Chapitre 9

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Voilà. C'est arrivé. Il a fallu que ça arrive un jour, et ce jour, ce fut celui-ci.

Ce matin-là, je m'étais levée tranquillement, avais préparé mon petit-déjeuner comme toujours, et avais remarqué que mon père m'avait envoyé un message. Il m'avait dit de ne pas venir, que peut-être que la tournée n'allait jamais voir le jour.

Je n'avais pas bien compris ce qu'il avait voulu dire, et je l'avais de suite relancé. En panique, je lui avais demandé ce qu'il se passait, pourquoi semblait-il si certain, et pourquoi du jour au lendemain, tout allait probablement être annulé ?

« Sam, Michael ne va pas très bien... »

J'avais dû lire son message une bonne quinzaine de fois, avant de lui demander des précisions, inquiète et affolée.

« Il est en train de se faire réanimer. Mais c'est probablement trop tard, ils ont trop attendu. »

Je fus contrainte de m'assoir. Enfin, je tombai, plutôt, assise sur le canapé. Mes jambes ne me tenaient plus, et j'avais l'impression que mon cœur non plus.

C'était pas possible, ça pouvait pas être vrai. J'hallucinais, ou je rêvais. Oui, ça devait être ça, je n'étais pas encore réveillée. C'était impossible, hier encore, nous rigolions ensemble, il était en grande forme.

Enfin, comme on peut l'être à cinquante ans, quand le monde ne parle que de vous et de votre retour sur scène, et qu'alors que vous étiez prêt pour dix dates, on vous en annonce cinquante.

« On se revoit en juillet. »

Seulement, il aurait fallu qu'il y ait juillet.

Des fans allaient perdre leur idole de toujours, une famille allait perdre un frère, un fils, un oncle, et même un père, des danseurs allaient perdre leur patron, leur modèle, et j'allais perdre le meilleur ami que je n'avais jamais eu, l'homme que j'avais toujours rêvé d'égaler, même si je savais pertinemment que c'était impossible.

Je n'osais rien faire. Ni répondre à mon père, ni allumer la télé pour vérifier si c'était bien la vérité. Je n'osais plus bouger. J'étais figée.

S'il vous plaît, ça ne peut pas être vrai, c'est pas possible. C'est Michael Jackson, ce gars-là, il est immortel. Vous pouvez pas juste le faire disparaître d'un coup. Donner c'est donner, reprendre, c'est voler.

Il n'avait encore dit au revoir à personne. C'était prévu, certes, il allait le faire, mais pas encore. Pas tout de suite. Après. Bien plus tard. C'était arrivé trop tôt.

J'avais reçu des tonnes de messages, de la part de mes collègues, de mes amis, de ma famille. Tous me demandaient si j'avais eu la nouvelle et si j'allais bien.

Si j'avais eu la nouvelle ? Malheureusement oui.

Si j'allais bien ? Absolument pas.

Mon père m'avait dit qu'il était "probablement trop tard", peut-être avait-il faux ? Pitié, faites que oui. Pitié, faites que tout ça ne soit qu'une énième fausse rumeur.

Ma main avait attrapé la télécommande et avait pressé le bouton qui allumait la télévision en tremblant. J'avais passé les chaînes pour tomber sur l'une qui diffusait des informations en direct.

Ça n'était pas une rumeur. Mais ils ne savaient pas encore où il en était.

Et pour la première fois de la journée, j'avais explosé en sanglots. C'était incontrôlable, mes yeux s'étaient embués tout seuls. J'avais serré les poings, si fort que mes doigts en étaient devenus rouges, mes joues avaient bien vite été trempées de larmes, j'avais une douleur horrible dans l'estomac, une douleur qui se répandait dans tout mon corps.

Mon cœur battait la chamade, j'étais presque sûre qu'il allait sortir de ma poitrine. Ma tête tournait, je voyais flou. Les sanglots m'empêchaient de respirer correctement, et la femme dans le petit écran parlait, mais je ne comprenais pas un traitre mot de ce qu'elle racontait.

Je suis restée dans le doute et dans mes larmes longtemps, très longtemps, une éternité. Je fixai la télévision avec effroi, apeurée. Je ne clignais presque pas des yeux, et je refusais de bouger tant que je ne savais pas si Michael était encore là.

Quatorze heure, vingt-six minute. Je m'en souviendrai toujours. C'est à quatorze heure, et à vingt-six minute, que la présentatrice a pris un air grave, les yeux mouillés, et a dit :

« Le site TMZ confirme la mort de Michael Jackson. »

Un monde qui s'effondre, un rêve qui s'écroule, une légende qui s'envole.

Mon portable qui vibre, ma main qui l'attrape et le jette violemment par terre.

Mes sanglots silencieux, et ceux des fans à la télé.

Mon meilleur ami. Mon modèle. Mon idole. Michael Jackson. Parti.

Probablement que le monde ne le méritait pas. On nous avait donné une personne talentueuse, au grand cœur, qui a marqué l'histoire et des milliers d'esprits, mais certains n'ont pas su le voir.

Il n'est pas mort, il a été tué. Par ceux qui n'ont pas vu. Par ceux qui n'ont pas cru. Parce qu'ils n'ont pas voulu voir. Parce qu'ils n'ont pas voulu croire.

Le ciel comptera une étoile de plus ce soir. Mais Michael Jackson ne mourra jamais.

Car il vit à jamais dans nos cœurs.


FIN

This Is ItOù les histoires vivent. Découvrez maintenant