1. Je veux que tu m'épouses

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Il faisait nuit. Je n'avais aucune idée de l'heure qu'il était, mais il devait être très tard. J'avais froid, faim, et je tombais de fatigue. Je m'appelle Serra, j'ai 22 ans. J'étais en cavale depuis maintenant une semaine, essayant de survivre à ma manière, par mes propres moyens. Mes vêtements étaient troués, en plus d'être trempés par la pluie. Je n'avais pas mangé depuis la veille, j'étais au bout de ma vie. Je venais de Virginie, et par je ne sais quelles aventures trépidantes que j'avais vécu avec mes proches, aujourd'hui tous disparus, j'en étais arrivée au cœur de la Géorgie. On se déplaçait en général à pied, ça nous permettait d'être plus discrets et silencieux. Mais maintenant j'étais toute seule et livrée à moi-même. J'aurais donné n'importe quoi pour un abri, un endroit sans danger où j'aurais pu dormir quelques heures. Je n'étais pas croyante; mais par je ne sais quel miracle, on m'avait entendu. Il y avait à moins de 100 mètres de moi une bâtisse, sûrement à l'abandon. C'était immense, comme un énorme hôpital abandonné, avec quelques fenêtres cassées, ce qui rendait l'endroit légèrement hanté. Peu importait, je ne pouvais pas passer à côté. La pluie martelait mon crâne et mes jambes flageolaient de plus en plus; j'étais bien à deux doigts de tomber à terre. Je pris donc cette direction, ralentissant mes pas au fur et à mesure que j'approchais.

- Bouge plus!

Contre toute attente, le bâtiment n'était pas abandonné. La voix venait d'un des étages, c'était une voix rauque, et qui n'inspirait pas confiance. Quand je levai la tête, deux hommes pointèrent leurs fusils d'assaut sur moi. Par instinct, je levai mes mains au-dessus de ma tête. Comme si je n'avais pas assez d'ennuis en ce moment...

- Je... je ne suis pas armée! S'il vous plaît, je veux juste un toit, et le minimum pour manger. Je ferais ce qu'il faut je vous en prie!

Les deux hommes se regardèrent, et je fus trop loin pour entendre ce que dit l'un d'eux pour faire glousser l'autre. Je ne distinguais rien, il faisait trop sombre, et j'étais aveuglée par tous les projecteurs qui m'éclairaient de toutes parts. Quelques minutes plus tard, l'unique porte à deux battants s'ouvrit. Les deux gardes s'approchèrent de moi, me fouillèrent et en moins de deux, on m'escorta à travers un labyrinthe de couloirs sombres. Le silence était roi. Vu de l'intérieur, j'avais plus la sensation de me trouver dans un centre pénitencier que dans un hôpital. Les couloirs étaient longs, et curieusement, très propres. Il y avait des portes tous les 3 mètres environ, et j'en déduisis qu'il s'agissait de chambres à coucher. Nos pas résonnaient à faire réveiller un mort. Au bout de l'un des couloirs nous nous arrêtâmes.

- Attends là, joli cœur, tu bouges pas.

Je n'aimais ni leurs têtes, ni la façon dont ils me parlaient, et encore moins la façon dont ils me regardaient, mais je devais tout faire pour être acceptée ici, afin de dormir au sec, au moins pour cette nuit. Ils avaient fermé la porte derrière eux et m'avaient laissé en plan. Je pouvais malgré tout les entendre parler à quelqu'un dans la pièce en face de moi. Un homme. Avec une voix suave et délicate. Dans la seconde qui suivit, les compères ressortirent.

- Le boss t'attend. On retourne à notre poste.

Ils laissèrent la porte ouverte. Je frappai tout de même avant d'entrer dans ce qui me semblait être une chambre. À dire vrai, je ne m'attendais pas du tout à une telle décoration pour ce genre de bâtiment. Il y avait un grand lit à baldaquin au fond et plusieurs fauteuils recouverts de velours gris. Des rideaux de la même couleur ornaient les fenêtres. Un grand bureau occupait un des angles de la pièce, et était recouvert de papiers en tous genres. Une énorme cheminée réchauffait la pièce. Je m'y sentais bien. Je perdis un peu de ma tension. C'était un confort que je pensais disparu en ce nouveau monde. L'homme se leva d'un de ces fauteuils. Il posa sur un coussin une batte de base-ball qu'il caressait d'une drôle de manière depuis un bon moment. La batte en question était décorée de pleins de fils de barbelés, qui avaient l'air d'être très tranchants. Puis il se tourna vers moi. Il était grand, à taille fine, une barbe taillée et les cheveux plaqués en arrière, et affichait un sourire pervers. Mais plus que tout, il était incroyablement beau: je me perdais dans son regard verdâtre. Je tentai toutefois de garder mon air neutre quand il approcha son visage un peu trop près du mien.

Le Monstre HumainOù les histoires vivent. Découvrez maintenant