19- Thomas

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Thomas

Peut-être est-il temps de tourner la page ? Margot n'est plus que l'ombre d'elle-même.

Comment ont-ils pu en arriver là ? Lui, à donner son âme, son corps (quoique très agréable) pour assouvir les dessins de son amie ; elle, le coeur noir de vengeance, les pensées calcinées, laissant tous les deux dans leurs sillages une odeur de mort dans leur relation. Thomas sait qu'il a joué les derniers pions et il a lamentablement perdu.

Assis sous un arbre dans le parc, à l'affut des regards, le jeune homme observe les enfants jouer. Les cris stridents des gamins ne le dérangent pas. Au contraire, ils apaisent le flot de ses sombres pensées. Deux petites filles du même âge, probablement des soeurs jumelles, s'amusent à se jeter dans les bras de l'autre. Elles prennent à tour de rôle un air faussement peiné avant d'éclater d'un rire franc. Si seulement lui aussi pouvait être aussi insouciant et libre !

Et dire qu'il est passé à côté de deux jeunes femmes qui lui plaisaient réellement : la candide June et la volcanique Félicie. Quoiqu'il ne soit pas certain d'arriver à autre chose que des joutes verbales en ce qui concerne la rouquine ! Mais en dépit de son caractère de feu, elle possède un charme fou. Se braquerait-elle s'il essayait de la draguer maintenant qu'elle n'est plus dans la course ? Il n'est pas question de tomber amoureux, simplement d'oublier Margot, simplement s'enivrer de l'odeur d'une autre.

Croquant dans son hot dog dégoulinant de ketchup, Thomas apprécie chaque bouchée comme si elle était la dernière de sa vie. Il essuie ensuite ses mains poisseuses avec la serviette en papier qu'il jette dans la poubelle. Il ne prend pas la peine de vérifier si son garde du corps l'a suivi, il connait pertinemment la réponse.

En arrivant au Palais, un sentiment d'immense vide le prend à la gorge. Il est seul. Le vers de ce poète Lamartine lui revient en mémoire : « un seul être vous manque et tout est dépeuplé ». Tout prend son sens. C'est ce qu'il est, il est démuni et dépouillé de l'être aimé.

Il monte les marches 4 à 4 sans prêter attention à Ava qui jalonne ses talons.

— Thomas, j'ai besoin de te parler, dit-elle

La voix de la jeune femme n'est pourtant qu'un écho lointain dans les pensées du prince.

— Thomas, insiste-t-elle, plaçant la main sur son épaule pour l'interpeller.

— Pardon...Excuse-moi, je ne t'avais pas entendu.

— On discuter 5 minutes ? Ce ne sera pas long !

— Oui, viens.

Ils entrent dans le Salon Rêverie, qui par chance, est vide.

— J'ai besoin de savoir...La fois où tu m'as invitée à manger, c'était dans le but de me soutirer des informations, n'est-ce pas ?

Ses yeux ourlés de longs cils lui envoient des éclairs. Il n'aurait jamais cru voir en elle une telle énergie, pourtant à cet instant précis, elle semble prête à bondir sur lui pour obtenir ce qu'elle désire.

— Ava...répond-il tendrement.

— C'est pour cela que tu m'as soulée ? siffle-t-elle, des accents de colère dans la voix. Parce que Gabriel t'avait dit que je ne tenais pas l'alcool ? Parce qu'il n'avait pas confiance en moi ?

— Ce n'est pas aussi simple ! Calme-toi et laisse-moi t'expliquer !

— Non ! J'en ai assez entendu !

Sur ces mots, la belle brune tourne les talons et sort de la pièce en claquant la porte derrière elle. 

À suivre...Marie

LOVED #wattys2017Où les histoires vivent. Découvrez maintenant