Chapter 59 : Prendre les devants

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ANTHONY

Le coursier vient de déposer les dernières affaires d'Amelia à l'appartement. Il ne reste à présent plus rien dans sa suite au Mondrian. Je me suis chargé de tout rapatrier, lorsqu'elle a finalement acceptée de rester ici. Je ne crie pas victoire tout de suite, mais c'est un premier pas.

J'ai appelé Emily pour la tenir au courant de ma situation actuelle. Elle était présente au cimetière et a pu assister à l'incident. Cependant, j'ai gardé pour moi les vraies raisons du malaise de mon épouse. Je lui ai simplement expliqué qu'à présent je travaillerais depuis chez moi, jusqu'à que Amelia se rétablisse. Je ne le lui ai pas encore dit, mais cela pourrait durer plusieurs semaines. Je ne me sens pas rassuré alors que je sais qu'à tout moment quelque chose peut arriver.

Je demanderais à Daniel de déposer à Emily, les articles sur lesquelles je travaille, et elle qui me contactera, si il y a une quelconque urgence.

J'ai improvisé un semblant de bureau sur le secrétaire du salon. Depuis le journal, je n'aurai pas pu voir si Amelia a besoin de quelque chose. Cela fait plusieurs nuits que je n'arrive pas à trouver le sommeil, je suis frustré et inquiet, car savoir ma femme aussi près de moi, sans pouvoir la toucher est un véritable supplice ! Au moins elle n'est pas terré dans un hôtel pour m'éviter, me dis-je pour me donner courage. Tout les chamboulements qui s'annoncent, me donnent le tournis. Je n'arrive toujours pas à réaliser que je vais être père. Je n'avais jamais réellement envisagé d'avoir un enfant. Amelia est une femme indépendante et carriériste. C'est le genre de personne qui ne voit pas son accomplissement dans la famille, c'est d'ailleurs en grande partie pour cela que je l'ai épousé. Nous ne nous connaissons que depuis un an mais il s'est passé tant de chose dans ce si court laps de temps. Je me dis que ce n'est pas un hasard, qu'elle soit tombée enceinte au pire moment pour notre relation. Ce bébé est peut-être le seul capable de nous rapprocher. Il va nous permettre de nous focaliser sur l'essentielle et peut-être allons-nous enfin comprendre que cette passion brutale que nous vivons, a des chances sur le long terme. Je dois reconnaître, qu'à l'annonce de sa grossesse, j'ai été submergé par l'émotion, je me suis surpris a éprouvé un grand bonheur. Savoir qu'elle et moi, avons conçu un être humain, m'a mis dans tous mes états. Quoi qu'il arrive, cet enfant a été fait dans l'amour, peut-être pas désiré, mais aimé. Ce qui fait une profonde différence avec ma propre histoire personnelle.

Perdu dans toutes ces pensées, je n'arrive pas à véritablement commencer à travailler, alors je range des papiers ici et là...

— Anthony ? Dit-elle derrière moi, me faisant sursauter.

— Oui ? Tu as besoin de quelques chose ? Dis-je, me levant de mon siège.

— Non. Je suis juste surprise que tu sois là, en pleine journée.

— J'avais envie de travailler à la maison pour une fois. Dis-je, pour ne pas la préoccuper.

— Je vais très bien, tu n'as pas besoin de rester ici pour me surveiller. Dit-elle, lasse.

Elle marche jusqu'au au bord de la fenêtre, puis s'y assoie.

— Je ne reste pas à la maison pour te surveiller, mais pour veiller sur toi, nuance. Tu es encore faible et je n'ai pas envie de me précipiter à la maison à chaque fois que tu te sentiras mal.

— Je suis dans l'appartement, je ne crains rien et sache que c'est tout à fait normal, d'avoir des nausées au début d'une grossesse. Jane m'a dit qu'elle en avait souvent les premières semaines. Dit-elle, tout en regardant par la fenêtre.

Je m'approche d'elle, mais reste debout à ses côtés, l'observant un instant. Elle est encore en chemise de nuit, un négligé de soie bleu clair sur les épaules, ses pieds sont nus. Sentant mon regard sur elle, sa tête tourne dans ma direction.

— Malgré les inconvénients de ton état, tu restes toujours aussi resplendissante. Dis-je, émerveillé par son élégance.

