Huitième Chapitre

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Mon coeur tambourine dans ma poitrine tellement fort que ses pulsations me font mal. Un mélange d'adrénaline et d'anxiété court dans mes veines. Je raffermis ma prise glissante sur la main d'Alvie. Eliot ne nous a pas suivies. Tant pis. On a besoin de lui mais on se débrouillera toutes les deux. On veut découvrir pourquoi nous sommes ici.

La porte du dortoir a été étonnement facile à ouvrir. Il nous a simplement suffit de pousser les battants de l'immense porte blanche en délicatesse. Je suppose que les Silhouettes Blanches n'attendaient pas forcément de la résistance...

Je me demande comment on pourra savoir qui dorment dans les autres dortoirs. Je marche en faisant une confiance aveugle en Alvie. Elle m'a dit qu'elle avait appris quelques techniques en compagnie de Maël pour se repérer dans l'obscurité, et heureusement puisque j'ai du mal à distinguer les lourdes boucles noires de sa chevelure dans la clarté sombre du couloir. Je ne sais plus où nous sommes. Il semble s'étirer sur des kilomètres, ce couloir oppressant. Il est empli de silence. D'inquiétudes.

J'ai tellement peur qu'on nous attrape maintenant. Maintenant que je suis si proche de savoir ce que sont devenus Sylvenie et Romain. Je plisse les paupières si fort que c'en est douloureux. Je crispe ma mâchoire. Je bats des cils au moment où Alvie remonte ses lunettes à l'aide de son index. Ce tic me calme un tout petit peu. Je souffle.

Alvie s'arrête. Elle pose ma main dans sa deuxième paume. Elle signe:

- Elle a quel âge ta sœur déjà?
- Seize ans. Deux ans de plus que moi. Six de plus que Romain.
- Alors c'est là. Sylvenie Nopin, seize ans, je doute que ce soit quelqu'un d'autre.
- Comment tu sais ça?

Elle me montre du doigt une plaquette dorée qui claire doucement. Sa lumière est à peine plus vive que celle des murs. Elle troue l'obscurité si faiblement que je ne l'avait même pas remarqué à côté des autres portes. Mon cœur loupe un battement quand je lis ce qu'Alvie vient de m'annoncer. Je déglutis. Alvie marmonne:

- Attends... Qu'est ce que ça veut dire 'potentiel de réveil faible' ?
- Sylvenie est à l'intérieur. Sylvenie.

Je pousse le battant de la porte blanche et je sens la tête me tourner. Je fixe avidement les couchettes, les détaille une à une. L'imposante chevelure rousse de ma sœur se détache à peine des autres. Elle aussi est emmêlée, grasse, teintée d'épreuves que celles des autres. Que la mienne. Je ne sais pas quand on se lavera. Quand je me débarrasserai de la couche de crasse, de sueur et de peur. Sur moi, c'est presque normal. Je n'ai jamais été très portée sur l'hygiène. Mais sur Sylvenie, c'est comme parler à un Bisounours sanguinaire.

Cette vision me brise le cœur. Je cours en oubliant ma promesse de rester silencieuse. Elle est allongée sur la deuxième couchette du bas, dans la rangée de droite. J'attrape sa main. Je la serre. Je pleure tellement que je n'arrive pas à m'assurer qu'elle va bien. Comme j'aimerais voir son visage sans ces cernes qui mangent son visage. Sans ces traits tendus. Sans ces putain de larmes.

- Sylvenie? Je chuchote. Sylvenie ça va? Tu m'entends? Réveilles-toi je t'en supplie...

Elle remue. Je suis contrainte de lâcher ses doigts. Elle gémit. Elle tressaute. Je sens ma gorge se serrer. Je caresse doucement sa joue. Je sens les rides de sa bouche se contracter sous mes doigts. C'est à mon tour de gémir. Que voit-elle? Que vit-elle? Qu'est ce que je suis censée faire?

- Amandine? Amandine tu ne peux rien faire Elle est sous le contrôle du sérum orange. Il le sont tous.

Une vague de plaintes, de pleurs s'abat sur moi. Je les avais ignorés, préoccupée par Sylvenie. Leurs cauchemars semblent encore plus violents que les nôtres. Peut-être parce qu'ils sont plus âgés?

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⏰ Dernière mise à jour : Mar 04, 2018 ⏰

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