—Debout !
Un coup de pied dans les côtes de Catrina la ramena brutalement à la réalité. Elle émergeait tout juste du monde des rêves dans lequel elle avait réussi à se réfugier quelques heures. La douleur brûla à nouveau tout son buste, l'irradiant de toutes parts. Elle serra les dents pour éviter de déjà hurler. Cette fracture semblait tenace, mais il faudrait tenir jusqu'au soir. Pas question d'offrir à ses maitres un sentiment de satisfaction sadique.
Catrina grogna une approbation en levant les yeux vers Ambre. L'héritière des Olowen paraissait encore vouloir lui faire payer son insolence de la veille. Elle se leva, s'appuyant sur ses mains afin d'épargner au maximum ses côtes douloureuses. Ambre la toisa avec dédain avant de tourner les talons. Catrina parvint à se mettre debout et suivit sa maîtresse.
La marche du matin. L'un des seuls rituels qu'elle appréciait en temps normal se transforma en supplice. Chaque pas lui coûtait un énorme effort, tant physique que mental. Sa respiration se compliquait. Gauche, droite. Bientôt le pont franchi. Gauche, droite. Plus que l'escalier menant à la barre.
Elle se retint d'essuyer la sueur perlant déjà sur son front alors que la matinée était fraîche. Avec un enthousiasme non habituel, Catrina se laissa tomber à genoux puis passer les fers. Elle souffla. L'immobilité acquise lui procura un léger soulagement.
—Bien. Maintenant fais avancer notre navire, ordonna Ambre.
Elle obéit sans broncher, tâchant de contrôler ses bourrasques. Bien sûr, le prétexte pour la frapper viendrait sans aucun doute, cependant elle essaya de minimiser les dégâts ce jour-là. Son corps avait appris à encaisser mais cette fois était celle de trop. Peut-être qu'elle ne pouvait pas rester aussi forte qu'elle le croyait. Peut-être que c'était cette blessure qui la tuerait. Sa promesse de tenir jusqu'au bout s'étiolait. De toute façon, ils finiraient bien par s'en rendre compte. Et un esclave abimé n'était plus qu'un esclave condamné.
Le soleil se leva à l'horizon ; les yeux de Catrina e trouvèrent éblouis. Elle ne tiendrait pas. Dès que l'astre serait à son zénith, la chaleur l'assommerait. Elle peinait déjà à rester éveillée, craignant à tout moment de perdre connaissance.
Elle entendit les bottes du capitaine Olowen claquer sur le plancher et ses mains empoigner la barre. Les ongles de Catrina rentraient dans sa peau tant elle serrait les poings, attendant un impact. Qui ne vint pas. Elle rouvrit ses yeux, fermés par réflexe. Des cris se firent entendre. L'équipage s'affolait.
—Père... souffla Ambre d'une voix blanche.
Catrina n'avait jamais senti sa maîtresse si paniquée. Elle chercha du regard la cause de cet effroi. En plissant les yeux, elle put entrevoir un navire. En apparence, il était en tout point identique au leur, néanmoins le drapeau qui flottait au plus haut mât ne ressemblait ni à celui de la Guilde, ni à l'emblème de l'une de ses familles du Cercle. En réalité, cette cascade d'eau terminée par un brasier lui inspirait de l'admiration. Mais un nouveau coup vint l'arracher à sa contemplation.
Utilise l'Air ! Immédiatement pauvre folle !
Catrina fut sonnée, ses oreilles bourdonnèrent alors que la douleur remontait à nouveau. De quoi avaient-ils si peur exactement, eux qui ne craignaient ni les hommes, ni les déesses ? Si elle n'obéissait pas, elle n'aurait jamais l'occasion de le savoir, aussi la fille de l'Air s'exécuta mais à sa grande surprise, leur bateau ne bougea pas d'un pouce. Ambre se mit à crier alors que son père jura. Le capitaine usa à son tour de ses pouvoirs, sans succès. Catrina n'avait d'ailleurs jamais compris pourquoi les hommes du Cercle, investis de l'Air également, ne faisaient pas eux-mêmes avancer leurs bâtiments. Ils préféraient sans doute ne pas avoir à s'épuiser et laisser tout le travail aux esclaves.
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La Cascade Ardente
FantasyIl est un navire. Un navire qui peut voguer sur toutes les mers. Qui parcourt les horizons de tous les mondes. Cord et Adélia n'étaient que des enfants lorsqu'ils ont décidés de fuir le Cercle de la Guilde, haut lieu de décision sur une île où l'arg...