Les heures de la mort

Première heure

Je prends une bonne respiration en m'étirant un peu les jambes et les bras. Cela ne va pas vraiment m'aider pour grimper, c'est seulement pour me préparer mentalement. Je suis plutôt douée en escalade, alors je suis confiante.  Je m'approche du rebord, m'agrippe à la première pierre qui me semble solide puis je commence la montée.

Ce n'est pas si difficile, mais c'est plutôt long car le puit est très creux. Ce qui me trouble, c'est que je sois encore en pleine forme après m'avoir fais tirer une balle dans la tête. C'est étrange, non? Je ne devrais pas être allongée au fond en train de souffrir? Je ne devrais pas être simplement morte? Le suis-je? Je secoue la tête pour m'enlever toutes ces pensées. Je dois me concentrer sur l'escalade , je repenserai à autres choses ensuite.

Plusieurs minutes plus tard, je suis à quelques mètres du haut. Je prends une courte pose en fixant le mur devant moi pour ne pas me blesser le coup. Mes muscles commencent à me faire souffrir, donc je ne dois pas attendre trop longtemps. Sinon, je risque de tomber.

Tout-à-coup, je sens quelque chose me tomber sur la tête et m'écorcher légèrement les bras. Je regarde au fond du puit pour remarquer qu'il s'agit de petite pierre. Quoi? Je lève la tête un petit moment juste pour apercevoir quelqu'un me regarder du haut de ce foutu trou. Je crois que c'est la silhouette d'un homme, mais je n'en suis pas certaine. Je n'attends pas une seconde de plus pour l'appeler à l'aide.

-Hey! criais-je. Aide moi!

-Non, répond-t-il calmement.

Je fronce les sourcils. Je suis folle ou il a réellement refusé de m'aider?

-Arrête de plaisanter, dis-je à son intention. Je vais tomber!

-Justement, ça fait longtemps que je n'ai pas vu un aussi bon spectacle. Il ne se passe pas grand chose d'intéressant ici. Juste le fait de t'imaginer tomber et te fracasser le crâne contre une paroi me réjouit.

Non mais c'est qui ce taré?! Il veut me voir mourir? Je lève la tête de nouveau pour lui dire non-gentiment d'aller se faire foutre, mais il n'est plus là. Je soupire et me motive pour terminer ma montée. Lorsque j'y serai, je pourrai voir ce con et lui dire ma façon de penser. Oui, c'est un bon plan.

Je recommence donc à grimper. À peine deux minutes plus tard, je suis en haut. Je fais un dernier effort puis je me laisse tomber à l'extérieur du puit. Je reste allongée contre le sol en remerciant le ciel d'avoir survécu. En fait, si j'ai survécu. J'ai totalement le souffle coupé, mais ce n'est pas grave. J'ouvre les yeux et regarde autour de moi pendant que je calme ma respiration.

Je suis dans une forêt. Je n'ai aucune idée de comment je suis arrivée ici, mais tout me semble normal. C'est ce que je pensais jusqu'à se que je vois le ciel. Il n'est pas bleu clair comme il est censé l'être. C'est une sorte de teinte orange, et pas un joli orange. Un orange qui exprime de la peur et du désespoir. Mais surtout, il exprime la mort.

J'entends des pas s'approcher derrière moi, mais je suis encore trop faible pour me protéger. Je pense à l'homme qui m'a parlé tout-à-l'heure. Je l'imagine grand et gros, avec une barbe et une haleine de chien. Un psychopathe avec un couteau prêt à me massacrer sans aucun regret. Je tourne finalement ma tête en sueur et soupire, presque de soulagement. C'est un garçon de mon âge, l'air aucunement dangereux. Pourtant, son sourire en coin et ses yeux perçant d'un vert magnifique me font douter de son innocence. Je me tourne complètement vers lui.

-Qui es-tu? demandais-je sur mes gardes. C'est toi qui m'a parlé quand j'étais dans le puit?

-Oui, et celui qui ta lancé des pierres. Enchanté de te rencontrer. Avoir su que tu étais aussi sexy, je t'aurais aidé.