Chapitre 16

45 5 3
                                    

"-Mort ? Comment ça ? Me demande Maxime.
-Et bien... je t'ai tué. Tu m'as prise dans tes bras... et du coup t'as perdu, réponds-je tout sourire.
-Et ça te fait rire ?
-Ouaip, je n'ai fait qu'un seul meurtre, et c'est toi, je suis contente.
-Tssss."

  Il retire ses bras et se recule mécontent. Il entoure ses jambes qu'il a replié contre son torse et fixe devant lui. Il souffle un coup, ouvre la bouche mais ne prononce rien. Je me lève et me dirige vers ma chambre mais il m'attrape le poignet.
"-... euh tu veux pas rester un peu ?
-Hein ?
-Je... enfin toi, je veux pas que tu restes seule, tu es capable de faire une connerie.
-Non, j'ai plus de médicaments.
-Quand on veut se tuer, on trouve toujours un moyen.
-... je ne le ferais plus, alors lâches-moi.
Je tire un coup et il lâche mon poignet.
-... alors restes pour moi.
-Maxime, toi et moi on sait très bien que ce n'est pas possible.
-Je ne te demande pas ça parce que je t'aime, rêves pas, c'est juste que j'ai jamais eu quelqu'un à qui parler...
Il baisse la tête et sa voix commence à se briser.
Je... je n'aime pas ma vie plus que toi tu aimes la tienne. Je suis seul moi aussi, j'ai l'impression que je ne sers à rien. Ma vie au quotidien n'est que violence sur violence, j'aimerais fuir... c'est d'ailleurs ce que j'ai fait... je ne voulais pas t'abandonner, j'avais juste besoin de partir le plus loin possible et faire le tri dans ma tête sinon j'allais craquer, mais quand j'étais là bas, tu hantais mes pensées, j'étais sans cesse en train de me demander si tu allais bien et si tu remontais la pente. Si tu penses que je n'ai pas remarqué depuis le temps que tu vas plus que mal, tu te trompes complètement. J'aimerais... pour une fois servir à quelque chose, alors... parle moi, crie moi dessus mais dis ce que tu as sur le coeur, ne restes pas ainsi, frappes moi si tu veux ! Mais laisses moi t'aider.
-Maxime... je... je, je suis désolée... je ne sais pas parler de tout ça. Je n'ai jamais réussi, et je n'y arriverai jamais. Désolée..."

  Je me retourne et pars m'enfermer dans ma chambre. Je m'assois sur mon lit et fixe le vide. C'est... étrange ? J'étais bien dans ses bras, j'avais l'impression de compter pour quelqu'un et d'être en sécurité. Et j'aurais aimé pleurer avec lui, peut-être même lui dire ce que j'ai sur le coeur. Il avait l'air si sérieux et désemparé. Il avait au fond de ses yeux quelque chose qui appelait à l'aide. Je n'avais jamais vu Maxime sous cet angle, est-il lui aussi désespéré de cette vie ? Je pensais que c'était un bad boy qui n'était intéressé que par les filles. Me suis-je trompée ? J'avoue qu'il y a beaucoup de chose que j'aimerais savoir de lui, en commençant par ce qu'il avait dit quand on mangeait. Mais cela fait comme avec Thomas, j'aimerais lui dire ce que je pense vraiment, pleurer sans retenue... mais bien que j'ai préparé un discours dans ma tête au moment de parler tout reste bloqué dans ma gorge. J'aimerais crier au monde à quel point je vais mal, à quel point rester ici me tue à petit feu et à quel point j'aimerais partir.

Je m'allonge et déverrouille mon téléphone avant de chercher la photo de mon père. Je la fixe ainsi laissant perler mes larmes silencieusement. Quelqu'un qui n'a pas vécu ça, quelqu'un qui n'est jamais tombé en dépression ne peut pas savoir combien on se sent seul, combien voir les gens autour de nous, nous dégoûte, combien le bruit nous scie la tête, combien le silence nous fait peur, combien la lumière nous brûle les yeux, combien le noir nous rassure, combien la nourriture nous donne envie de vomir, combien on regrette car on vit dans le passé, combien on a peur du futur et combien mettre fin à notre vie nous hante l'esprit de jour comme de nuit. Quelqu'un qui ne sait pas ça pense que la dépression n'est rien, qu'il suffit d'un peu de mental, et qu'on s'en sort toujours, mais la dépression est fourbe, la plupart du temps on ne se rend pas compte que l'on est en plein dedans, et c'est ça le plus grave, car on se laisse faire, on se laisse engloutir, tirer vers le bas, jusqu'à ce qu'il soit trop tard et que l'on ne commette l'irréparable. Mais le pire, c'est que je suis consciente de tout ça, je le sais et je l'admets, je fais une dépression, mais je n'ai aucune envie d'en sortir, je n'ai aucune envie de redevenir comme avant, car je sais que ce n'est pas possible, je sais que je ne sourirais plus comme avant, alors je préfère voir où la vie me mène et s'il faut que j'y mette fin, je le ferais.

DésespéréeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant