Chapitre 2

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Je sors lentement de ma torpeur et ouvre mes paupières.

Il fait toujours sombre.

Je soupire, las de cette mauvaise habitude dont je ne parviens toujours pas à me défaire, et la maudis une fois de plus dans mon fond intérieur.

Je me redresse difficilement sur mon séant et tâtonne minutieusement ma table de chevet. Une fois le réveil trouvé, j'active le bouton sonore.

Neuf heure trente.

Je passe mes mains sur mon visage.

Chaque matin, depuis maintenant cinq jours, je revis le même cauchemar et la même déception que lors de mon premier réveil. Jamais je ne pourrai oublier ce moment traumatisant.

Plongé dans les vapeurs, je ne savais plus où j'étais et, malgré les voix réconfortantes qui s'enthousiasmaient de mon réveil, l'angoisse me prit rapidement.

J'avais beau avoir les yeux grands ouverts, je ne voyais rien.

Rien du tout. Que du noir, partout, à perte de vue.

Ma première réaction fut, bien entendu, celle de hurler que j'étais dépourvu de toute vision tout en passant les mains sur mon visage pour essayer désespérément de retirer ce qui pouvait bien m'empêchait de voir.

Au même moment, ceux qui m'entouraient s'activèrent tout autour de moi jusqu'à ce que je sente que l'on passait un objet devant mon visage, sans résultats.

Puis, des excuses, des explications confuses, avant de me communiquer leur envie de m'administrer un tranquillisant pour que je me calme.

Mais j'étais comme fou. A ce moment-là, j'avais alors pleinement conscience que j'avais fait la plus grosse erreur de toute ma vie.

En prenant des médicaments, chacun espère pouvoir vivre une belle mort. Personne ne songe aux conséquences de son acte, si cette dernière ne veut pas de nous. Ce qui fut mon cas.

Je pleurai sans arrêt les deux premiers jours, regrettant sans cesse ma folie et craignant ce nouvel univers sombre. Je ne voulais jamais quitter mon lit, sauf pour les besoins les plus naturels, cela va sans dire. Je me faisais alors violence pour quitter quelques minutes seulement cet abri avant de, rapidement, y retrouver de nouveau refuge.

Puis, au terme de longues et presque interminables quarante-huit heures de lamentations : plus rien.

Un beau matin, je me réveillai comme anesthésié : je ne ressentais alors plus aucune douleur ni tristesse. Je m'étais même levé pour parcourir du bout de mes doigts ma chambre, jusqu'à aujourd'hui pouvoir la connaître par cœur.

Toutefois, depuis mon admission à l'hôpital, je n'y ai jamais mis un pied en dehors. Le monde extérieur me fait bien trop peur désormais. Comment pourrais-je lutter contre ses agressions, moi qui suis devenu si faible, si vulnérable ?

Je soupire à ces pensées et me lève du lit pour venir trouver le mur. Je tâtonne sa surface lisse de la pulpe de mes doigts pour qu'il me guide jusqu'au petit coin.

Une fois l'affaire réglée et les mains désinfectées avec le produit mis à ma disposition dans l'entrée, je retourne dans mon lit et me construis une tanière en couette. Je la place bien autour de moi pour me terrer plus encore en son sein.

Ma main se ballade de nouveau sur la table de chevet et agrippe la télécommande, sur laquelle je compte les boutons pour trouver la bonne chaîne. J'allume la télévision. Elle me tient compagnie. Parfois, je l'écoute avec attention en essayant de m'imaginer ce qu'il se passe mais beaucoup de choses ne sont pas dites par des mots et passent par les gestes et mimiques des acteurs. Ou à travers un paysage époustouflant ou terrifiant. Néanmoins, le pire demeure lorsque je connais le film : j'angoisse alors d'oublier les visages et que les scènes connues s'échappent de ma mémoire. Je sais pourtant que, dans quelques années, il n'en restera plus que de vagues souvenirs et cela me désespère.

Conte de Noël (homo-érotique)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant