Partie 3

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J'éteins le contact de ma voiture et détache ma ceinture.

- C'est ici ? me demande Davis.

- Oui, la maison avec les volets bleus, je précise.

Je sors de la voiture et mon prends sac à main rouge pour en sortir mon insigne de policier ainsi que le mandat reçu la veille.

Arrivée sur le perron, je sonne. J'attends que l'on vienne nous ouvrir, j'en profite pour observer le jardin. Tout est bien entretenu, l'odeur de la pelouse fraîchement coupée me monte au nez.

J'entends des pas, je me tourne vers la porte dont la poignée s'active et une femme blonde, avec un visage pâle et squelettique, se trouve derrière.

- En quoi puis-je vous aider ? demanda t'elle, indécise.

- Bonjour, Madame Ty ? je lui montre mon insigne, je suis le Lieutenant Kearney et voici ma coéquipière Davis. Nous avons un mandat nous permettant de fouiller votre résidence ainsi que de vous posez des questions concernant votre fille.

Son visage se crispe. J'utilise toute ma force pour ne pas ressentir cette main qui vous broie le cœur lorsque vous avez en face de vous une personne brisée par la vie. Elle ferme les yeux, inspire profondément avant de répondre :

- Entrez.

Elle s'efface pour nous laisser pénétrer dans sa demeure.

Quand Davis me rejoins, j'entends la porte se fermer à double tour.

- Vous fermez à clef ? je demande en fronçant les sourcils.

- Oui, répond t'elle hésitante, je ne fais plus confiance à qui que se soit ici maintenant.

Je hoche la tête.

- Je vous fait visiter Lieutenant ? m'interroge t'elle en me regardant droit dans les yeux.

- J'aimerai d'abord discuter avec vous, si cela ne vous dérange pas, je la contredis.

- Bien sûr, accepte t'elle en prenant la direction du salon.

Madame Ty nous désigne du bras un canapé blanc sur lequel je m'assois, toujours suivie de Davis.

- Qu'est-ce que vous voulez savoir ? demande t'elle sans attendre.

- J'aimerai tout d'abord être éclaircie sur certains points, posai-je calmement, que pensez-vous du suicide de votre fille ?

Ses mains se contractent, et tout son corps est ébranlé d'un frissonnement.

- Je..je ne sais pas. Il nous semblait que tout allait pour le mieux dans sa vie, Emma avait de bonnes notes et recevait souvent des amis à la maison.

Je sors machinalement mon calepin bleu pour prendre des notes.

- Et comment était-elle lorsqu'elle rentrait des cours ?

- Fatiguée, mais je l'ai déjà signalé à vos collègues, ajoute t'elle en fixant la mine de mon stylo.

- Mais est-ce qu'elle avait des excès de colère ou bien est-ce que dès que vous aviez un contact physique elle s'éloignait ?

Elle secoue la tête tout en fronçant les sourcils.

- Non, pas à mes souvenirs en tout cas. Mais mon mari rentrait plus tôt que moi, peut-être qu'il en saurait plus, suggère t'elle.

- Et où est-il ? lui demande Davis.

- Au travail, répond t'elle du tac au tac comme si elle attendait cette question et s'y était préparée.

- Et vous, vous devriez y être, je me trompe ? j'avance en arquant un sourcil, suspicieuse.

- Oui...enfin non, j'ai posé deux semaines pour pouvoir me reposer, explique t'elle déstabilisée.

J'ai du mal à la cerner. Elle change de comportement en quelques secondes, a un moment elle peut paraître assurée, et tout de suite après elle est hésitante. Elle doit être bien plus perturbée que je le pensais.

Je note ça dans mon calepin et décide d'entrer dans le vif du sujet.

- Pensez-vous qu'elle s'est suicidée, ou bien qu'elle s'est faite tuer ? dis-je sans le moindre tact.

Ma question semble la déranger, elle reste silencieuse quelques instants avant de s'exprimer, les lèvres tremblantes.

- Vous savez, je ne sais pas trop quoi croire... Si elle s'est suicidée, ça serait à cause de quoi ? Notre...fille avait tout ce qu'elle désirait, elle savait que nous l'aimions, et comprenez que pour nous en tant que parents se rendre compte que notre fille s'est suicidée et que le fait que nous ne nous sommes pas rendus compte qu'Emma n'allait pas bien, c'est un peu comme si c'était nous qui l'avions... tuée, pose t'elle d'une traite.

Ni moi ni Davis n'osons ouvrir la bouche face à cette femme brisée, détruite qui explose en sanglots devant nous.

Le bruit d'une clef tournant dans la serrure me fait me lever immédiatement.

- Chéri ? appelle une voix grave, il y a quelqu'un avec toi ? J'ai vu une voiture noire dans l'allée.

Je tends l'oreille, mais rien ne me parviens. Si j'en crois mes oreilles, il ne vient pas de fermer la porte à clef. Des pas se rapprochent.

Un homme, environ la quarantaine s'avance vers nous. Il porte un jean et un polo, ainsi que des chaussures de sport plutôt terreuse.

- Qui êtes-vous et qu'avez-vous fait à ma femme ? s'écrit t'il en voyant son mascara laisser de longues traînées noires sur ses joues ainsi que ses yeux rouges.

Je lui montre mon insigne.

- Lieutenant Kearney, j'ai un mandat me permettant de vous interroger ainsi que de fouiller votre maison.

- Qu'est-ce que vous venez faire ici ? On a déjà répondu à toutes vos questions alors fichez le camp ! hurle t'il.

Sa femme se lève et lui prend le menton pour qu'il la regarde dans les yeux.

- Vincent, calme toi. Elles sont là pour Emma.

Le prénommé Vincent regarde sa femme, sa mâchoire se contracte, puis il daigne nous regarder de nouveau.

- Je vous autorise à nous interroger une demi-heure, concède t'il, après je ne veux plus vous voir trainer ici

- Pour aujourd'hui, si vous ne pouvez pas plus, très bien. Mais que vous le vouliez ou non, nous avons en notre possession un mandat qui nous autorise, contre ou bien de votre plein gré à vous interroger et à fouiller, dis-je en brandissant le mandat.

- Et si nous ne voulons pas répondre ? lance t'il d'un air de défi.

- Vincent ! le supplie sa femme.

- Eh bien c'est votre problème, pas le mien. Je fais ça pour trouver celui ou celle qui a tué votre fille.

- Emma s'est suicidée, pose t'il.

- Comment pouvez-vous en être aussi sûr, monsieur Ty ? demandai-je, en cherchant à le pousser à bout.

- Comment aurait-elle pû se faire tuer, nous étions là, elle aurait hurlé, nous serions monté. Nous aurions entendu quelque chose si quelqu'un était entré ! insiste t'il.

- Est-ce que vous fermez la maison lorsque vous partez travaillez ? je l'interroge.

- Je n'ai pas ce réflexe, mais ma femme si.

- Sauf que ce jour là, votre femme est partie avant vous, posai-je en connaissance de cause.

- Et donc ?

- Vous n'avez peut-être pas fermé la porte à clef, laissant la possibilité à quiconque de s'introduire dans votre demeure toute la journée et d'attendre patiemment Emma.

Ma déclaration le laisse sans voix, et il se met à réfléchir, essayant sans doute de se remémorer les évènements pour tenter de se souvenir.

TremblementsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant