The inheritance of stones

Chapitre 7 - Maminou

Quatorze ans auparavant...

La sonnerie de la porte retentit.

Eïlynn se précipita vers cette dernière. Ses boucles sauvages volaient dans tous les sens tandis qu'elle se jetait sur la poignée de la porte pour l'ouvrir en grand, sautant dans les bras de la personne qui attendait derrière.

- Maminouuu ! cria-t-elle, heureuse de retrouver sa grand-mère.

Cette dernière, habituée aux effluves de joie de sa petite fille, la prit dans ses bras pour lui embrasser bruyamment les deux joues.

- Bonjour ma sauterelle, tu as l'air d'être en pleine forme, constata Eléane en esquissant un sourire amusé face à Eïlynn qui riait aux éclats dans ses bras, ses petites mains fourrageant dans les cheveux sombre de sa grand-mère.

- Eïlynn, laisse un peu respirer ta grand-mère voyons, laisse-la au moins rentrer dans la maison.

La mère de la petite se tenait à l'embrasure de la porte de la cuisine, un plat garni de petits fours entre les mains, elle sermonnait gentiment sa fille, un sourire de mère heureuse flottait sur ses lèvres.

Eléane posa Eïlynn qui s'empressa de courir jusque dans la cuisine. Cette petite n'avait de cesse de courir partout. Elle était inépuisable. Le sourire de la grand-mère s'effaça peu à peu, prenant un pli amer en constatant que le nombre de griffures sur les bras de sa petite fille avaient encore augmenté. Keira avait beau dire que sa fille était simplement maladroite et tombait souvent, Eléane ne pouvait croire cela. Il y avait autre chose. Quelque chose qu'elle n'arrivait pas encore à bien cerner.

Elle ferma la porte derrière elle, se joignant à la joyeuse troupe qui finissait de préparer le repas du midi. En tout cas, cela y ressemblait. Entre Keira qui surveillait les moindres gestes de sa pile électrique et Eïlynn qui tentait vainement de plonger son doigt dans la purée de pomme de terre, cela ressemblait plus à un sketch de famille qu'à de la cuisine. Mais Eïlynn fut plus maline, elle réussit à plonger son doigt dans la purée et en étala sur le nez de sa mère. Cette dernière la gronda et fit de même sur son nez. Elles éclatèrent de rire tandis qu'Eléane restait en retrait, adossée contre l'embrasure de la porte, elle les regardait en souriant tendrement. Elle aimait ces moments avec sa fille et sa petite sauterelle. Ces moments se faisaient malheureusement de plus en plus rare, à son grand regret. Son sourire se fana rapidement lorsque le mari de Keira entra dans la cuisine et embrassa sa femme sur le nez, ramassant la purée au passage.

- Hmm... C'est délicieux chérie, encore plus mangé ainsi, constata-t-il en souriant, prenant sa femme entre ses bras tandis qu'Eïlynn gloussait entre les jambes de sa mère.

- Tiens... Tu nous fais l'honneur de ta présence... Dreq, cracha Eléane dans une moue désapprobatrice en ne bougeant pas de sa position.

- Maman... soupira Keira en se détachant des bras de Dreq, ne commence pas...

- Ça va Keira, c'est simplement amical entre moi et ta chère mère. N'est-ce pas Eléane ? demanda-t-il à l'intéressée, vous savez ce que Molière disait : « Si c'est votre façon d'aimer, je vous prie de me haïr. », ajouta-t-il en lançant à Eléane un sourire provocateur.

- Je me suis arrêtée au mot « amical » le reste ne veut rien dire, cher gendre. Je vous déteste, et vous me détestez, n'essayez pas de le masquer derrière vos faux sourires. Ça ne marche qu'avec ma fille, ajouta-t-elle en plissant les yeux de mécontentement en direction de Keira.

Cette dernière leva les yeux au ciel, habituée à ces querelles. Eléane n'avait jamais apprécié son mari, elle ne l'avait jamais accepté dans la famille même après qu'Eïlynn soit venue au monde, il semblait même que cette hostilité entre eux s'était amplifiée à ce moment-là. Keira les laissa à leur discussion houleuse, et s'accroupit face à Eïlynn qui regardait à tour de rôle son père puis sa grand-mère d'un air inquiet.