Chapitre 3 - Les griffures

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Onze ans auparavant...

Elle revenait souvent à pied de l'école. Sa maman lui avait montré plusieurs fois le chemin, l'avertissant des ruelles à esquiver ou des monsieurs à éviter. Ces conseils l'inquiétaient plus qu'autre chose. Apparemment, il y avait d'autres dangers que les méchants qui la suivaient tout le temps.

Tenant nerveusement les sangles de son cartable aux couleurs pales, usé par le temps, elle pressa ce dernier contre son dos, accélérant le pas, n'appréciant pas d'être trop longtemps dehors toute seule.

Plus elle tardait, plus rapidement ils arriveraient. La tête baissée, elle continuait d'avancer, une certaine tension commençant à l'envahir. Elle le sentait. Ils étaient proches. Elle ne voulait pas courir : cela les amuserait. Elle ne voulait pas pleurer : ils ne souhaitaient que ça. Néanmoins, sa respiration s'accéléra tandis qu'elle hâtait le pas. Les rires se firent davantage distincts. Elle serra plus fort ses doigts autour de son cartable, relevant légèrement la tête pour constater qu'il ne lui restait plus qu'une rue à traverser avant de retrouver la maison.

Elle passa devant le portail des madames qui lui donnaient toujours à manger. Puis longea la clôture du monsieur qui avait deux gros chiens. Mais avant d'atteindre la bâtisse aux jolies fleurs, elle sentit qu'on la tirait sur le côté.

Les rires s'amplifièrent tandis qu'elle luttait contre le méchant qui tirait son manteau pour l'attirer dans les roses qui décoraient fièrement la maison de la dame. Elle retint difficilement un sanglot en sentant les problèmes arriver. Une autre de ces créatures lui tira les cheveux, la faisant crier de douleur. L'autre méchant en profita pour l'attirer davantage vers les épines acérées, et, n'arrivant plus à se maintenir au sol, elle finit par tomber dans les roses, s'écorchant toutes les parties du corps qui n'étaient pas protégés par un vêtement.

Ses larmes glissèrent le long de ses joues, tandis qu'elle essayait vainement de se sortir de ce piège épineux. Mais plus elle bougeait, plus les épines l'écorchaient. Ses pleurs se mêlèrent aux rires hystériques des méchants. Les brumes noires l'entouraient, elles étaient de plus en plus denses. Elle gémissait de douleurs, ne voulant pas crier. Surtout ne pas crier, sinon ils allaient encore plus lui faire de mal.

- Oh mon dieu Eïlynn ! Attends, ne bouge pas, je vais te sortir de là, attends ! s'alarma la dame de la maison.

Elle était sûrement sortie après avoir entendu le raffut qu'avait fait la jeune fille, elle avait pourtant essayé de retenir ses pleurs. Elle avait envie de dire à la dame de ne pas s'approcher d'elle, mais si elle ouvrait ne serait-ce qu'un peu la bouche, elle savait qu'elle hurlerait de douleur. Les épines s'enfonçaient sournoisement dans sa peau et les ronces s'accrochaient à ses vêtements, l'empêchant de sortir par elle-même.

Et les rires continuaient encore et encore. Mais à l'instant où la dame s'approcha, les créatures la lâchèrent, comme si elles étaient curieuses de voir si la dame était capable de la sortir de ces roses.

- Voilà, voilà... Ça va faire un peu mal, mais ça va aller ma chérie... tenta de rassurer la jeune femme, en enroulant l'enfant dans une couverture, sûrement récupérée dans une des chambres de la maison.

Elle attira Eïlynn contre elle, l'extirpant des ronces. La jeune fille ne put retenir un gémissement de douleurs, et pleura contre l'épaule de la dame qui avait réussi à arrêter ce calvaire.

- Chh... Chh... Là... C'est fini... C'est fini... Viens, on va soigner tout ça, et je vais te faire un chocolat chaud. Tu aimes ça, n'est-ce pas ? proposa la jeune femme en consolant contre elle la jeune fille écorchée à vif.

The inheritance of stonesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant