Lila, Shira, Jaesa et Tasar.
Les deux Lady et la Princesse sont dans les jardins.
JAESA — Que pensez-vous du palais, Lady Lila ?
LILA — Je le trouve admirablement bien construit. Néanmoins, il y a beaucoup d'ornements, un peu trop à mon goût. C'est pourquoi j'apprécie particulièrement le domaine de votre époux, sœur.
SHIRA — Il n'est pourtant en rien comparable au Palais Royal, mais il est vrai que le sixième Prince a su parfaitement bien embellir le territoire que sa Majesté lui a offert.
LILA — Tout est beau ici ! Les Landes sont si monotones et identiques. A la Capitale, les fleurs se bousculent, les couleurs pétillent, et il n'y a aucun endroit terne. C'est lumineux, un vrai vent de fraîcheur !
JAESA, sur le ton de la confidence — Petite, on me narrait des histoires sur les Anges et leur demeure. Je croyais en être un, tant ce qu'ils me décrivaient était semblable à ce palais. J'avais l'impression de me noyer dans les Cieux. (la gorge serrée) Je me suis fourvoyée. Quand nous sommes enfants, nous ne percevons le mal. Nous ne nous rendons pas compte des mensonges et des complots. Nous ne nous imaginons pas qu'un étage en dessous de sa chambre un homme se fait torturer.
LILA — Vous possédez de la rancœur. Nonobstant, votre rang est une source d'inspiration pour tous. Vous êtes assurément la Princesse la plus adorée de cette nation. Vos pensées sont trop sombres pour une femme tel que vous, votre Altesse.
JAESA — J'aime être une Princesse. Les gens s'agenouillent devant moi, je me sens importante. Je représente, je suis un symbole, nous connaissons mon visage dans toutes les contrées.
SHIRA — Mais ?
JAESA — Mais, je ne suis pas grand chose. Je ne peux sortir d'ici sans être entourée d'une troupe entière de gardes. Je n'ai pas d'amis non plus.
SHIRA — Ne sommes-nous pas vos amies, votre Altesse ?
JAESA — Oui, mais chaque amitié est éphémère. Vous, Lila, retournerez chez vous. Et mes gardiens ne me permettent pas souvent de vous rencontrer, Shira. (soupire) Tous les jours, le déroulement reste le même. Ils me lèvent très tôt et je vais me baigner seule, avant que ce soit au tour des invités masculins. L'aube n'est pas encore dressée. Puis, ils me préparent différents vêtements que je choisis soigneusement. Ensuite, ils m'apportent des plats variés et je décide duquel je veux. Ils les goûtent pour moi. Parfois, quelqu'un meurt empoisonné à ma place. Ils mènent l'enquête et, à la fin de la journée, le coupable est tué. Le matin, ils m'autorisent à galoper dans les bois de derrière. Inlassablement, ils m'obligent à effectuer le parcours sécurisé de la veille. Enfin, ils m'amènent à nouveau plusieurs plats, j'en choisis un et mange. Sans personne près de moi pour me divertir. L'après-midi, place aux leçons de tenue, d'épée, de langues. Ils m'apprennent à me comporter en véritable Princesse - comme si je n'avais toujours pas assimilé le protocole -. Quelquefois, ils m'enseignent la politique, même si je ne serai jamais Reine. Le soir, c'est le souper. Et ils me couchent tôt afin de me lever tôt. (s'éclaircit la voix) Voilà, indéniablement, mes journées. Comment pourrais-je avoir le loisir d'entretenir de quelconques relations ? Même mon amour, je ne le croise plus. J'ai essayé de le garder, mais je l'ai perdu.
LILA — Néanmoins, j'ai toujours songé à devenir une Princesse, il s'agissait d'un fort attrayant projet. Au vu du tableau que vous en faites, il me semble que votre vie est plutôt isolée. C'est regrettable.
SHIRA — Ne vous languissez-vous pas ?
JAESA — Disons que les servantes déblatèrent des commérages plus ou moins plaisants à entendre. Je connais la vie des grands de la nation, comme des plus modestes paysans.
SHIRA, le ton triste — Votre Altesse,...
JAESA, souriante — Ma vie a toutefois de bons côtés, alors je ne me plains guère.
LILA — N'avez-vous pas deux sœurs aînées ? Je n'en ai vu aucune.
SHIRA — Ah ! Je vois que tu ne t'es pas intéressée à la cour depuis que tu t'es mariée ! Les deux sœurs de son Altesse ont déjà des époux, des alliances.
JAESA — Effectivement, cela fait quelques années maintenant.
LILA — Et vos frères ? Ne peuvent-ils pas vous tenir compagnie ?
JAESA, avec une moue — Ils me rendent visite certaines fois. Mais ils sont occupés. Chacun a ses soucis, mes frères plus que d'autres. Par ailleurs, je suis contente qu'ils soient réunis au palais durant votre séjour, Lady Lila. Vous pourrez ainsi les rencontrer.
LILA — J'ai déjà eu l'occasion de converser rapidement avec eux. Ils m'ont l'air agréables, au contraire de ce qu'on dit à l'extérieur.
JAESA, rit délicatement — Ils se dévoilent rudes simplement avec les étrangers. Nous avons été élevés entre ces murs, sans côtoyer le reste du monde. Les formalités et les mondanités sont encore difficiles pour eux. (éclate d'un rire cristallin) Je me souviens de votre discussion mouvementée avec mon cinquième frère.
SHIRA, tout d'un coup, curieuse — Le cinquième Prince s'est montré, jusqu'à présent, certainement le moins pire d'entre tous. Mouvementée ? Faites-moi le plaisir de me raconter !
JAESA, espiègle — Dois-je narrer, ou vous laissez ce plaisir ?
LILA, à sa sœur — Pour résumer, nous ne nous entendons pas très bien.
JAESA — C'est peu dire ! Mais il ne faut pas lui en vouloir. Il est jeune et fougueux, Morran finira par se calmer.
SHIRA — Il vient souvent au palais de mon époux et il insiste toujours pour jouer avec lui au jeu des Dames d'Ethrian. Uniquement parce qu'il sait qu'il le battra ! Son Altesse Morran ne supporte pas de perdre, c'en est maladif.
Elles rient toutes ensemble. Mais Tasar vient gâcher ce cadre joyeux. Il accourt vers sa femme et, sans dire un mot, il la saisit par le bras pour l'emmener.
LILA — Que diable vous prend-t-il ?!
TASAR — Nous y allons désormais ! Nous avons assez séjourné ici !
LILA, tout bas — Que s'est-il passé ? Y a-t-il une urgence ?
TASAR, à part — Ne peut-elle pas juste me suivre ?! (à Lila) Oui, venez !
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Ethrian IV - Lila
FantasyLila est une jeune noble de la Couronne d'Ethrian, dont le mari a été enlevé. Elle rejoint en secret le palais royal afin d'être en sécurité et d'être soignée. Elle y retrouve sa soeur, Shira, mariée à un des six Princes. Personne ne sait ce qu'il s...