Elle est surprise par ce compliment.

— Je dois avouer que je ne me sens pas particulièrement attirante ces jours-ci. Dit-elle, défaitiste.

La voyant d'humeur neutre, je me dis que c'est peut-être le moment de mettre les pieds dans le plat. Nous n'avons jamais pu réellement parler de ce que nous éprouvions vis à vis de cette soudaine grossesse. Je pense que c'est le bon moment pour avoir cette discussion aussi désagréable soit elle.

— Depuis que nous savons que nous allons être parents, nous n'en avons pas réellement discuté, mais je voulais que tu saches que bien que je sois complètement paniqué et encore un peu confus... je ne suis pas contrarié par ce qui arrive. Au contraire !

Elle prend une profonde respiration, lorsqu'elle entend mes paroles.

— Je sais que ce n'était pas prévu, mais maintenant que j'ai acquis la connaissance que je porte en moi ce bébé, j'ai envie de le protéger et de lui donner tout ce que je pourrais lui offrir. J'ai eu une enfance heureuse, Anthony. Je sais que cela n'a pas été de même pour toi, mais je ne suis pas Clara. Je ne te laisserai jamais lui faire de mal. Que tu m'en fasses à moi, soit! Je suis une adulte et je prends pleinement mes responsabilités, mais cet être innocent, qui n'a rien demandé, tu ne le détruira pas ! Me dit-elle, presque menaçante.

— Je ne vous ferai jamais aucun mal ! Comment peux-tu, ne serais-ce qu'envisager le contraire ? J'ai fait une erreur... j'avais trop bu... bien que ce ne soit pas une excuse, je ne voulais pas te faire de mal ! Jamais ! Je t'aime trop pour cela ! Dis-je, plaidant ma cause.

— Il est bien là le problème, tu aimes comme tu hais ! Quelques fois, j'ai l'impression que tu n'arrives plus à faire la différence. J'ai eu la peur de ma vie, cette nuit là ! Te voir ainsi, fou, déchirant mes vêtements et m'obligeant à écarter les cuisses... J'en fais encore des cauchemars. Je n'ai plus confiance en toi. Comment pourrais-je élever un enfant avec quelqu'un qui peut basculer à tout moment ? Dit-elle, au bord des larmes.

J'ai l'impression que mon coeur se broie à l'écoute de cette diatribe, je ne peux même pas me défendre, puisque tout ce qu'elle dit est vrai. Je ne sais pas me contrôler, je n'avais d'ailleurs jamais éprouvé le désire de le faire avant de la rencontrer. Je sais maintenant, que c'est la condition essentielle pour que notre relation fonctionne.

— Je ne te promettrais rien aujourd'hui. J'ai trop de promesses non tenues à mon actif, mais... ce que tu me dis, me brise le coeur à un point, que tu ne peux même pas imaginer. Je ne sais pas ce que j'aurais fait à ta place. Je ne peux que te demander pardon, sans véritablement espérer que tu me l'accorde. Toi et ce bébé, êtes ce qu'il y a de plus précieux au monde à présent. J'ai une famille à m'occuper maintenant, je suis obligé d'être responsable. Ne prend pas de décision trop rapide, s'il te plaît. Dans quelques jours, nous irons chez tes parents passer les fêtes comme prévu et après, tu me diras ce que tu veux qu'on fasse. Je t'aime et je suis prêt à tout pour toi ! Dis-je, larmoyant.

Elle se retourne vers la fenêtre, puis réfléchis un instant. Elle regarde le parc en face de l'immeuble, il y a des gens qui s'y promènent avec leurs enfants. C'est l'hiver, certains s'envoient des boules de neiges, d'autres admirent juste les flocons tomber. Imaginer un petit garçon ou une petite fille, émerveillé par la vue de ses premiers flocons m'emplit d'une joie immense. Je veux vivre ces moments là avec elle. Je veux cet enfant avec Lia !

— Tu as raison, c'est une décision trop importante pour qu'elle soit prise dans l'émotion. Après les fêtes, nous verrons si toi et moi, c'est encore possible... Dit-elle, sans détourner le regard du spectacle qui se joue sous nos pieds.

The Women of the Family - Tome 1 : AmeliaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant