Aveu au coin du feu

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Avant-propos : Dans cette partie, j'ai dû construire un texte autour d'une image qui fut la seconde que j'ai choisie. Elle m'inspirait tellement que je voulais absolument la mettre dans l'histoire. Bien évidemment, elle m'a fait penser à la Suisse, le pays d'où je viens. C'est alors que l'idée du voyage s'est pointée.


HUIT DÉCEMBRE 2017
PARTIE N°8 -IMAGE N°7

Nous  avons un chalet pour cinq personnes

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Nous avons un chalet pour cinq personnes. Les trois qui sont avec nous sont sorties pour manger une fondue. Harry m'a bien fait comprendre qu'il ne voulait sortir aujourd'hui. Ce que je comprends en voyant sont regard fuyant et flou depuis ce matin. Depuis quelques heures, Harry est distant et ne parle plus. Depuis Londres, il est devenu étrange et se comporte de façon anormale avec moi, comme s'il avait honte. J'imagine, bien évidemment, qu'il ressasse son passé. Il m'a partagé une information importante concernant un événement qu'il a vécu. J'aimerais vraiment savoir ce qui s'est passé, mais je ne peux pas lui forcer à dire quoi que ce soit. Je suis à la fois perturbé, curieux et impatient.


- Fionn ? M'appelle Harry en plaçant sa tête dans l'embrasure de la porte de ma chambre.
- Oui ?
- Tu sais allumer un feu ? Je n'y arrive pas
, m'avoue-t-il les joues rouges.
- Oui.
Je me lève et le rejoins. Nous descendons les escaliers et finissons dans le salon. Tout est une question de vent, de ventilation si tu préfères.
- Je te fais confiance.


Il se dirige à la cuisine pendant que moi, je m'occupe de la cheminée. J'ai toujours aimé allumer des feux, c'est relaxant de voir ces flammes bouger. Elles sont rapides, désordonnées et hypnotisants. Ceci me calme, bien que ce soit contraire aux froideurs que j'aime. Voir toutes ces couleurs qui diffèrent entre la base et la pointe des flammes m'obligent à me concentrer uniquement là-dessus, comme si la coutume me forçait à méditer ou juste faire le vide en moi. Harry revient avec deux tasses de chocolat chaud, avec du chocolat suisse. C'est délicieux. Je l'aurais préféré froid. Je me met en tailleur à côté de lui, toujours tout face au feu et je ne dis rien. J'attends.


- Tu sais qu'être moche, c'est discriminant ?
- Oui, malheureusement.
- Tu sais qu'être beau, c'est parfois pire ?


Je tourne la tête pour le regarder afin de lui répondre. Seulement, son regard est posé sur le feu, comme s'il dormait les yeux ouverts. Je vois ses lèvres qui tremblent, elles bougent, mais aucun son ne sort. Je comprends facilement qu'il a besoin de me parler. Il est évident qu'il veut continuer la conversation de l'autre jour. Je ne suis pas doué en terme de relation, mais je ne suis pas aussi inculte que cela. Alors, je me tais et ne pose pas de question. J'ai appris, avec le temps, que ce n'est pas bon de poser des questions ciblées, car cela empêche à la personne de se livrer entièrement.


- Quand quelqu'un a des défauts physiques, les autres, à l'école, se moquent toujours de ça. Ils rient sur les mêmes sujets pendant des années, sans jamais mûrir. Ses yeux fixent son chocolat qu'il boit à petites gorgées. Ils te forcent à faire leurs devoirs, ils te forcent à ne plus vivre pour eux. Tu te rabaisses à un niveau tellement bas que tu as presque l'impression de finir au sous-sol, aux portes de l'Enfer. Il sourit jaune. Si Hadès m'entendait, il en rirait. Je souris à mon tour, mais le cache en buvant. Pour les personnes belles, c'est différent. Il se tait et se concentre à nouveau sur le bois qui brûle.
- Excuse-moi, mais... J'aimerais comprendre en quoi, c'est différent d'être... Adulé par tout le monde.
- Tu es coincé. Tu n'as plus de vie privée. Tu es aussi forcé à vivre pour les autres.
- Mais non ! Tu vis pour toi, pas pour les autres.
- Ce n'est pas si facile, Fionn.
Il me regarde enfin. « Tu as des beaux yeux, Harry. » Tu sais combien de fois, on me l'a dit ? En une seule journée ? Avec ou sans mon prénom ? Je fais non de la tête. Plus d'une cinquantaine de fois ! Sa voix commence à changer. Il se fâche doucement. « Harry, tu veux sortir avec moi ? » , « Harry, tu es tellement beau » , « Harry, vient au bal avec moi. », « Harry, tu es mon élève préféré. »... Tu sais tout ce qu j'ai raté dans ma vie à cause de ma beauté ? Ce n'est pas narcissique ce que je suis en train de dire, ni égoïste ou un manque d'ego. J'avais beau avoir des résultats comme tout le monde, dans la moyenne, les professeurs continuaient à me valoriser. On me demandait toujours de faire des discours, de représenter l'école. Parce que j'étais beau, je devais faire mieux que les autres. Personne ne me détestait ! J'étais aimé de tout le monde ! « Harry, se serait bien que tu fasses la une du journal de l'école, le maire va nous rendre visite » , « Harry, tu peux rentrer chez toi, ce n'est pas grave si tu as détruit la classe de chimie ». C'était volontaire ! Je faisais plein de conneries exprès pour qu'on me punisse, mais personne ne me punissait ! J'étais le chouchou ! En dernière année, je faisais tout pour qu'on me haïsse. On m'exploitait partout, je ne pouvais pas être chez moi, seule. J'avais peur de dire non. Je ne voulais pas dire non de peur d'être seul. Mais depuis deux ans, je fais tout pour être seul, car j'en peux plus de toujours donner aux autres sans jamais recevoir ce que moi, j'ai besoin. Je déteste qu'on me dise que je suis beau. Je hais et ça m'énerve quand on me dit que j'ai de beaux yeux... Je n'en peux plus d'entendre encore ces mots.
- Alors, je te demande pardon. Pardonne-moi de t'avoir dit ces mots, de les avoir pensé au plus profond de mes émotions, de mes sentiments. J'essayerai de ne pas te le dire par la suite.
- Ce serait bien oui.
Il soupire. Excuse-moi. Je te remercie aussi. Tu ne me juges pas. Tu m'écoutes et tu ne me conseilles pas, c'est que j'aime chez toi. Tu as tendances à ne rien connaître sur les relations humaines, tu es comme un robot, et ça me plais.


Il se lève, récupère ma tasse vide et la place dans l'évier. Il me sourit sincèrement, puis il s'en va dans sa chambre. Je reste là, seul, devant la cheminée qui est presque vide, il n'y a que des braises. Harry vient de se confier, sans filtre, en m'avouant ce qui l'a peiné dans son existence. Et... il m'a réellement annoncé que je lui plais. Ai-je bien compris ? Mes sentiments sont-ils réciproques ? J'hésite entre sourire et angoisser. Alors c'est ça de ressentir des émotions multiples ? Bon sang, ma vie a été vide jusqu'à maintenant. Elle a été tellement dictée à la lettre que je n'ai jamais eu l'occasion de vivre ces états de consciences. Pour la première fois, je me sens vivre. Et ça me satisfait !


● ● ● Petits mots de l'auteur ● ● ●

C'est ici que s'achève la huitième partie de mon histoire. Et oui, Harry a aussi souffert, malgré qu'il est beau. Qu'avez-vous pensez de cette partie ? Quelles questions vous posez-vous ? Je suis curieuse.

Boréas - Le Vent du NordOù les histoires vivent. Découvrez maintenant