Chapitre 3

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- Je sais, tu penses qu'ils évitent le sujet. Et si je te disais qu'ils ne faisaient pas semblant de ne pas savoir, mais qu'ils ne s'en souvenaient vraiment plus?

- Ce n'est pas possible.

- Vraiment? C'est pourtant la vérité.

- Seule la magie noire peut effacer les souvenirs, et elle est bannie depuis des siècles! Le dernier mage noir est mort il y a de cela 300 ans! criai-je.

- Et bien, il faut croire que nous avons tous été trompés, car je sais de source sûre qu'un mage noir est monté à la tête des Felus, qu'il a fait tuer ton peuple et qu'il a effacé les souvenirs de tous les habitants d'Arkéa sur cet événement et sur l'existence même de ta race.

- Non. Beaucoup trop de choses clochent, fis-je, confuse. Comment ce mage aurait-il survécu? Et pourquoi s'attaquer à mon peuple, le plus pacifique de tous, et le faire oublier?

- C'est là que tu entres en scène, dit-il en me pointant du doigt. Tu vois, les sources sont utiles, mais pas parfaites. Je n'ai donc aucune réponse à ces questions. Pour le découvrir, il faudrait s'introduire chez les Felus, et interroger le mage noir en personne. Je me suis dit que se serais là pour toi une belle opportunité pour ta vengeance. Tu pourrais même tuer quelques Felus en chemin si ça te chante!

- Et pourquoi ne pas interroger le premier Felus venu, tout simplement? Personne n'est jamais rentré dans leur forteresse, Irkalla. Ils sont tous morts en essayant.

- Lorsque j'ai dit que tous les habitants d'Arkéa avaient perdu la mémoire, je ne mentais pas. Les Felus, mis à part quelques hauts placés, n'y ont pas échappés non plus. Nous sommes donc obligés de rentrer dans la forteresse. De toute façon, ne comptais-tu pas te venger? Mieux vaut arracher les racines que se contenter de couper les branches.

J'hésitai un instant.

- Si même les Felus ont perdu leur mémoire, pourquoi pas toi?

- Lorsque le mage noir a mit sont sort en action, j'étais en mer, loin du continent. Voilà pourquoi je ne suis pas atteint par celui-ci.

Je fronçai les sourcils. Cette réponse était louche.

- C'est vague.

- D'accord. Pour tout t'avouer, j'étais jeune, je voulais découvrir le monde, aller plus loin que tout ce qui était connu! dit-il en englobant la place d'un mouvement du bras. J'ai donc mis mes plans à exécution, et je suis parti. Malheureusement, après 3 semaines seulement, mon meilleur ami, le seul équipage qui m'avait accompagné dans mon périple, est mort. J'étais trop triste pour continuer, et j'aurais eu l'impression de le trahir en découvrant de nouveaux continents sans lui. Je suis donc revenu et, quand je suis arrivé, la guerre - si l'on peut l'appeler ainsi - était terminée et les souvenirs, effacés.

Il y eu un petit moment de silence entre nous, où chacun semblait fasciné par ses mains.

- Je... Je suis désolée, dis-je finalement.

- Ne le sois pas, répondit-il avec un sourire crispé.

- Puis-je poser une dernière question?

- Bien sûr.

- Pourquoi ai-je gardé mes souvenirs. Je n'ai jamais quitté le continent.

- C'est un autre mystère autant pour moi que pour toi. Tu pourras poser la question au responsable en personne, j'imagine. Si tu veux bien m'accompagner, bien sûr.

- Je crois sincèrement que cette quête est de la folie pure. Personne n'a jamais réussi à entrer dans Irkalla. De plus, je ne suis pas la mage la plus puissante, j'étais bien meilleure pour la chasse, et je ne connais pas tes talents.

- J'imagine que ça veut dire que je dois continuer seul...

- Non. Je viens. Après tout, je me suis jurée de venger mon peuple, et ce n'est pas en servant de la bière que je vais y arriver!

Il esquissa un sourire en coin, avant de déclarer :

- Parfait. Nous partons maintenant alors, pour la plage!

- La plage? Irkalla est à la capitale Oralion, au centre du continent!

- Je sais, je ne suis pas idiot, répondit-il en levant les yeux au ciel. Mais y aller à deux seulement serait de la folie. Nous allons aller à Océania, la capitale des Meris, les mages de l'eau. Là, il y aura quelqu'un d'autre qui, avec un peu de chance, voudra bien se joindre à notre expédition suicidaire...

Sur ce, il siffla et un cheval noir comme la nuit qui nous entourait arriva en courant.

- En route! lança-t-il en montant sur l'animal.

Il partit en trottant vers la sortie de la ville.

- Dans quoi me suis-je embarquée... murmurai-je en montant sur Courage pour suivre mon nouveau guide.

Amalia d'ArkéaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant