45 - Run to you

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Alessio

- Tu restes ici ?

Morena abaissa son livre et me sourit chaleureusement.Si ma petite-soeur croyait me duper, elle se trompait foutrement.Flavio et elle se disputaient la veille parce qu'elle refusait de rentrer à Strasbourg poursuivre ses études et elle avait eu cette phrase. Malheureuse... douloureuse phrase.

« Je veux être là si le pire arrive à mon frère ! »

Huit jours de passés et aucun changement. Sa santé ne se trouvait pas en danger donc le médecin restait optimiste. Je m'assis aux côtés Micaela, la mère de Dorotea, qui tricotait à l'abri du soleil sous un grand saule. La paix du lieu nous entoura.

- Tu devrais manger un peu plus, me conseilla-t-elle.

Je ne discutai pas. Plus les jours passaient, plus je me rendais compte des faiblesses et des forces insoupçonnés en chacun.Même en moi-même.

- Lorsqu'elle était enfant et que tu t'absentais trop longtemps, elle arrêtait de manger, raconta-t-elle sans quitter du regard son ouvrage. Et tes amis passaient la journée avec elle. Même Flavio et Endrigo. Eux qui semblaient la supporter autant qu'un moustique trop collant.
Nos rires se rejoignirent. Légers et rassurants.

- J'ignorais qu'ils allaient la voir.
- Déjà quand nous étions gosses, nous voyions bien l'importance qu'elle avait dans ta vie, me surprit Flavio dans mon dos.

Je le dévisageai, surpris.

- La première chose que tu demandais quand tu rentrais de tes cours (il toussota et l'imita exagérément) : comment était la journée de Tea ? Si tu apprenais que quelqu'un l'avait blessé, tu t'enfermais jusqu'au lendemain.

Je me souvenais de ces moments. Mon impuissance que je ne gérais pas.

- Suis-je trop excessif ? Murmurai-je plus pour moi-même que pour mes interlocuteurs.

- Tu as toujours été comme ça lorsque tu aimes, commenta mon cadet de cinq années. Et tu n'as jamais été aussi excessif avec une autre qu'elle.
- Mais tu dois accepter que parfois, tu ne pourras rien contre le destin, intervint Micaela. Aussi cruel que ce soit.

Un frisson me parcourut l'échine. Je ne voulais pas de présage. Je voulais la certitude que l'avenir m'ouvrait ses bras.
Je fermai les yeux en me rendant compte du chemin que prenait mes pensées. Accepter... une notion que je ne maîtrisais absolument pas et qu'une part de moi ne désirait pas.

- Alessio !

Le hurlement de Morena nous fit tous sursauter. Je sautai sur mes pieds et l'observai, le cerveau incapable de réfléchir.

- Tu dois venir !

Elle me tira par la main. Je suivis, amorphe. Elle ne paraissait pas défaite. Me ménageait-elle ? Je déglutis difficilement.

- Morena ?
- Dépêche-toi ! Me pressa-t-elle.

Je ne me souviendrai que d'un moment. Un unique instant.
Le médecin se décala. Il me semblait qu'il parla un moment mais je ne revenais pas sur ses paroles. Non ! Je ne voyais qu'elle. Ses yeux ouverts sur le plafond. Je m'approchai d'un pas rapide et saisis sa main inerte sur la couverture. Ses lèvres s'étirèrent en un maigre sourire puis elle se tourna vers moi et son visage redevint inexpressif.
Je jetai un regard paniqué au médecin qui lui ôtait les quelques fils encore à son bras.

- Elle va se réveiller brièvement à intervalles réguliers. C'est tout à fait normal.

Un peu rassuré, je remercia Endrigo qui poussa l'un des fauteuils près du lit. Je ne voulais pas la lâcher. Pas maintenant qu'elle me tenait enfin.

Memento Mori - Série FaidaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant