Chapitre 13: Bivouac Retourné

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Le soir était déjà tombé, la journée avait été longue. Après que Paul se soit remis de sa montée d'adrénaline et que Joe ait rappelé les règles de bases pour ne pas choisir les aliments toxiques, Henry était retourné au campement et l'avait retrouvé saccagé.

La stupeur fut grande, il avait laissé les affaires sans surveillance durant une toute petite heure maximum. Qui ou bien quoi, avait pu venir et éventrer leurs trois sacs avant de trouer leurs hamacs ? Et puis surtout, pourquoi ?

Blême, il avait répertorié les dommages, un à un. Joe était ensuite arrivé. Il tenait Paul qui avait un peu de mal à se remettre, mais qui était tiré d'affaire. Il n'avait pas absorbé le poison. Le blond avait veillé à vérifier l'état de la baie qui était restée intacte. La peau n'était pas mortelle, seulement toxique, c'était la chair qui tuait en un éclair.

Joe avait lâché un cri en voyant l'état du bivouac. Paul quant à lui, n'y avait pas fait réellement attention. Des plaques rouges recouvraient son visage et descendaient jusque dans son cou. L'apprenti scout avait abandonné quelques minutes son ami dans les bras d'Henry et s'était mis à la recherche de plantes apaisantes.

L'adolescent le soupçonna d'avoir pris volontairement plus de temps, pour ne pas avoir à supporter les geigneries du brun. Dont les démangeaisons le faisaient souffrir et le rendaient insupportable. Quand Joe était enfin arrivé, il avait étalé une espèce de pâte blanchâtre sur l'ensemble de la peau visible de Paul.

Ça sembla le soulager un peu. Alors qu'Henry et Joe rassemblaient leurs affaires et essayaient de rattraper leurs slips éparpillés un peu partout, Paul s'était endormi. Deux heures plus tard, ils étaient enfin prêts à partir et pourtant la nuit n'allait pas tarder à pointer le bout de son nez. En Sibérie, les journées étaient courtes, il fallait se lever tôt pour profiter de l'ensoleillement.

Ils purent avancer de quelques kilomètres, environ dix d'après les calculs de Paul, qui avait récupéré après sa longue sieste. Rapidement, ils prirent la décision d'installer leur bivouac quand ils croisèrent pour la première fois une plaine. Leurs hamacs n'étant plus utilisables, il était préférable de s'installer sur de la terre plate, loin des racines de sapin.

Les voilà donc éreintés par leur journée infructueuse, qui ne faisait qu'allonger leur voyage déjà trop long. Personne n'osait ouvrir la bouche. La déception, la fatigue et la faim étaient bien trop grandes. Un léger criic fit lever le nez de Joe qui observa grâce aux dernières lueurs, un écureuil grimper rapidement le tronc de l'arbre. Il  rejoignait son nid, qu'il imagina douillet, chaud et empli de provisions. Actuellement, il adorerait être un écureuil.

— Les gars, vous commencez pas à douter ? demanda le blond, d'une petite voix.

Henry souffla, il savait que le doute était un véritable virus. Une fois installé au coeur de la cellule, il se démultipliait et il était difficile de l'en déloger.

— Ce n'est pas comme si on pouvait faire demi-tour.

Paul toussota, contrarié.

— En fait si, ce serait même la meilleure chose à faire.

Henry regarda ses deux amis dont les yeux étaient petits et brillants de fièvre.

— Vous êtes sérieux ? Vous voulez abandonner ? Après tout ça ?

Joe se racla la gorge et observa ses pieds, très mal à l'aise. Plusieurs fois il s'était posé la question, mais cela restait passager. Aujourd'hui, c'était différent.

— On n'a jamais été aussi près du but, continua Henry.

— Ni aussi près de la mort, s'enquit Paul, pessimiste.

La dernière tartineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant