Extrait chapitre 3

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3.
Quête de passion

Mercredi

La journée est magnifique, le soleil, perché au zénith, irradie la terre de ses rayons. Le ciel lui est déserté par les nuages qui habituellement le garnissent. Ajouté à cela, le vent qui d'ordinaire souffle si ardemment est aujourd'hui pareil au vent lunaire. C'est certainement la journée la plus belle depuis des mois, mais cela importe peu car le grand départ est prévu pour demain et le temps n'a pas prévu de me faire le même cadeau, mais n'en déplaise à la météo, je partirai quand même à l'aube.

J'ouvre la porte de mon garage. La pièce sent le renfermé, probablement un mélange de moisissure et de bois pourris. L'atmosphère est saturée de poussière, et à peine respirable. Mon nez se congestionne en quelques instants, j'ai l'impression de respirer de la pâte à crêpes. La pièce est dans un état déplorable. Je reste debout de longues secondes en contemplant le chaos. Je ne mets jamais les pieds dans ce gourbi et je ne me demande plus pourquoi. Je n'arrive même pas à distinguer mon vélo.

J'ouvre l'intégralité des fenêtres pour rendre l'air un peu plus respirable et je commence à remuer mon foutoir. Comment ai-je pu entasser autant de bordel ? J'ai une fâcheuse tendance à tout garder et à vivre un peu dans le passé. C'est un luxe auquel je n'avais jamais vraiment eu droit avant d'être propriétaire.

En fouillant un peu je tombe sur une de mes vieilles collections. Une boîte remplie de plusieurs dizaines de galets. Pourquoi ai-je gardé ça ? Pour moi, plus le temps passe et plus il est difficile de me séparer de ce genre de chose, j'ai du mal à croire que j'ai pu garder une telle quantité de caillasses pendant une vingtaine d'années, mais je ne réussirai pas à m'en débarrasser maintenant, pas après vingt ans. Je trouve ce phénomène humain curieux, je ne me rappelais même plus de l'existence de ces pierres et malgré cela, impossible de les balancer ; elles n'ont même pas de valeur sentimentale pourtant c'est comme si elles me suppliaient de les garder. Je me dis que si j'étais un peu moins sensible aux sentiments des objets, je n'aurai certes pas autant d'occasion d'exercer ma charité, mais mon garage ressemblerait certainement un peu moins à un taudis.

Mon vélo est au fond de la pièce, c'est là où je l'ai vu pour la dernière fois, mais y accéder sera sans doute plus difficile qu'une opération au sein du Pôle Nord. Je démarre ma traversée en enjambant des amas d'objets non identifiés. J'ai juste à bouger quelques bricoles et je devrais trouver le trésor. Dans ces bricoles se trouve notamment une série de cartons qui semblent contenir une matière aussi dense que le mercure. Je déballe le contenu d'un des cartons et j'y découvre une quantité astronomique de feuilles de notes, et il doit bien y en avoir six cartons. Je suspends les recherches, je me pose et commence à feuilleter. « Les Myxomycotas, champignons gélatineux sont des organismes eucaryotes, sapotrophes. On les trouve sur le sol, très commun, et dont le cycle de vie est caractérisé par une phase trophique plasmodiale et par la production de sporocytes qui elle est immobile.» La mycologie... J'avais oublié toutes ces balivernes. J'ai conservé tous mes cours de fac, même la mycologie apparemment. En regardant tous ces cartons j'ai du mal à réaliser la quantité impressionnante d'informations absurdes que j'ai dû avaler. Certaines intéressantes, d'autres moins. Des cours sur la botanique, sur la sécurité sociale, sur l'Ordre des Pharmaciens et le Code de la Santé Publique, toutes ces choses-là font partie de mon passé, une partie encombrante pour le coup, mais dont je tiens à me rappeler.

Je vois enfin mon vélo, je l'attrape et le colle au beau milieu du garage, là où je peux encore poser les pieds. Il a l'air toujours en bon état, sauf les chambres à air qui elles sont à plat. Je ne suis vraiment pas bricoleur mais je devrais quand même me débrouiller pour pouvoir les regonfler. Il faut dire qu'il a très peu servi, les balades seul, ce n'est pas vraiment mon truc.

Cette excursion d'ailleurs, n'est pas une balade, elle a un but bien défini, celui de me sortir des sables mouvants qu'est devenu mon quotidien, de pouvoir jouir d'une aventure et surtout de donner à ma vie le relief qu'elle mérite. J'attends de cette expédition un déclic, l'occasion de trouver une nouvelle perspective sous laquelle voir mon existence. Peut-être ma vie est-elle déjà habitée par l'aventure, il me faut juste un moyen de la reconnaître. Je l'accorde, c'est un but peu commun pour un voyage à bicyclette mais je fais avec les moyens du bord.

Je suis maintenant prêt, même si je pars pour quelques jours, je n'ai pas l'intention de puer des pieds, j'ai donc bourré mon sac avec de quoi me vêtir et rester frais. En tassant un peu, je suis même parvenu à trouver une petite place pour y ajouter un frichti et de quoi me servir un canon, ma carte bleue fera le reste. Je n'ai la place pour rien d'autre, mon journal attendra ici que je vienne lui relater mon épopée, lui faire part de ce nouveau sentiment d'aventure et de mes nouvelles résolutions.

Voilà le début du chapitre 3, j'ai actuellement écrit 6 chapitres, le livre est à peu près 40% fini, j'ai encore du boulot mais j'avance doucement mais très surement. J'espère que cet extrait vous a plu, j'apprécie grandement les retours.
Merci de votre éventuel soutien 
La bise

Mémoires moléculaires du 5ème typeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant