C.8: Vide

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ALONÏS:

Nous sommes le matin, je m'assieds et grâce à mon réveil, je sais que nous sommes vendredi.

Je me lève, touche ma jambe qui me fait mal. Puis, je passe devant le psyché. Je m'arrête et recule pour me détailler dans le miroir. Au vu de mon reflet, je fronce les sourcils.

Comment puis-je être aussi grande et si bien formée, sans me rappeler d'avoir vieilli ? Et puis, il y a ces coups de poignards dans le cœur. Ses piqûres lourdes de tristesses.

Je touche mon visage du bout des doigts, comme s'il allait s'évaporer. Mes mains tremblent en comprenant que ce n'est pas un rêve. Je regarde mes paumes et des écritures sont griffonnées, barrées avec rage. Cela m'intrigue...

- Ma chérie... Tu es déjà réveillée ?

C'est tata Carène ! Je suis heureuse qu'elle soit venue nous voir. Je l'entends marmonner...

- Mince. J'étais sûre d'avoir entendu des pas...
- Oui, je suis debout ! Ai-je crié.

Elle entre lentement dans la chambre...

- Tu nous fais une surprise ? J'ai pas école aujourd'hui ? Je demande ça, car il est déjà 9h... Pourquoi ton regard est si triste ?

Elle ne dit rien, s'installe au bord de mon lit et tapote le matelas. Je viens à ses côtés. Elle soupire avant de m'expliquer avec douceur...

- Depuis une trentaine de jours, je suis obligée de te briser le cœur et ce chaque matin...

Elle s'arrête et rejette avec haine une larme qui roulait sur sa joue. Je ne saisis pas. Elle reprend remarquant mon regard interrogateur...

- Je suis terriblement désolée, ma chérie... Comment te le diluer, cette question revient chaque jour. Je suis présente à tes côtés, depuis plus d'un mois. D'abords, à ton chevet, car tu as eu un accident. Non, tu n'as pas neuf ans, tu as dû te voir dans le miroir. Tu as dix-sept ans et si tu ne te rappelles pas, c'est cet accident de malheur. À cause de mon beau-frère qui n'a pas su rester sobre. Tu coupes ta mémoire depuis qu'il est devenu alcoolique. Car tu as souffert de ses excès de violence, car tu as pleuré quand tu voyais ta mère effondrée... Car à cause de l'alcool...

Elle soupire de nouveau et ferme les paupières. Plus elle discutait, plus elle se mettait en colère. Pas contre moi, je l'ai bien comprise. Contre mon père et sa maladie. Car mon père avait perdu quelque chose, mais quoi ? Je ferme les yeux aussi pour me concentrer...

Il était comme ça depuis qu'il a perdu sa petite sœur de dix ans sa cadette.

Qu'est-ce qu'il y a eu en plus... Accident... Acci...dent ! Le bruit du choc dans mon souvenir, me fait frissonner...

- Car à cause de l'alcool, il se sont éteints. Ai-je fini sa phrase.
- Oui ! Oui, ma chérie. Oh c'est nul d'être heureuse dans des moments pareils, mais tu t'es souvenu. Tu t'es souvenu !

Prise dans l'euphorie, elle me prend dans ses bras et m'embrasse à plusieurs reprises ma joue.

Je ne souhaite pas enlever sa joie, mais moi, j'ai mal et puis, je n'ai eu qu'un flash. De plus, j'ai la sensation qu'il me manque encore d'autres personnes. Est-ce qu'elles sont mortes aussi ?

Mon âme pleure sans cesse. Je retiens mes larmes pour ne pas gâcher le bel instant de ma tante.

Je lui dis que je vais me doucher et elle acquiesce.

Sous l'eau chaude, je ne retiens plus mes sanglots. Je me sens si vide à l'interieur. Les maux, la peine se déversent dans mon corps en entier.

Après m'être calmer, je me sèche et me prépare. J'ai pris une robe noire avec un col V. De petites dentelles brodées sur les rebords des manches et finissant la couture au dessus du genou. Je lisse mes cheveux et passe du crayon sur mes yeux. Un peu de mascara et c'est là, que j'entends frapper à la porte.

Je n'ai fait que de me répéter les phrases importante pour m'en souvenir. J'ai vu à quel point cela touchait Carène. Je ne veux pas lui faire plus de mal en oubliant encore.

J'entends une voix masculine...

- Carène, laissez-moi la voir, s'il vous plaît. Dix jours sans elle, ce n'est plus possible.
- Jayron...

Jayron... Je fixe ma paume et vois un " J ", dans les écrits barrés...

- Lisa m'a dit que tu n'étais pas fréquentable.
- Alors, j'ai une question Carène... Et t'elle revenu depuis que votre nièce ne vient plus au lycée ?
- Malheureusement... Non et je ne sais pas pourquoi.
- Et moi ?
- Tout les jours, tu as tenté ta chance.
- C'est peut-être parce que je suis le plus attaché à Alonïs, non ?

Ma tante ne répond plus ou je ne l'entends pas. Comme je suis à l'étage. Puis, j'entends quelque chose vibrer dans ma chambre. J'y retourne et cherche... un téléphone. C'est inscrit " Liza ".

Elle ne vient peut-être pas, mais elle m'appelle. Je décide de décrocher...

- Salut ma puce, c'est Lisa... Ta meilleure amie.
- Oui. J'ai appris que tu venais plus. Ai-je énoncé pour comprendre.
- J'ai eu la crève et je vais mieux. Je suis derrière chez toi. Viens je t'attends.
- Juste le temps de prévenir Carène et je viens...
- Oh, mets-lui un mot et passe par la petite échelle de secours. J'ai envie de faire une sortie entre filles.

J'hésite un moment et puis, j'ai la sensation que cela fait longtemps que je me suis aérée. Peut-être les dix jours que ce Jayron a évoqué.

" Méfies-toi ! Je sens le coup fourré. "

Pour une fois, je n'ai pas envie d'être sage. Je le sens en moi que je suis trop sérieuse et ma voix l'est de trop aussi. Je prends une veste en cuir bordeaux et un petit sac. Jécris un mot et je pars...

...

Nous avons passé la journée à faire les magasins et nous avons bien rigolé. Il n'y avait rien de dangereux. Je me sens vivre et quel bien que cela me fait. Le soir est tombé, Lisa me propose de me faire une surprise et je ne sais où elle m'emmène. Nous sommes passées chez elle et je me suis changée.

J'ai une robe rouge et moulante. Je ne me sens pas trop à mon aise, mais Lisa était tellement enthousiaste que je n'ai pas su refuser.

Elle m'a maquillée également. Je trouve que le maquillage est trop foncé et le rouge cerise aux lèvres, fait un peu trop voyant.

J'ai l'impression d'avoir été une tête de poupée Barbie et que Lisa a fait des expériences sur moi. Je ris comme une enfant en pensant à ceci.

Après tout, je n'ai pas grandi assez dans ma tête. J'ai récupéré de petits souvenirs, mais pas toute ma mémoire. Et c'est bien connu l'insouciance des gamins, est plus forte que celle des adultes.

Alors je me laisse emporter vers... Une fête de lycéens dans une villa ? Mon dieu...

- Sérieux, Lisa ?
- Mais oui, il faut se marrer de temps en temps et je suis sûre que tu vas t'éclater.
- D'accord. Ne suis-je pas convaincue.

À peine sortir de son audi tt, nous nous faisons siffler par des garçons qui ont du mal à marcher droit. Ils sont pompettes, c'est indéniable.

J'avance en m'accrochant au bras de mon amie. Surtout qu'elle m'a prêté des escarpins noirs et talons hauts. La douleur de ma jambe, se reveille un peu.

Dès l'entrée, les jeunes bavent sur nous. Je suis un peu effrayée...

- Lisa, je ne me sens pas à mon aise ici.
- Viens ! Après un petit verre, ça ira.

Je la suis, mais sans conviction. Elle doit être la fille cool et moi, la coincée. Nous arrivons devant le bar de la cuisine et Lisa interpelle le barman...

Leave meOù les histoires vivent. Découvrez maintenant