La navette de transport partait. J'apprenais terriblement ce voyage qui pourrait être mon dernier. Puis je réfléchis un instant et me dit une chose. Ce voyage n'avait aucune raison de me paniquer plus que les autres. J'avais vécu dans le danger permanent de mourir brûlé, asphyxié ou encore écrasé pendant des années et ce sans arrêt. Si je mourrais aujourd'hui je n'avais pas à me plaindre. J'avais suffisamment échappé au mauvais sort durant ma vie. Bien ! Cette navette n'avais pas de pilote et se dirigeais uniquement grâce à des appareils de guidage. Aucune raison de s'en faire !
Je n'avais pas envie de penser que mettre ne serait-ce qu'un membre d'équipage en plus dans ce vaisseau serait un risque inutile. Ni de penser que j'étais pour eux un élément sacrifiable au même titre que mes prédécesseurs. Ni même que les chances de mourir en route était sans doute plus élevées que d'arriver à bon port au vu de la distance à parcourir et des conditions climatiques. Non. Je n'avais aucune raison de m'inquiéter.
Pourtant, l'approche de la surface rouge brunâtre me faisait crisper mes doigts. Des volets de protection se fermèrent sur les hublots. Sans doute pour protéger l'appareil de la pression immense qui allait bientôt s'exercer sur lui. J'étais aveugle dans ce cylindre de nickel, d'aluminium et de titane. J'attendais plein d'appréhension un quelconque signe d'entrée dans l'atmosphère. Mais rien ne venait. Sans doute devions-nous nous repositionner dans l'orbite pour plonger au bon endroit. Je n'avais même pas eut d'explication ou de briefing concernant le vol. Mais qui était à l'origine de la logistique de cette foutue mission !?
Je tentais de me calmer les nerfs en pensant à autre chose. Ils m'avaient choisi moi. Pourquoi donc ? J'avais eu beau chercher, je n'avais pas pu obtenir les identités de mes prédécesseurs à ce poste. Soudain une terrible idée me vînt en tête. J'avais mis plus d'un an à arriver. Or celui qui occupait ce siège avant moi ne devait pas être mort il y a si longtemps que cela au vu du temps qui s'était écoulé depuis le début de la mission et le nombre d'hommes qui avaient officié ici. Cela signifiait que j'avais été choisi pour être envoyé là avant la mort de cet homme. Et donc qu'ils avaient anticipé sa faible espérance de vie. Cette perspective ne me réjouissait guère.
Mais pensons à autre-chose. Pourquoi moi parmi les milliers de spationautes qui sillonnaient l'espace entre la Terre et la Lune ? Les voyages interstellaires étaient longs et j'avais eus beaucoup de temps libre durant les quinze dernières années. Je m'étais donc attelé à étudier par correspondance des choses qui pourraient me servir dans mon travail via des cours dans une base de données. J'avais par la suite décroché des concours me donnant accès à des CC ou Certificat de Capacité. Un diplôme simplifié démontrant une maîtrise dans un domaine précis. J'avais donc obtenu deux CC : un de « médecine d'urgence » et un de « mécanique spatiale ».
Ces diplômes n'étaient pas reconnus sur Terre car bien trop léger pour s'apparenter à un doctorat ou à une maîtrise en ingénierie. Mais j'avais de la pratique ce qui me rendait compétent. Je pouvais comprendre qu'un CC en mécanique ou en électronique puisse aider sur un Curriculum vitae pour ce poste mais ce n'étais pas un premier critère d'engagement. S'ils voulaient un mécanicien ou un ingénieur, pourquoi ne pas choisir quelqu'un du métier ? Quant à la médecine je ne voyais pas ce qu'elle venait faire là. Peut-être que les risques encourus allaient nécessiter des soins réguliers.
Un éclair de lucidité m'éloigna de mes réflexions. Je me mis à allumer l'écran de contrôle et à rechercher dans les dossiers en mémoire. On m'avait dit avant de partir que je trouverais une vidéo de briefing plus précis sur ma mission pendant mon vol. Je continuais mes recherches concentré sur ma tâche quand une violente secousse m'enfonça dans mon siège. Je resserrais ma ceinture et m'accrochais aux accoudoirs. Les turbulences ne firent qu'empirer comme si nous roulions sur la pente d'une falaise. Les parois de la carlingue tremblaient violemment et j'eus la sensation que mon siège allait se décrocher du sol.
Je serais les dents et pris mon mal en patience quand un froissement métallique raisonna dans la coque. L'armature du vaisseau était en train de céder sous la pression. Puis un violent choc fit dévier la navette et les lumières s'éteignirent un instant avant de s'allumer de nouveau. J'avais subit beaucoup de vols difficiles et des entrées dans l'atmosphère mouvementées. Mais je n'avais jamais vécu une si terrible expérience. Le simple fait de ne pas avoir de visuel sur l'extérieure était extrêmement anxiogène. Mais je pouvais le supporter. J'avais été entrainé pour rester détendu dans une pièce sombre dénué de sons durant six heures.
Mais imaginer que la navette qui me paraissait désormais si frêle ne se brise en route m'était insupportable. Il n'y avait rien que je puisse faire. Peu à peu je sentais mon propre poids m'écraser vers le sol. Je ne sus pas si la distance à parcourir était effroyablement grande ou si la navette était effroyablement lente mais ce voyage me parut interminable. Si bien que je finis par m'habituer au vacarme et en arrivait au point de lancer la vidéo. Malheureusement elle ne mentionnait que des détails concernant la pression, la force gravitationnelle et le vague intitulé de mon travail qui était « d'entretenir des armes ».
J'appris néanmoins un détail important. La force gravitationnelle étant très importante, la station pratiquait régulièrement des manœuvres pour y palier. Tout d'abord une montée rapide et vertigineuse vers la couche supérieure de la planète mettant à rude épreuve les capacités de résistances des matériaux et des occupants. Puis, dans un second temps une redescente bien plus lente causant une force de poussée inverse qui compensait une partie de la gravité et permettait de vivre à bord. C'était pile entre ces deux phases, à l'altitude maximale, que je devais trouver la station. Ce qui en théorie écourtait la durée du voyage.
Puis les instruments se mirent à réagir. La navette captait un signal. Nous étions, ou du moins j'étais proche de la station ! Enfin ! Mais une autre alarme cette fois bien plus inquiétante me parvînt. De nouveaux chocs violents secouèrent la navette et firent clignoter les lumières et les instruments. Les assauts au ce qui y ressemblais étaient de plus en plus violent et fréquents. Cette fois c'était certain, la coque allait céder. Un objet heurta la navette violemment et me projeta le visage contre la vitre. J'étais sonné, et le temps que je reprenne mes esprits quelque chose s'était passé. Je n'aurais su dire quoi, mais les conditions de vol redevinrent normales. Aussi normal que pouvait être ce type de voyage bien entendu.
Mon crâne saignait et je lâchais un juronsjuste avant d'entendre le sas du la navette se connecter. Nous y étions. AHope. Je me détachais et tombais maladroitement au sol sous mon poids devenutout sauf agréable. Je comprenais désormais les raisons de mon entraînement en hypergravité durant mon voyage d'un an. Je me relevais tant bien que mal en forçantsur mes jambes et atteignit la porte pour la déverrouiller de mon côté. Puis,avant que je ne puisse l'ouvrir totalement le levier bougea de lui-même commesi quelqu'un l'avait tourné de l'autre côté. Le rond métallique s'écarta pourlaisser apparaître un adolescent qui devait avoir un peu moins d'une vingtained'années. Qui était-ce ? On ne m'avait rien dit sur un autre habitant deHope ! J'avais la nausée. Je me sentis partir rapidement et mes jambes nesoutinrent plus mon poids. Avant de perdre connaissance j'aperçu plusieurssilhouettes entrer et se dresser autour de moi.
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Jupiter - The Silent Planet
Science FictionL'humanité est en déperdition. Et sa soif de source d'énergie l'a amené à coloniser la Lune. Désormais nous visons Jupiter pour en exploiter la couche inférieure. C'est là que nous avons découvert un ennemi mortel contre lequel nous avons développé...