18 De tes espoirs

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Nous avons marché je ne sais combien de temps, et je ne sais pas vraiment dans quelle direction, ni dans quel but. J'ai passé mon temps à regarder les voitures bouger tantôt au ralenti, tantôt en accéléré, dessinant derrière elles des sortes de traînées blanches assez floues qui finissaient par s'évaporer. La brise un peu fraîche de la nuit qui tombe a séché la sueur qui perlait sur mon front. Adieu mes diamants. Même si les visions s'amenuisent, j'ai encore cette sensation de lourdeur et de légèreté à la fois. Ça commence à ressembler davantage à un début d'ivresse.

J'ai toujours cette espèce de « bip, bip, bip » intermittent qui m'agace, mais il diminue à mesure que je reviens à la réalité et à mesure que ma peine revient. Cette douleur à la poitrine et ce nœud à l'estomac recommencent à m'assaillir. J'ai maintenant conscience que ces symptômes avaient disparu lorsque j'étais totalement sous l'emprise des champignons. Je recommence à me sentir seule et angoissée, d'autant plus que le groupe marche devant moi. Je ne dois pas être de bonne compagnie. Je les suis sans poser de questions, consciente de mon état dépressif mais peu de mon environnement. Je marche dans mon espèce de brouillard habituel qui est épaissi par les restes de substances présentes dans mon sang. Je pénètre derrière eux dans une sorte de grand bâtiment qui m'est familier. Un cinéma ? Visiblement. On paie ma place et je lance un « merci » sans destinataire en particulier. Le hall de l'établissement est immense et bondé de gens. Des groupes de jeunes, des gens seuls, des familles avec des enfants. La musique est assourdissante. Ce qui me frappe, c'est qu'il y fait plus froid que dehors.

Un moment, pendant que le groupe discute avec une dame à un guichet, je remarque Jackson, Peter et Jeff observer mes pieds. La dame finit elle aussi par s'accouder sur son comptoir pour se pencher en avant et scruter mes Converse... Euh ? Ils ont quoi mes pieds ? Je finis moi aussi par les regarder en fronçant les sourcils. Oh mon dieu ! Mes pieds ressemblent à des Hot Dogs géants ! Je secoue la tête et ma vision disparait. Mes Converse ne sont que des Converse. Vivement que ça s'arrête. Je sens que plus les effets disparaissent et deviennent occasionnels, plus ça devient vicieux.

Quelques minutes plus tard, nous nous dirigeons vers ce qui semble être une salle encore plus gigantesque que la précédente et la musique devient plus forte à mesure que nous nous approchons des doubles portes d'où entrent et sortent un tas de gens. J'ai aussi de plus en plus froid. J'espère que je ne couve rien. Je commence à me rendre compte que nous ne sommes pas dans un cinéma. Au moment où nous passons les portes, je tire sur la manche du t-shirt de Dany pour l'obliger à se retourner vers moi. Des néons bleus rendent son T-shirt blanc légèrement fluorescent. Une boite de nuit ?

— Dany, où est-ce qu'on...

Ce que j'aperçois me coupe au milieu de ma phrase.

Je vois des dizaines de personnes glisser sur le sol à toute vitesse. On dirait des anges qui volent. Oh ! Une patinoire.

Dany pose son bras sur mes épaules en me souriant, satisfait de ma réaction, comme si l'expression éberluée sur mon visage était celle d'une personne émerveillée et heureuse d'être ici. En réalité, je suis à deux doigts de vomir. Je passe sous son bras en faisant volte-face et commence à sortir mais il me rattrape. Il se saisit de mon bras en fronçant les sourcils.

— Je ne peux pas. Il faut que je m'en aille d'ici tout de suite, je beugle en me débattant.

Mon cœur se met à tambouriner de plus en plus vite et ces sons étranges dans mes oreilles reprennent de plus belle.

— Pourquoi ?

— Je... Je... Pas ça, non !

Une lueur le traverse. Il a compris.

He's sheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant