11. Le fracas onirique de la réalité

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Musique : Sound of Jupiter (obtenu par conversion des fréquences lumineuses émises par Jupiter en fréquences sonores audibles par la NASA)


   Un son léger. Presque agréable mais peu trop sourd me berçait. C'était comme un bruissement métallique quasi imperceptible. Je n'avais jamais entendu pareil son de ma vie. Cela n'avait rien du frottement du vent sur la coque que j'entendais depuis des semaines déjà et qui me provoquait des insomnies. Puis au sein de ce son, noyé, je perçu quelque chose d'autre. Quelque chose de plus lourd qui était à la limite du supportable pour mes tympans. Comme si ce simple son était le fruit d'une force écrasante et sans limite jouée par nul autre instrument que Jupiter elle-même. Désormais ce chant n'avait plus rien de léger. Il était presque assourdissant. Une puissance inconnue dont les basses raisonnaient à travers ma poitrine.

   J'étais à la fois émerveillé et terrifié par ce son et ce qu'il pouvait signifier. C'était terriblement oppressant. J'ouvris les yeux et me retrouvais dans ma petite cabine désormais familière. Je n'y passais pourtant que peu de temps au vu de mes occupations. Mais quelque chose semblait différent de d'habitude. Un étrange sentiment de malaise m'envahissait tandis que le son persistait dans mes oreilles. Puis le mur à ma droite se mit à trembler. Trembler comme jamais il ne l'aurait dû. Comme un simple morceau de taule soumis à des coups de marteaux piqueurs. Mais l'épicentre était en plein milieu de la plaque. Elle se tordait d'avant en arrière à une vitesse accélérée. Au rythme de ce son étrange.

   Je m'approchais lentement et avec la plus grande des prudences, et dès l'instant ou ma main toucha la paroi, elle cessa de bouger. Je n'y comprenais rien. Puis ce fut au tour du mur de l'autre côté de la cabine. Cette fois une onde d'angoisse remontât de mes entrailles. Cette paroi n'était pas d'une simple plaque, il s'agissait d'un véritable mur de métal de quinze centimètres d'épaisseur conçu pour isoler la station de l'atmosphère de Jupiter en cas de dépressurisation de la cabine. Jamais elle n'aurait du pouvoir trembler ainsi. C'était impossible. Alors que mon esprit perturbé se perdait dans de folles théories une nouvelle nuance fit son apparition dans la texture de ce son si dense. Cette fois je reconnus le chant de la créature que nous avions rencontré dans la tempête. Le titan dont la voix laissait deviner la taille sans limite. Le plafond se tordit alors dans un terrible crissement et un énorme renflement apparut. Le renflement se déplaça par à-coups tandis que le métal reprenait sa forme après son passage.

   Comme si une créature avançait insidieusement sous un morceau de tissu. La chose dont la taille approchait celle d'un fulguropode atteignit le mur puis la porte qui subit le même sort sans aucune limitation due à sa moindre épaisseur. Je me plaquais contre le coin opposé de la pièce en observant ce phénomène d'une fébrile et maladive obsession. J'étais paralysé, tétanisé, incapable de faire quoi que ce soit. Les chants redoublèrent d'intensité, me vrillant les tympans tandis que de nouvelles déformations structurales écrasèrent un peu plus l'espace de la cabine. Me recroquevillant, j'évitais tout contact avec ces choses inconnues et défiants les lois de la physique. Je m'apprêtais à hurler quand une nouvelle voix me ramena à la lucidité.

   -   Adam ! Adam réveille-toi !

   J'ouvris les yeux et me redressais en catastrophe. Ma cabine était parfaitement en ordre et Maria me secouait pour me réveiller. Un simple cauchemar. Je remarquais alors l'alarme stridente qui raisonnait partout dans la station.

   -   On a un problème Adam ! Lève-toi ! Cria-t-elle.

   J'obéissais on la suivi dans le couloir jusqu'à la salle des commandes. Des voyants clignotaient en rouge un peu partout sur la console et sur les écrans de contrôle.

Jupiter - The Silent PlanetOù les histoires vivent. Découvrez maintenant