Chapitre 18 : Un Homme Nouveau (1/2)

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Un soubresaut anima son corps pâle et chétif. D'abord une infime contraction musculaire. Des doigts qui se replient sur les draps. Des yeux qui roulent sous des paupières. Une langue qui déglutit par automatisme une salive inexistante. Puis ses lèvres sèches se décollèrent pour laisser passer une première bouffée d'air. L'oxygène gonfla ses poumons atrophiés et une toux expulsa la douleur.

Enfin, il ouvrit les yeux.

Ses paupières papillonnèrent, tentant d'humidifier les précieux globes qu'elles renfermaient. Sa tête, soudainement lourde, roula sur le côté.

Il se rendormit.

Un temps indéfinissable plus tard, il se réveilla à nouveau. Des fourmillements parcoururent son corps jusqu'au bout de ses orteils. Il en remua les doigts, caressa la douceur du drap sous sa peau et les releva à hauteur d'yeux. Il observa ses mains, les tournant et retournant devant sa vue trouble avant de comprendre que ces bouts de chair et d'os qui se mouvaient sans même en prononcer l'ordre lui appartenaient. Reprenant peu à peu conscience de son corps, il porta sa paume à son visage et sentit son souffle au creux de celle-ci. Il respirait. Sa poitrine se soulevait au rythme de ses inspirations et son cœur, dont il pouvait percevoir les palpitations à travers son cou qu'il explorait à présent du bout de ses doigts encore tremblant, battait à intervalle régulier.

Patiemment, il explora son enveloppe charnelle, étirant ses muscles perclus de sommeil, et se redressa dans son lit moelleux et chaud. Une fois la vue retrouvée, il observa avec minutie la pièce sombre dans laquelle il se trouvait, sans même que la semi-obscurité ne l'incommode.

À sa droite, de nombreuses fenêtres étaient habillées de lourds rideaux bordeaux. Le jour filtrait à travers, baignant la chambre d'une lumière rouge. Sur les murs, de somptueuses tapisseries richement brodées ornaient l'intégralité de la chambre. Juste à côté de lui, il aperçut, posé sur une table de chevet, une bassine émaillée remplie d'eau froide. Sur son bord, un linge humide avait été déposé. En face de sa couche, une imposante armoire sculptée dans du bois de sapin lui faisait face. Sa masse surprenante domptait l'ensemble de la pièce. À l'instar d'un couple inséparable, un grand miroir au cadre doré l'accompagnait.

Il continua son inspection en dirigeant son regard sur sa gauche, la partie la plus sombre de la pièce. Un homme était là, endormit sur une chaise, le coude calé sur le meuble qui l'accolait. Sur ses genoux, un livre ouvert reposait. L'individu soutenait sa tête avec sa main, les yeux cachés derrière sa paume.

Aucune inquiétude ne vint bousculer l'étourdi qui, incapable de placer un nom sur ce visage, se détourna de lui. Sa conscience et sa mémoire encore endormies ne lui permirent pas d'agir comme l'aurait fait n'importe quel humain doué de peur. Rien ne vint agiter ses instincts primaires, comme si l'inconnu ne représentait aucune forme de danger.

Toujours sur son lit, il se redressa silencieusement et poussa les draps sur le côté. Il passa ensuite ses jambes par-dessus et posa ses pieds nus sur le parquet. Assis sur le rebord du matelas, il faisait dos à l'étranger. Il scruta ses propres mains et se demanda ce qu'il faisait ici. Où était-il d'ailleurs ? Et qui était-il ? Aucun nom ne vint à son esprit. Il chercha désespérément à se souvenir de quelque chose, mais rien ne lui revint. Absolu­ment rien.

Il refit la girouette avec sa tête, or non, il ne connaissait pas cet endroit. Il aurait aimé se mettre debout pour regarder dehors, mais ses muscles ne lui permettaient pas un tel effort. Il était trop tôt.

Sans raison, il ressentit le besoin de contrôler son poignet gauche. Il l'inspecta, le palpa, puis cessa. Qu'en attendait-il ? Il n'en avait pas la moindre idée.

CICATRICES - T1 - Le Parfum Du SangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant