« J'ai changé ! »
Une affirmation faite avec la plus grande sincérité, une déclaration proclamée tout haut avec la conviction d'y croire, ou bien une oraison jaculatoire dite sans fondeur de vie et d'espérance ?
Qu'est-ce que sont ces innocentes e...
Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.
J'aspire une nouvelle goulée d'air pour alléger mes poumons en feu puis accélère l'allure. Dans mes oreilles, mes écouteurs diffusent une mélodie suffisamment bruyante pour électriser mon sang et me permettre de ne pas faiblir sous l'effort. Je cours, je cours, sans jamais m'arrêter, je ne ressens plus la fatigue musculaire des premiers jours. Nous sommes presque arrivés au terminal du parcours. Au loin je reconnais déjà le grand poirier qui l'indique.
Mon corps en mouvement ne sens plus la brise de l'air froid sur ma peau recouverte de mon blouson. Nous sommes en février, le temps est plus clément qu'il y a deux mois. Sa froideur nous agresse de moins en moins et il nous arrive même de parfois être gratifiés d'une douce chaleur.
J'accélère encore.
Ça fait déjà quatre semaines que je cours dans le parc. Mon jogging n'est pas seulement là dans le but de me remettre en forme après les fêtes, il annihile aussi le flot de tourments qui font parti de moi depuis quelques temps et que je ne parviens pas à maîtriser.
J'ai besoin de m'aérer l'esprit, de le faire respirer un autre air que celui nauséabonde qui m'entoure en permanence.
La respiration saccadée, mes muscles qui crient leur douleur à chaque foulée et la musique qui bousille mes tympans, ont l'effet d'un coup d'électrochoc diffusé sur chacune de mes tempes. J'ai la cervelle qui vrille, et je n'arrive plus à réfléchir à autre chose que régulariser ma respiration.
Une aspiration.
Deux foulées.
Une expiration.
Ainsi de suite.
Le temps, cette notion fondamentale, ce milieu infini dans lequel se succèdent les évènements de ma vie sans que je ne puisse en contrôler aucuns et qui me rends anxieuse, nerveuse, parfois même parano, n'existe plus lorsque je cours. Plus rien n'existe, à part rejoindre ce poirier.
Deux mois.
Deux mois perdus dans ce lieu infini, une prison sans barrières visibles, mais pourtant bien réelle. Deux mois, où je lutte à coup de faux sourires pour repousser la révélation de mon réel état d'esprit, le même nombre de jours et d'heures que je compte depuis qu'il est parti. Deux interminables mois qu'à chaque pas que je fais, j'ai peur qu'ils surgissent à nouveau pour venir, finir de m'arracher le peu que j'ai réussi à bâtir seule et sans leur aide.
Russell et Esthère.
Ce sont leurs prénoms. Tout ce que j'ai eu la force d'apprendre d'eux. Ces deux êtres fait de de chair et sang avec lesquels je partage un même code génétique, ces êtres qui devaient être pour moi l'une des constantes de ma vie... Depuis le soir du nouvel an, leurs visages ne quittent plus mes songes, et leurs voix ne cessent de me demander cette aide, que je leur ai refusée.
