Chapitre 5

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Vexé, il l'attrapa par le bras, il mit trop de force dans son geste et la fit tomber à terre. Elle était terrorisée par une réaction aussi violente, elle n'osa plus bouger. Les fesses dans l'herbe fraîche de la nuit, elle le regarda de ses grands yeux écarquillés. La masse de muscles tendue la surplombait le visage figé par la colère.






Au plus grand soulagement de Lou, quelqu'un vint s'interposer. Elle reconnut tout de suite son sauveur attitré, le mystérieux inconnu de Yellowstone. La brute prit conscience de ses actes et partit sans plus attendre.

- Et bien, c'est la deuxième fois que je te sauve la mise, lui dit-il en lui tendant une main pour se relever.

- Euh oui... merci encore... je ne sais pas ce qui aurait pu se passer cette fois, acquiesça t-elle en parlant pour elle-même.

- Ce gars est vraiment un crétin mais pas méchant, ne t'inquiète plus de lui. Je pense qu'il a compris et qu'il s'en voudra une fois qu'il aura dessaoulé. Viens, je te raccompagne chez toi, la réconforta t-il en la prenant par les épaules.

Elle frissonna, la température s'était rafraîchie, ou peut être était-ce le choc de ce qu'il venait de se produire, elle réalisait à peine. Il lui mit sa veste sur les épaules. Elle se lassa guider sans un mot, le suivait à travers les groupes de lycéens alcoolisées, tout en le tenant par son t-shirt. Elle avait bizarrement confiance en lui, il l'apaisait.

- Au fait, comment tu t'appelles, tu me l'as pas dit la dernière fois qu'on s'est vu, osa t-elle lui demander. Et je suppose que tu sais comment je m'appelle, comme toute la ville.

- Oui, en effet, Lou, la taquina t-il. Moi, c'est Castiel, mais tu peux m'appeler Cass si tu veux.

- C'est pas commun comme nom, d'où est-ce que tu viens ? D'ailleurs je me demandais, comment ça se fait que tu parles aussi bien français.

- Ouais, je sais, c'est un nom qui n'est plus très répandu. En fait, je parle beaucoup de langues, j'ai beaucoup voyagé.

- Ah bon, alors en plus d'être sauveur des damoiselles en détresse, tu parles plusieurs langues couramment ! Je suis tombée sur la perle rare, ironisa t-elle pour essayer de se détendre.

Un frisson la traversa malgré la veste supplémentaire, secouant tout son être.

- Nous sommes bientôt arrivés à la voiture, n'attrape pas froid dès ton premier jour, ça serait dommage que tu ne viennes pas en cours demain, dit-il en sortant ses clés.

Arrivés à la voiture, il lui ouvrit la portière. Elle fut charmé par son geste et le modèle de la voiture, une vieille Mustang.

- Merci, tu es un ange.

- De rien, on me le dit souvent, rétorqua t-il le sourire aux lèvres.

Dans le véhicule, elle joua avec les boutons de la radio afin de trouver une station. Comptine d'un autre été de Yann Tiersen, une des célèbres bandes son d'Amélie Poulain, se distingua des grésillements désagréables. Elle la reconnut dès les premières notes. Elle était aux anges. Cette musique faisait naître en elle une vive émotion à chaque fois qu'elle l'entendait. Des réminiscences de moments heureux et nostalgiques de son enfance l'emportèrent. Elle se sentit transportée dans son passé.

- J'adore cette musique, elle me rappelle tellement ma vie d'avant, en France, avec mes amis, et ma mère, avoua t-elle tout bas.

- Ça doit te manquer, et surtout de ne plus vivre avec elle.

Elle fut très surprise qu'il parle ainsi, aussi ouvertement. C'était le seul qui avait osé en parler. Tous ses camarades et même son père, évitaient le sujet ou ne savaient comme l'aborder sans qu'elle ait les larmes aux yeux dans l'instant.

- Excuse-moi, je ne voulais pas te blesser. Tu semblais juste vouloir en parler.

- Non, c'est bon, ne t'excuses pas. Je suis seulement étonnée que tu ais lancé le sujet. Pour tout te dire, je n'en ai encore parlé à personne. C'est vrai, ma mère me manque. Instinctivement, elle prit l'ange dans sa main, elle le vit suivre son geste avec attention. C'est ce qui me relis encore à elle, finit-elle par expliquer. Elle me l'a donné avant de mourir.

Submergée par l'émotion, sa voix s'étrangla sur le dernier mot. Mourir. Sa mère était morte. C'était la première fois qu'elle le disait à haute voix.

- Ne t'en fais pas, tu n'as pas besoin de tout me dire, je comprends.

Elle n'en revenait pas de parler aussi librement avec lui. Elle se livrait à lui, elle n'avait plus besoin de porter sa carapace. Il lui paraissait étrangement familier. C'était facile de parler en sa présence. Elle n'avait pas remarqué que la voiture était arrêtée. Ils se trouvaient déjà devant la maison. Le trajet était passé très vite. Elle lui adressa un grand sourire et le remercia. Il lui en rendit un tout aussi radieux et lui souhaita une bonne nuit.

Grâce à lui, elle rentrait heureuse de cette soirée. Il l'avait rendue agréable. En poussant la porte d'entrée, elle garda son humeur légère. La maison était silencieuse, seul Franck était éveillé devant la télévision dont on entendait à peine le murmure. Il attendait son retour avant d'aller dormir. L'homme anxieux la questionna brièvement sur le déroulement de la fête. Elle lui répondit succinctement qu'il devait y avoir tout le lycée, qu'elle avait bien fait d'y aller parce qu'elle avait fait beaucoup de nouvelles connaissances. Il était ravi d'apprendre que sa fille réussisse à s'intégrer aussi rapidement. Ensuite, il alla se coucher, content d'avoir encouragé cette jeune fille réservée à sociabiliser. Elle en fit autant.

Cette nuit là, elle ne rêva pas de sa mère. Elle avait, à la place, revécu les moments forts de la soirée, les nombreuses rencontres faites avec Sunny, le cadre naturel magnifique, la réaction imprévisible de Robby et le retour, accompagné de Castiel. Elle revivait la discussion qu'ils avaient eu. Elle s'interrogea alors sur des paroles qu'il avait prononcées.

Comment pouvait-il comprendre la peine qu'elle ressentait d'avoir perdu sa mère? Avait-il lui aussi perdu quelqu'un de proche?

Cet éclat de conscience la réveilla. Ces derniers mois, obnubilée par ses propres malheurs, elle ne faisait plus attention aux autres. C'était une réaction bien éloignée de son caractère habituel. Elle avait échangé des réflexions très personnelles avec lui et elle en savait si peu sur lui, elle ne connaissait pas son histoire. Tout ce que elle avait appris se résumait à son prénom, son penchant pour lui venir en aide et sa facilité pour les langues étrangères.






Média: la musique qui passe à la radio (Comptine d'un autre été)



Il s'agit d'un chapitre un peu court mais très important. Dites moi vos hypothèses, 🤔 mais qui est Cass?

Mon angeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant