Chapitre 10

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Cher journal, ça fait maintenant une semaine que je fais ces rêves presque toutes les nuits. Je me suis rendue compte que le temps semble continuer lorsque je me réveille dans la réalité, comme si je m'endormais la bas et était en train de rêver ici.
Cette semaine, j'ai du louper les cours une fois, parce que je n'arrêtais pas de tousser et que j'avais un peu de mal à respirer parfois à cause d'une toux. Le médecin a dit qu'il fallait faire un traitement plus fort aussi, mais je n'en ai pas envie. Sérieusement, je ne vois pas à quoi il servirait. Je vivrais peut être plus longtemps, mais je me sentirais sûrement encore moins bien. De toutes façons ils ont ensuite dit que le traitement serait trop fort pour moi et qu'il ne pouvait pas le faire. En plus, je ne pourrais plus cacher longtemps ma maladie à Emily et Tessa si je passe des jours entiers à l'hôpital à cause de la chimiothérapie. Ce serait... désagréable. D'ailleurs, j'ai eu du mal à leur parler ces derniers jours, parce qu'elles ont voulu savoir ce que j'avais dès que je suis revenue au lycée. Bien sur, je leurs ai dit que j'étais malade. mais je n'ai jamais été une très bonne menteuse, et mon excuse devait paraître un peu étrange. Surtout que je n'aime pas mentir, encore moins à des amies.

Dans mes "rêves" je me suis rendue compte qu'il fallait que je regarde derrière les premières apparences des gens. Fenton est vraiment quelqu'un de bien malgré sa tendance kleptomane et le fait qu'il boit un peu trop quand il va à l'auberge. En observant parfois Merry depuis le palier ou une fenêtre, j'ai vu à quel point elle tenait à cette auberge et comme elle était appliquée à la tâche. Son mauvais caractère est toujours là bien sûr, mais en regardant bien on voit aussi de bons côtés chez elle (ils sont très bien cachés).

Gynna nous a découvert Fenton et moi un jour qu'elle avait décidé de mettre de vielle babioles au grenier. Au début, on a pensé que c'en était fini de notre cachette. Mais la jeune aubergiste n'a rien dit, elle s'est contentée de nous dire bonjour comme si elle savait depuis longtemps que nous dormions ici. Le lendemain, on a même trouvé un repas devant la trappe que Fenton à tout de suite mangé à moitié comme s'il était affamé depuis des jours. C'était forcément elle, alors je l'ai remercié dès que je l'ai vue. Elle m'a simplement sourit en me faisant signe de me taire comme sa soeur était dans les parages. Les jours suivant, j'ai souvent discuté avec elle, elle m'a raconté pendant longtemps la passion qu'elle avait pour les voyages et les différentes contrées, en particulier celle du nord. Je ne l'ai pas détrompée sur mes origines et elle croit toujours que je vient de Sylvanie. Je sais, ce n'est pas très glorieux. Mais je ne pouvais pas non plus lui dire la vérité alors autant la laisser croire ça. En tout cas je m'entend très bien avec elle.

Encore une fois dans le grenier, j'observe seule le petit morceau de papier dérobé à la bibliothèque quelques jours auparavant. Je relis le texte et soupire, ne sachant que faire de mes idées. J'ai pensé plusieurs fois durant la semaine à cette légende, et je me suis même imaginée partir à la recherche de ce livre. Mais en n'ayant aucune carte et aucun repères dans ce monde je ne vois pas comment j'y arriverait.
Le bruit habituel des pas de quelqu'un me sort de mes pensées, Fenton se glisse par la fenêtre toujours cassée un sac apparemment chargé sur les épaules. Je fais une moue fatiguée en devinant qu'il a encore du voler quelque chose. Lorsqu'il me voit adossée au mur et le papier entre les mains, il se penche dans mon dos pour voir ce que c'est.

Je lui lance un regard agacé, n'appréciant pas l'indiscretion dont l'homme fait preuve à cet instant. Il ne semble pas le remarquer et continue de lire.

- Où est ce que tu as trouvé ça ? Demande-t-il soudain.

Je n'ai pas vraiment envie d'avouer mon larcin, mais de toute façon c'est à un voleur "d'expérience" que je parle.

- Je l'ai pris dans la bibliothèque, ça m'intéressait.

Il observe la feuille et secoue la tête.

- Je ne vois pas ce que tu vas faire d'un morceau de papier usé. Si tu décide de voler, fais le au moins avec des choses de plus de valeur.

Je souris nerveusement.

- Je n'ai pas "décidé de voler", j'ai emprunté ce papier parce qu'il m'intéressait, pas pour son prix.

- Et qu'est ce qui t'intéresse ?

Je regarde le papier pensivement et lui montre le titre.

- C'est une légende qui parle d'un livre qui pourrait répondre à toutes les questions qu'on se pose.

Il regarde la feuille et semble réfléchir un peu.

- Qu'est-ce que tu lui demanderais toi ? Dis-je en repliant la feuille une fois qu'il a fini de l'observer.

- Je ne sais pas trop, il faudrait que j'y réfléchisse. Comment rester jeune serait un bon début ! Rit il soudain.

Je le regarde en souriant un peu à sa plaisanterie, mais trop absorbée par ma réflexion pour rire.

- Et toi, qu'est-ce que tu demanderais ? Dit il soudain.

Je lève la tête et regarde le visage de mon interlocuteur.

- Le remède contre les maladies incurables je suppose.

Fenton hoche la tête, ne cherchant pas à en savoir plus sur ma réponse.

- Un but bien noble.

Un silence suit sa phrase, il décide de ranger les objets à l'intérieur de son sac et je l'observe d'un oeil distrait sortir des vestes qui semblent en cuir et en fourrure. Je soupire, habituée à présent à tout ce qui arrive dans ce grenier par le biais du sac de Fenton. Voyant que je regarde ce qu'il fait, il décide de continuer ses piques.

- Tu as vu mes trouvailles ? Tu veux que je t'apprenne mes super techniques ?

Je secoue la tête, amusée et excédée.

- Non merci, j'ai déjà du mal à accepter les repas que Gynna nous donne gratuitement.

En entendant ma réponse, je vois l'homme tourner la tête vers la trappe au sol d'un air attentif.

- Maintenant que tu le dis, j'ai faim. Quand est ce qu'elle vient nous nourrir ?

Je fronce les sourcils.

- Tu n'es pas gêné, dis donc. Elle n'a aucune obligation envers nous.

Il me jette un oeil blasé et finit de vider son sac avant de le balancer nonchalamment contre un mur de la pièce pour trier les nouvelles affaires.
On dirait un enfant. Me dis je en plissant vaguement les yeux avant de me laisser glisser un peu plus contre le bois du mur.
Un long silence passe, je regarde le plafond en pensant à cette légende que je n'arrive pas à me sortir de la tête.

- J'aimerai partir à sa recherche... Dis-je doucement.

Fenton me jette un regard, ayant entendu ce que j'ai dit. Mais il ne répond rien.

Étant donné la trouille que j'ai eu de me rendre à nouveau à la bibliothèque après avoir décampé la dernière fois, je n'ai pas d'activités qui s'offrent à moi. Sortir du grenier pour errer sans but n'aurait pas vraiment fait autre chose que de me faire remarquer en tant que nouvelle villageoise voleuse ou espionne, puisque apparemment les gens d'ici ont tendance à voir des espions en chaque nouvel arrivant.

C'est après la sortie de Fenton que Gynna arrive par la trappe son sourire gentil collé aux lèvres. Alors que nous discutons un peu, je remarque qu'elle semble attendre impatiemment que je lui parle de l'endroit d'où je suis "censée" venir.
Il va falloir qu'elle attende longtemps je crois.

Après le départ de la jeune femme, le jour disparaît plus vite que je ne le pensais. Je laisse la moitié du repas à mon colocataire et m'allonge à même le sol, pas franchement impatiente de retrouver ma réalité.

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