I : Le vent qui emporte au large

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Catrina


La petite fille faisait rebondir son ballon contre le mur de sa maison. Ce jour-là, c'était son anniversaire, elle avait donc le droit de rester un peu dehors, de sortir sa petite tête blonde dans la rue. Catrina profitait au maximum de ce moment de liberté. Sa mère craignait sans cesse pour sa fille, répétant sans cesse que le monde extérieur pouvait se montrer très dangereux pour quelqu'un comme elle. La fillette ne comprenait pas vraiment, mais aimait sa mère alors elle obéissait. Ce bruit de ballon résonnant sur le mur, unique dans l'année, la ravissait. Ses yeux bleu-vert lagon suivait avec attention l'objet de son jeu. Catrina riait joyeusement quand soudain, des bruits de pas bruyants claquèrent au bout de la rue. La petite se figea. Le ballon roula au sol.

Sa mère sortit brusquement, paniquée, et vint vite la prendre dans ses bras pour la ramener à l'intérieur. La fillette observa alors avec horreur une main gantée de noir les tirer toutes les deux en arrière.

—Maman !

La femme s'accrocha encore davantage à sa fille.

—Non ! hurla-t-elle. Vous n'avez pas le droit de me l'enlever ! C'est mon enfant !

Une voix mielleuse mais glaçante lui répondit.

—Madame, ce sont les lois de la Guilde. Vous vivez sur l'île, vous devez vous y soumettre.

Catrina agrippa de ses petites mains le cou de sa mère. L'homme qui la regardait avec insistance portait un riche manteau de fourrure. Des gardes aux lances menaçantes assuraient une coopération de la part des visiteurs derrière leur maître. Catrina vit sa mère commencer à pleurer.

—Non. Ce n'est qu'une enfant. Elle est petite, je ne veux pas qu'elle aille là-bas ! Elle est trop jeune !

—Mais selon nos renseignements, elle use déjà de ses pouvoirs.

La petite sentit tout à coup une vague de chaleur lui monter au visage. C'était donc à cause de ça que sa mère ne voulait pas qu'elle sorte ! Catrina pensait que ça restait un jeu, une chose normale, elle qui n'avait jamais vu d'autres enfants. Pourquoi serait-ce mal, ou de nature à la séparer de sa famille ?

Une idée germa alors dans sa tête. Ça pouvait paraître fou mais elle ne voulait pas qu'on l'emmène. Elle leva sa petite main et une bourrasque naquit aux pieds des gardes. Le vent qu'elle inspirait était déjà puissant. Il déséquilibra quelques hommes pris par surprise. Cependant, celui qui semblait être le maître ne bougea pas d'un pouce. Il l'observait d'un œil intéressé.

—Impressionnant petite... très impressionnant. Tu seras sans doute l'une des meilleures recrues.

Alors que la femme reculait, il claqua des doigts. Les gardes remis rapidement sur pieds l'immobilisèrent alors, la maintenant par les bras tandis qu'un autre prenait l'enfant

Non ! Non, pitié, ne me l'enlevez pas, par pitié.

Le maître réceptionna Catrina qui se débattait en hurlant elle aussi. Il la prit et la couvrit d'un regard glaçant. La petite cessa aussitôt de bouger, paralysée par la terreur.

—Oui... tu nous seras très utile. Une fois que tu seras matée.

*

Le fouet claqua en l'air. La chair fut lacérée en un instant. Catrina serra les dents. Après plusieurs années à trimer sur cette galère, sous le soleil brûlant qui écorchait sa peau et les mains attachées à des fers qui la maintenaient à genoux, elle avait appris à ne plus crier. Tant d'années loin de sa mère maintenant. Elle avait arrêté de compter. La jeune femme renifla, ravalant la douleur.

La Cascade ArdenteWhere stories live. Discover now