- Ça va ? Tu te sens prêt ?
- Tant que tu es à mes côtés, je n'ai rien à craindre...
Il est sûrement en train de sourire car il ne me répond pas immédiatement. Bras dessus, bras dessous, nous marchons le long du couloir qui nous mène jusqu'à cette fameuse salle d'activités où tous les autres, les pensionnaires ainsi que les bénévoles qui s'occupent d'eux, nous attendent.
- Tu te souviens que je ne serai pas là ce soir pour t'accompagner à la restauration, à cause de ma garde ? Me remémore-t-il avec douceur.
Je serre un peu plus son bras à ce douloureux rappel. S'il avait pu être présent très tôt aujourd'hui, par chance au vu de ce qui aurait pu se produire s'il n'était pas intervenu lors de ma confrontation avec Benjamin, c'était uniquement parce qu'il était de garde cette nuit aux urgences : cela avait été la condition pour qu'il puisse passer ses deux journées de Noël en famille.
Je hoche misérablement la tête avant de répliquer :
- Ne t'inquiète pas pour moi, tu as signalé Benjamin à l'accueil et vu ce que nous lui avons mis, il ne risque pas de revenir... Quant aux autres pensionnaires, ils me seront moins inconnus que maintenant, n'est-ce pas ?
- C'est vrai qu'il était déjà bien abîmé lorsque je suis arrivé ! Admet-il dans un rire franc qui me donne le sourire. Et pour les autres, tu verras, ils sont adorables !
J'acquiesce de nouveau à ses propos : après l'agression, Jonathan m'avait proposé de passer au moins l'après-midi, voire la fin de journée, à me reposer et de repousser ma confrontation avec les autres au lendemain. Toutefois, je voulais absolument quitter la chambre et penser à autre chose car m'apitoyer sur mon sort et pleurer dessus ne me servait strictement à rien alors que profiter de chaque instant en compagnie de l'infirmier était pour moi bien plus important.
Pendant les heures qui passèrent et durant lesquelles je reprenais petit à petit un état émotionnel stable, surtout après une bonne douche chaude, nous eûmes un échange bref, mais vif, au sujet de la plainte que Jonathan voulait que je dépose contre Benjamin, car je m'y refusais : je ne voulais plus jamais en entendre parler et rien que le fait de m'imaginer être de nouveau confronté à sa présence me raidissait déjà de peur.
Jonathan était furieux contre ma décision mais je m'étais montré ferme : nous l'avions bien plus endommagé que nous ne l'étions et il avait ainsi plus de faits matériels à notre encontre que nous en avions contre lui, si jamais nous nous prêtions à l'aventure. Surtout, je ne voulais pas attirer à l'infirmier des ennuis inutiles. Par ailleurs, Benjamin fuyait la police comme la peste alors je le voyais mal aller se plaindre de ses blessures à ces derniers. Toutefois, je concédai à Jonathan que, si jamais c'était le cas, nous ne nous laisserions pas faire.
Très rapidement, au fil de notre marche, le bruit des voix se fait plus fort à percevoir et je sens l'atmosphère devenir tout à coup beaucoup plus chaleureuse.
Si mes différentes craintes, dont celle à présent d'évoluer dans un environnement dont je ne connais rien, me broyaient les entrailles, ces dernières commencent déjà à légèrement disparaître à mesure que nous nous rapprochons des autres : en effet, les flots de paroles enjouées, les rires puissants, une douce musique de Noël en arrière son, ainsi que différentes odeurs comme celle du café, du chocolat chaud, du thé, du miel et du pain d'épice qui flattent mon odorat devenu plus sensible à ce genre de stimuli, s'entremêlent joyeusement pour venir me servir de baume au cœur.
Je sais alors que j'ai fait le bon choix de sortir au lieu de rester cloîtré dans ma chambre à pleurer, terrorisé. Les gens dans cette pièce m'inondent véritablement de leur bonheur et je sens alors comme une boule de chaleur se diffuser doucement dans tout mon corps. Je déteste vraiment la solitude.
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Conte de Noël (homo-érotique)
Romansa« Jonathan, Merci de me faire découvrir des choses qui ne sont visibles qu'avec le cœur. - Alexandre » (Désolé je ne peux pas mettre plus de détails, sinon c'est du spoil ;) Mais vous finirez par comprendre d'où sont issus ces mots :) Histoire c...