C'est au rayon Poésie de la bibliothèque que nous nous sommes retrouvés...jamais je n'avais été aussi excitée. Je portais pour l'occasion ma petite robe de pyromane (je comptais bien lui mettre le feu), celle avec un laçage dans le dos. J'avançais sur mes talons de douze centimètres, la démarche chaloupée, un roman sous le bras, prête à le ranger. Je faisais mine de ne pas le voir (le beau brun, pas le roman)...mais nous connaissions tous les deux la raison de notre présence dans ces lieux. Il me laissa m'approcher et lorsque nos corps furent assez prêts l'un de l'autre, quand nos souffles s'entremêlèrent, il me prit par la taille. Le livre tomba sur la moquette épaisse...il me plaqua contre le mur... là où personne ne pouvait nous voir et commença à m'embrasser. Ses doigts glissaient sur moi avec habilité, et déjà je ne pouvais m'empêcher de gémir. La saveur de sa bouche et la douceur de ses lèvres réveillaient en moi des désirs enfouis depuis trop longtemps.
Rapidement, je me retrouvais à moitié nue...avec pour paravents les interminables allées de livres de cette bibliothèque municipale.
Il se mit à genoux devant moi, et me lança un regard ardent, un de ces regards qui vous demande, "Tu m'autorises à te donner du plaisir ?"
Je baissais les yeux sur lui pour l'encourager. Alors que sa bouche allait se poser sur mon intimité la plus secrète, que mon désir était au sommet des montagnes russes...il me dit :
— C'est quand même très poilu !
Très poilu. Je venais d'entendre "très poilu". Ces deux mots me sortirent instantanément de ma torpeur.
— Je vois que l'hiver est passé par là !
Qu'est-ce qu'il me dit lui ?
—Vous voulez l'intégral ou le ticket de métro ?
L'esthéticienne vient de terminer son massage, et mon retour à la réalité est bien moins agréable que ma rencontre secrète avec le beau brun ténébreux de la bibliothèque. Ça fait des mois que je fantasme sur lui, et pour une fois qu'on avait rencard, il a fallu que Bérengère Duboul, l'esthéticienne de la rue des épices me casse mon coup. Soudain, je réalise qu'en plus de m'avoir réveillée, elle m'a peut-être entendue dire des choses, prononcer des mots, ou même. Oh mon Dieu ! Gémir !!! Elle m'a certainement entendue prendre du plaisir dans mes ébats clandestins.
-Depuis combien de temps êtes-vous seule maintenant ? me fait-elle dans un sourire d'esthéticienne cherchant la confidence.
Mais pourquoi elle me demande ça ?
— Je ne sais plus, et puis, je me sens bien comme ça. Je n'ai de comptes à rendre à personne, je fais ce que je veux quand je veux...enfin, vous voyez ce que je veux dire, la vie de célibataire quoi...
— Oui, je vois.
— Pourquoi ?
— Si je me fie à la progression de votre pilosité, je dirais que ça fait longtemps que quelqu'un...
De quoi elle me parle celle-là ?
— Que quelqu'un ne vous a pas emmené à la plage finie par dire l'arracheuse de poils avec son air condescendant.
Comment peut-elle le savoir ? C'est le N.C.I.S ?
Elle regarde mon pubis avec ce mélange d'horreur et de fascination puis prend la spatule pour y étaler la cire. Lorsqu'elle arrache la première bande de ma toison je serre les dents pour ne pas l'insulter. Je la déteste ! Elle doit aimer faire du mal aux gens !
Elle me rappelle dans un sourire compatissant qu'il faut souffrir pour être belle.
Pétasse !
Je suis sûre qu'elle m'a entendue prendre mon pied à la bibliothèque.
Lorsque je rentre chez moi, je suis encore gênée par la question de l'esthéticienne.
Pourquoi suis-je seule ?
Probablement parce que je l'ai choisi, et probablement aussi parce que je n'ai pas su saisir l'occasion d'être en couple lorsqu'elle s'est présentée...enfin, l'occasion est un bien grand mot.
J'avais 25 ans, j'étais très amoureuse de Ludwig, un jeune allemand, étudiant à l'école des beaux-arts. Il était grand, brun avec de magnifiques yeux verts. Il avait de belles mains fines et délicates, faites pour dessiner ce qu'il y avait de plus beau en ce monde.
Son corps paraissait sculpté dans du marbre lorsque le mien ressemblait un essai de poterie réalisé par un enfant de cinq ans... En sa compagnie, je devenais belle, incroyable, différente.
Et puis, j'aimais sa façon de pousser la mèche de cheveux qui lui tombait sur les yeux, j'adorais lorsqu'il fronçait les sourcils pour trouver l'angle parfait...bon, ça fait un peu Leonardo Di Caprio qui peint kate winslet, j'avoue. Nous n'étions pas sur un bateau mais le naufrage se profilait tout de même à l'horizon.
Je dois dire que j'aimais lui servir de modèle car nos séances se terminaient souvent sur son bureau, sur la table ou contre un mur...Nous faisions l'amour partout, il était un amant formidable, j'ai découvert beaucoup de choses grâce à lui.
Un soir, j'ai voulu lui rendre une petite visite surprise à son atelier. Habillée d'une robe vaporeuse, les cheveux attachés en chignon et un peu de gloss sur les lèvres... je me sentais belle comme jamais. Le désir embellit les personnes finalement.
Dans son atelier, les lumières étaient allumées mais il n'était pas là...une cigarette fumait encore dans le cendrier... je l'ai appelé, mais pas de réponse. Je suis alors montée à l'étage, et là, dans la pièce qui lui servait de chambre, je l'ai surpris avec Stéphane, son professeur de dessin. Ils s'embrassaient à pleine bouche !
Inutile de dire que notre idylle s'est terminée ainsi.
Je ne l'ai jamais revu. Aussi, j'ai noyé ma peine avec mes copines du Gang des tricoteuses, à boire des mojitos et à confectionner des animaux en crochet pour les crèches et les hôpitaux.
VOUS LISEZ
Tu finiras seule...avec des chats. (Thriller Erotico-Comique)
ChickLitEmy Duval a un don, celui de se mettre dans la mouise en quelques minutes. Pourquoi tout ce qui semble simple devient alors un enchainement de catastrophes pour cette jeune quadra ? Ce ne serait pas un souci si elle n avait pas reçu un message d un...