Toujours dans ce café, j'essaye d'imaginer comment cela a pu arriver. Comment Cyrius a pu atterrir dans la Chambre de Samira ? Pourquoi voudrait-il la voler ? Malgré ses problèmes d'argent, il n'irait jamais la voler. Le peu de fois où j'ai discuté avec lui lors des soirées mondaines, il ne me semblait pas être un voleur. Il est peut-être imbu de sa personne, nombriliste, mais pas un voleur.
Qu'est-ce qui a bien pu t'arriver Cyrius ?
Je décide de quitter le café. Je paye ma note, puis quitte le lieu. Je conduis vers mon jardin d'Eden. Mon atelier.
Mon matériel est maintenant prêt à l'emploi. J'ai besoin de calmer la vague d'émotions qui me submerge depuis quelques temps. Je ne veux pas extérioriser tout cela sur une toile, se serait un grand fouillis. Je dois m'être à profit tout cela. Alors, je m'empare d'un crayon.
Un coup de crayon par ici, par là.
Mon poignet ne s'arrête à aucun moment.
Lorsque je pose enfin mon crayon pour admirer le squelette de mon futur tableau, je lâche un long soupire. Je ne m'étais même pas rendu compte que je retenais mon souffle.
Quelques coups de rayons pour rectifier certaines lignes plus tard, je peux entamer ma peinture.
Un tableau....
Je reprends cette fois-ci plus léger. Je me laisse porter par les traits abstraits, les couleurs qui animent la forme. Puis soudain je ferme les yeux et souffle. Je les ouvre après un moment et me rends compte que j'essaie de reproduire ce vert. Une couleur indéfinissable, pratiquement impossible à copier, pourtant je m'acharne. Je mélange, pose, réessaye.
Je ne vois plus le temps passer. Seule cette couleur m'obsède. Je continue encore et encore. Tout à coup dans un excès de rage, je me lève et balance tout par terre.
Je quitte la pièce. Je conduis jusqu'à une tour de verre. Je m'arrête un long moment me demandant qu'est-ce que je fais ici. Pourquoi suis-je venu à cet endroit ? On pourrait croire que cela me plaît : m'infliger des souffrances sans cesse. Et pourtant je finis par arriver dans le bureau de cette personne.
Belle et diabolique...
Aussi belle qu'une pomme empoisonnée...
Aussi vicieuse qu'un serpent...
Elle a la langue du diable...
Mais je sais que sans elle je ne pourrai pas atteindre mon but.
L'atteindre.
- Bryson ! Que me vaut cet honneur ? Me dit-elle.
- J'ai besoin de toi.
Un sourire orne ses lèvres couvertes d'un rouge à lèvre rouge sang et ses yeux se remplissent de malices.
Je sens alors qu'un nouveau mal va s'abattre sur moi.
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Il me scrute surpris. Je sais que l'assaillir avec de telles questions, me fait passer pour une folle mais j'ai besoin de savoir comment il fait et pourquoi il l'est.
Je ne sais pas ce qu'il attend pour me répondre. Il est vrai que je n'ai jamais réellement pris le temps de discuter avec aucun de mes employés à part pour le travailler. Mais j'ai ce besoin viscéral de comprendre, de savoir pour peut-être pouvoir être aussi heureuse. Après un moment il finit enfin par me répondre.
- Je... Je n'ai pas de secret. Je me contente de prendre ce que la vie me donne. J'apprécie chaque jour et chaque chose comme ils sont, bon ou mauvais. J'ai vite compris que la vie ne nous donnait pas souvent le choix et qu'il fallait la vivre telle qu'elle est. Parce qu'il y aura toujours des hauts et des bas et qu'il fallait apprendre à vivre avec cela.
J'ai entendu ce qu'il a dit, reste à voir si je l'ai compris. Alors je le questionne encore :
- Cela donne l'air de subir la vie, non ?
- Non, je souris au petit bout de bonheur du quotidien. Je reste optimiste. Je ne m'apitoie pas sur mon malheur. Je préfère me dire que telle est la vie et essayer d'avancer. Aller de l'avant pour pouvoir profiter des bons côtés de la vie.
C'est comme si ses paroles m'étaient directement adressées. Je me sens concerner, comme s'il essayait de me faire passer un message. Mais je sais que personne n'est au courant pour lui. Alors je le congédie et je lui dis d'annuler tous mes rendez-vous de la journée que je dois partir.
M'éloigner avant que ma tête ne soit assiégée de questionnements incessants.
Partir avant qu'ils ne constatent que je suis faible. Je me saisis de mon sac et quitte ma tour.
Je roule. Je ne cesse de penser à ses paroles.
Aller de l'avant
Cette phrase ne cesse de tourner en boucle dans ma tête.
J'arrive enfin. Je rejoins le box que je loue à l'autre bout de la ville. J'ai peur de l'ouvrir. J'ai peur car je sais... Je sais que ce creux dans ma poitrine se creusera encore plus à la vue du contenue de ce box. Nos souvenirs me frapperont, me noieront. Mais, je dois le faire. Je me dois de le faire au moins une fois après ces cinq années. Je souffle et ouvre le box. La lumière s'allume automatiquement. Je ferme la porte et m'avance vers la scène et regarde spécialement aménager par Cyrius. J'observe cet instrument qu'il avait l'habitude de jouer pour accompagner mes mouvements. Je ressens tous ces sentiments qui autrefois me submergeaient, me renversaient et faisaient de moi cette femme sentimentale mais heureuse. Je ferme les yeux et laisse les souvenirs se disputaient, heurtaient mon cœur, se jouaient de moi et me narguaient une énième fois.
Les larmes sillonnent mes joues. Je m'écroule à terre. Ma peine et mon désespoir résonnent dans le box. Un pique transperce mon cœur.
Pourquoi t'ont-ils arraché à moi ? Pourquoi je n'arrive pas à me remettre de ta mort ?

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On s'est perdu
RomanceDes monts et des merveilles, c'est de cela qu'il rêvait avec cette femme insaisissable. D'amour et d'étreintes, elle en voulait encore de son amour perdu à jamais. Deux personnes en proie à l'impossible, se perdent dans les profondeurs de la mélanc...