Coffee

31. cafe mendoza

Après tous ces jours passés avec son compagnon de fortune, à le voir des aurores au crépuscule, Jimin ne put s'empêcher de remarquer l'absence de Yoongi.

Avant qu'ils n'aient décidé de remettre tous les compteurs à zéro, ce sentiment avait été mêlé de regrets et de pointes de colère, mais à présent il s'apparentait plus à quelque chose comme de l'anticipation, à de la curiosité vis-à-vis de ce qui attendait leur relation par la suite. Cela faisait plus d'une semaine qu'ils ne s'étaient pas vus, tout simplement parce que les cours avaient repris pour Jimin, et peut-être aussi pour Yoongi, mais également parce que durant les rares soirées où Jimin n'était pas enfermé dans un studio, il ne faisait que triturer son téléphone en se demandant si envoyer un message à Yoongi serait déplacé.
C'était un vendredi soir en l'occurence, et Jimin se rongeait les ongles, fixant son onglet de notifications misérablement vide dans le blanc de l'oeil. Ses cheveux encore humides laissaient s'écouler des gouttes hasardeuses sur l'épaisse serviette dans laquelle il s'était emmitouflé.

- T'es sûr que tu viens pas ?
- T'inquiète, amuse-toi Tae ! répondit distraitement Jimin, se retournant vers la porte qui menait au salon qu'il partageait avec son ami le plus proche.
- Et mon petit bisou ?
- T'auras ta ration en soirée, rit Jimin, attrapant l'autre serviette qu'il avait posé sur son lit pour se frotter les cheveux avec. Surtout si tu portes ton jean slim noir.
- Celui qui me fait des jambes de quarante kilomètres ?
- Le seul et l'unique.
- Tu lis dans mes pensées. Allez, je pars à la chasse, lança Taehyung, sa dernière boutade suivie du bruit de leur porte d'entrée se fermant dans une symphonie de crissements provenant de ses gonds mal huilés.

Jimin attendit que le bruit des pas de son meilleur ami se fonde, avant de soupirer. Il ne lui avait toujours pas raconté la conversation qu'il avait eu avec Yoongi, surtout pas après les litanies d'insultes que le plus jeune avait proféré à propos du musicien. Garder le secret devenait lourd, parce que son instinct ne cessait de le pousser à demander l'avis de Taehyung quand il hésitait à envoyer un message à Yoongi.
Préoccupé par l'idée de trouver un moment parfait où dire à son ami qu'il s'était réconcilié avec l'ennemi public numéro un, Jimin fredonnait distraitement l'air de la chanson qui jouait dans la chambre; il lui fallut la quelques secondes pour se rendre compte qu'il n'avait jamais lancé de musique et que ce qu'il chantonnait était tout simplement la sonnerie de son téléphone.
Les yeux ronds, le jeune homme attrapa le rectangle d'obsidienne, lisant le nom de l'émetteur de l'appel cérémonieusement.

- Doux Jésus, murmura-t-il, sa serviette lui tombant des mains.

Il s'agissait de Yoongi. Qui d'autre, après tout ? Ils n'avaient encore jamais échangé de messages, et il l'appelait soudain de nulle part, fracassant tous les codes sociaux du vingt-et-unième siècle à coups de machette. Jimin fixait toujours son téléphone, ce dernier sonnant avec entrain; il finit finalement par remarquer l'absurdité de sa réaction après quelques secondes additionnelles. Cela était loin d'être le premier appel qu'ils avaient échangé après tout. Peut-être avait-il pris l'idée de remettre les compteurs à zéro trop sérieusement.

- Allô ?
- Hey, le salua Yoongi. Sa voix était bien plus grave que d'ordinaire; Jimin entendit une quinte de toux forcée.
- Hey, répondit-il, un sourire amusé s'installant sur ses traits alors qu'il se laissait tomber en arrière sur son lit.

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- Monsieur ? Monsieur ?

Yoongi sursauta, s'excusant immédiatement. Distraitement, il fouilla un instant ses poches pour en sortir des billets qu'il tendit au conducteur du taxi.

- Passez une bonne soirée ! lui sourit ce dernier, lorsque le jeune homme descendit du véhicule.

C'était un vendredi soir, alors bon nombre d'étudiants quittaient leurs dortoirs malgré les teintes sombres du ciel, se parant pour des nuits qui se voulaient inoubliables.
Yoongi s'adossa contre un des murs de pierre de la résidence, observant un groupe d'amis s'engouffrer dans le taxi qu'il venait de quitter, sourires aux lèvres et rires retentissants. Leur bonne humeur contagieuse l'amusa, malgré sa nervosité.
Quand la voiture s'éloigna au loin, il laissa s'échapper un soupir, reportant son attention sur sa montre: il était vingt-deux heures. Il eut l'envie de se retourner pour se frapper la tête contre la pierre froide, sa frustration le reprenant. Cela faisait maintenant plus d'une semaine qu'ils ne s'étaient pas parlé, et pourtant Yoongi était en train d'attendre Jimin au rez-de-chaussée de son dortoir.